2017 M03 24
« Le dancehall est le style populaire du moment. » Cette analyse, ce n’est pas Vybz Kartel, ni Popcaan, qui la tient, mais Ed Sheeran, le folkeux irlandais le plus en vue de ces dernières années. Venant d’un artiste plus habitué aux guitares acoustiques qu’aux sound-systems pour soirées à base de gros sons et de fesses rebondies, le propos pourrait paraître étonnant. Sur ce coup, ce bon vieux Ed ne pouvait pourtant pas viser plus juste : de Rihanna à Major Lazer, en passant par Bruno Mars et Justin Bieber (Sorry), tout un tas d’artistes populaires semblent aujourd’hui se réapproprier les codes du dancehall.
L’un des derniers exemples en date n’est autre que Drake. Sur « More Life », le hit-boy multiplie les clins d’œil à Kingston et à sa scène artistique : Blem reprend un terme jamaïcain censé désigner la weed, Madiba Riddim adopte les rythmes percussifs et tubesques des classiques du genre, tandis que, ça et là, Drake entonne des « yuh dun knows » ou des « unruuuly », typiques de Popcaan, véritable chef de file du dancehall en Jamaïque. Hasard ou non, on le retrouve d’ailleurs sur le dernier single de Gorillaz, Saturnz Barz, pour quatre minutes tout en efficacité et en audace.
Car, oui, l’influence des rude boys sur la musique ne se limite pas aux stars américaines, elle est avant tout mondiale. En Angleterre, le collectif de Skepta, Boy Better Know, a ainsi intégré Newbaan, jeune prodige jamaïcain d’une petite vingtaine d’années, tandis qu’en France, le rappeur de L’Entourage Deen Burdigo a profité de Pas Une Autre pour faire siens les riddims de l’île caribéenne. Le retour en force du grime, très imprégné du groove jamaïcain, n’y est sans doute pas étranger, mais tout de même : la liste des artistes s’essayant au dancehall actuellement en dit long sur la créativité et la fraîcheur du genre ces derniers mois.