2016 M08 29
Graphiste et illustrateur bruxellois à l’univers de plus en plus reconnaissable, Elzo Durt travaille pour le journal Le Monde, la marque Carhartt, le label Born Bad, une poignée d’organisateurs de soirées et des groupes comme La Femme. Mais son véritable amour, ce sont les pochettes de disques. Qui ne lui le rendent pas vraiment… Best-of de ses pires accidents industriels.
Pas de bras, pas de chocolat.
« Depuis que je fais des pochettes, le plus souvent, j’ai été payé en disques. Je ne me plains pas, vu que j’ai beaucoup travaillé avec mes groupes préférés. Il y en a aussi que je n’ai jamais écoutés. Certains, je ne sais même pas ce que c’est. Finalement, il y a bien des plans thunes qui arrivent. On me propose un univers et des sous, je ne vais pas cracher dessus. J’ai besoin de l’argent et ça m’intéresse de sortir de ma zone de confort. J’ai fait une pochette pour un groupe flamand et toute la Flandre m’appelle. Il est aussi question d’une illustration pour un chanteur français sur une major, ce qui devrait permettre de me payer la porte de mon château. »
Le gros plan de la lose.
« J’exposais à Dijon et je venais d’avoir le permis, alors j’y suis allé en camping-car. À peine garés, on a commencé à picoler, au point que je me suis endormi dans la salle d’exposition. Thee Oh Sees jouait le lendemain. On s’est bourré la gueule tous ensemble et John Dyer a fini par acheter huit de mes œuvres, promettant que l’une d’elles serait la pochette du prochain album [« Carrion Crawler/The Dream », NDLR]. Il n’a jamais été question d’argent et de droits. Il m’a juste envoyé vingt disques de chez In The Red en échange mais comme s’il s’est gouré dans les frais de livraison, j’ai dû payer une énorme taxe pour les récupérer. Le gros plan de la lose. »
Tricard chez le boucher.
« De toutes mes pochettes, la vraie catastrophe, c’est la deuxième. C’était pour une compilation de Français qui organisent des soirées breakcore à Bruxelles. J’ai arrêté de bosser pour eux quand ils ont décidé d’appeler leurs teufs « Ramasse Ton Cerveau ». L’idée était de faire une pochette où un boucher tue un enfant. J’avais besoin d’un décor de boucherie, j’ai donc été chez le boucher de mon quartier avec un appareil photo. Il m’a laissé prendre des clichés de sa chambre froide et de la pièce où il découpe la viande. Quand j’ai eu fini la pochette, je suis venu la lui montrer mais il n’a pas trouvé ça drôle du tout… »
Déficit d’attention.
« En général, je me concentre à fond sur l’illustration mais la typo, ça me fait chier. Je trouve des solutions, j’essaye de ne pas bâcler mais sur le premier pressage de l’album de La Femme, il y a quand même quatre fautes d’orthographe. J’ai aussi fini la pochette d’un groupe américain en y mettant l’ancien nom, alors qu’ils venaient d’en changer. »
Pas vu, pas pris.
« J’ai fait une pochette pour une édition très limitée de Digital Leather. Vu que le label ne donnait plus signe de vie, j’ai commandé le disque sur le site du gars, apprenant au passage que lui-même ne l’avait jamais vu. Normal, il avait seulement été tiré à cent exemplaires. »