Oui, il existe un groupe hip-hop de propagande chinoise

  • Dans l’empire du Milieu, Xi Jinping et le Parti font tourner des MC de la province de Sichuan pour influencer une jeunesse qui doute. Portrait de ces nouveaux prêcheurs en baggy.

    Beijing State of MindIl y a trois ans, le hip-hop était encore confidentiel au pays de la mandopop, cette variétoche chantée en mandarin. De plus en plus populaire chez les jeunes, il est aujourd’hui au centre de toutes les attentions. Sur internet, il est même devenu viral, à l’image de la compétition entre MC  « Future Flame », organisée à Pékin, dont les épisodes en ligne ont été vus plus de deux milliards et demi de fois.

    C’est pourquoi Xinhua, la plus ancienne agence de presse nationale chinoise, utilise désormais des cartoons où des personnages rappent pour expliquer la politique du président Xi Jinping. C’est également pour cela que le Parti communiste chinois est passé à un stade supérieur depuis peu. Son plan : endoctriner les jeunes grâce à un groupe de hip-hop, Tianfu Shibian.

    Communist Party People. Casquette de baseball sur la tête, Li Yijie, le leader du crew, de son nom de scène Pissy (“énervé” en anglais), détonne parmi les silhouettes austères des cadres du Parti. S’il s’est attiré leurs faveurs, c’est grâce à la chanson Force of Red en 2016 qui attaque en règle contre l’indépendance de Taïwan.

    La vidéo a fait un énorme buzz sur Weibo, sorte de Twitter cadenassé par la censure. Avec son patriotisme affiché, Tianfu Shibian est illico repéré par la Ligue de la jeunesse communiste, cette organisation qui compte environ 70 000 000 de membres et des représentants dans chaque classe du pays et qui a pour but d’enrôler les Chinois de 14 à 28 ans. Elle produit le clip suivant This is China, ode nationaliste sur fond de boom bap, et entend étendre encore un peu plus l’influence de ses nouveaux poulains : depuis quelques mois, Tianfu Shibian tourne ainsi dans tous les évènements organisés par la ligue.

    « Si le Parti reste dans ses anciens schémas, il sera de plus en plus rejeté par la jeunesse. »

    Générations désenchantées. Ce soutien n’est évidemment pas anodin quand on sait que les nouvelles générations se frottent actuellement à un marché du travail rude et à une hausse spectaculaire du prix des logements. Soit autant de désillusions cruelles pour ceux à qui on avait promis le « miracle chinois » et qui ne croient plus à la propagande old-school. « Si le Parti reste dans ses anciens schémas, il sera de plus en plus rejeté par la jeunesse. Si ceux nés après 1990 n’entrent pas dans le système, qu’est-ce que notre pays va devenir ? », s’inquiète Li Yijie, âgé de 23 ans, dans une interview à Reuters. Plus démocratique, peut-être ? Reste que si la mission de Tianfu Shibian échoue, le Parti a tout prévu : la Ligue de la jeunesse a aussi mis sous sa coupe le boys band adolescent le plus célèbre du pays, les TFBoys…

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