The Strokes, 15 ans après

  • En octobre 2001, cinq New-yorkais en slim-Converse secouaient la planète rock avec « Is This It ». En attendant le prochain album, profitons-en pour remonter quinze ans d’une carrière compliquée, en dents de « si ».

    « S’il y avait Britney Spears d’un côté et Limp Bizkit de l’autre, nous serions pile au milieu. »

    Juillet 2001, la violence molle. Trois mois avant la sortie de « Is This it », le premier album des Strokes, Julian Casablancas, Albert Hammond, Jr. et Nick Valensi paradent dans les locaux de BMG, en face de la Bourse de Paris, à l’occasion de la première venue promo française du groupe. Alerté par la rumeur d’un EP défenestrant et une attitude d’héritiers des années dorées du CBGB, l’escadron de la presse spécialisée est venu dénicher the next big thing. «  Il y a un côté universel et intemporel dans nos mélodies. On a cherché à enregistrer un album qui résiste au temps et on l’a fait de manière honnête, sans vouloir jouer à tout prix la carte de la nostalgie », tente de décrypter, face aux journalistes, Julian Casablancas, chanteur à mèche taciturne. « Si je devais décrire notre musique en deux mots, je choisirais « beautiful aggression ». De la violence molle, l’impression que tu as quand tu te bats sous l’eau en donnant des coups au ralenti », ajoute Albert Hammond Jr., guitariste à l’aise avec la métaphore, avant de laisser le dernier mot à Nick Valensi, la deuxième guitare des Strokes : « S’il y avait Britney Spears d’un côté et Limp Bizkit de l’autre, nous serions pile au milieu. »

    2003, same player shoot again. Quelques mois après la sortie du disque, une armée de groupes en cuirs taillés et Converse customisées bouscule la teen-pop, atomise le nü-metal et replante le drapeau du rock sur les cimes du Billboard. Leaders du mouvement, les Strokes récidivent avec « Room On Fire » en 2003, un deuxième essai reproduisant leur formule gagnante guitares en rangs serrés/rythmiques post-punk, mais privée de l’art du single dont bénéficiait son brillant prédécesseur.

    2006, première crise cardiaque. Les premiers troubles surgissent en 2006 lorsque les Strokes larguent leur fidèle producteur Gordon Raphael et choisissent David Kahne, un polisseur de chromes pour Sugar Ray et Paul McCartney. « First Impressions of Earth », malgré l’épatant single You Only Live Once, déçoit fans et critique. En coulisses, ce troisième essai cristallise aussi les premières tensions internes. À la fin de l’année, Julian Casablancas exprime tout haut son envie de « faire un break ».

    2007, y’a-t-il encore un groupe dans l’avion ? Le hiatus est prononcé en 2007, bientôt suivi par les inévitables tentations solo : Albert Hammond, Jr. tire le premier quelques mois plus tôt avec la folk sensible de « Yours To Keep », puis Casablancas satisfait ses pulsions electronica new-wave dans l’exigeant « Phrazes for the Young », en 2009. Bien plus que des one-shots égotistes, ces projets solo constituent le point de départ de véritables carrières parallèles, comme le confirmeront les deux essais suivants d’Hammond, Jr. « ¿Cómo Te Llama? » (2008), « Momentary Masters » (2015) et « Tyranny », où Casablancas est accompagné par sa nouvelle formation The Voidz dans un album publié en 2014 sur son propre label, Cult Records. On en aurait presque oublié les Strokes…

    2009, différence de points de vue. À sa sortie, « Angles » et sa gestation difficile (producteur viré, Casablancas aux abonnés absents, Albert Hammond, Jr. en rehab…) mettent fin à trois ans de silence radio en jouant la carte expérimentale. Un compromis astucieux entre guitare et les boîtes à rythmes eighties qui alimente également les rouages de « Comedown Machine », le dernier album studio en date des Strokes, paru en février 2013.

    Nous travaillons lentement mais sûrement sur un album. Je ne sais pas quand il sortira, nous sommes actuellement en cours d’écriture.” (Nick Valensi)

    2016, « est-ce que c’est tout » ? En juin dernier, le EP « Future Present Past » réactivait l’entité Strokes avec quatre nouveaux titres diffusés via Cult Records. Il y a quelques jours, lors de la promotion de « New Skin », le premier album de son side-project CRX produit par Josh Homme, Nick Valensi révélait : “ Nous travaillons lentement mais sûrement sur un album. Je ne sais pas quand il sortira, nous sommes actuellement en cours d’écriture.” L’envie sera-t-elle à la hauteur de l’attente ? Julian Casablancas, de plus en plus impliqué dans sa carrière solo, sera-t-il l’invité de luxe de ce sixième album ? Les quatre New-yorkais auront-ils encore leur place dans le top des groupes qui comptent en 2017 ? Avec « Is This it », les Strokes avaient ouvert une porte. Quinze ans plus tard, nombreux sont ceux qui l’ont franchie dans l’autre sens, quitte à la claquer au nez des beaux gosses de Manhattan Island. Enfermés dehors ?

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