2017 M11 9
Entre deux mondes. Depuis son premier album en 2005 (oui, déjà !), Rihanna a toujours pratiqué l’art du grand écart, ce qui est toujours intriguant mais un peu risqué : Britney Spears, par exemple, a accumulé les bouses en procédant ainsi, mais passons, ce n’est pas le sujet. Ce qui fascine ici, c’est Riri, ou plutôt la faculté qu’a la Barbadienne à défendre un statut longtemps bâtard : celui de la rappeuse qui fait du R’n’B, de la chanteuse qui rappe.
Can i kick it ? À chaque fois que Rihanna a délaissé le chant pour déblatérer ses punchlines derrière le mic, force est de constater que le résultat était plutôt convaincant. La première fois, c’était en 2007 avec Lemme Get That et, déjà, Rihanna, épaulée ici au refrain par The-Dream, imposait son flow. Plus qu’un simple exercice de style, c’est d’ailleurs une véritable prise de pouvoir qu’elle entreprennait ici et qu’elle confirmait deux ans plus tard sur Wait Your Turn (avec une instru dubstep, remarquez l’exploit !) et Hard où, en duo avec Jeezy, elle annonçait d’emblée ses intentions : « Ils peuvent ce qu’ils veulent, je fais ce que je veux ».
Une rappeuse née. Toujours très bien entourée (Timbaland, Jay-Z, Kanye West, etc.), Rihanna n’avait donc aucune raison de revoir ses ambitions à la baisse. Après quelques tentatives plus ou moins convaincantes au début des années 2010 (Raining Men, Who’s That Chick ? ou Pour It Up), c’est donc avec une classe folle qu’elle enchaine depuis 2015 les tubes à rendre complétement gaga ceux qui pensent à tort qu’elle n’est qu’une poupée au service de sa maison de disques, qu’elle n’a pas le talent pour aller titiller les rappeurs et rappeuses dans leur domaine de prédilection. Écouter Bitch Better Have My Money, Pose ou LOYALTY, sur le dernier album de Kendrick Lamar, c’est donc l’occasion de tendre l’oreille à de petites bombes groovy et nerveuses grâce auxquelles Rihanna en ressort à chaque fois grandie, victorieuse et triomphante.
Crédit photo : Cameron Spencer