2017 M11 24
Il paraît que c’est Dabaaz de Triptik qui avait favorisé la formation de Bon Gamin (avec Myth Syzer et Loveni) lors d’un concert. C’est le cas ?
Pour tout dire, on faisait déjà nos trucs de notre côté depuis 2009 ou 2010, l’époque des soirées Can I Kick It ? en quelque sorte, mais c’est vrai qu’il est venu nous chercher et qu’il nous a permis de réaliser notre premier concert en tant que Bon Gamin.
Que ce soit avec Bon Gamin ou sur tes mixtapes en solo, on sent que l’esprit collectif est important chez toi…
Oui et non, c’est juste que ça fait partie de ma vie et que l’entraide, l’esprit collectif, ça motive à se lancer dans de nouveaux projets. D’ailleurs, avec Myth et Loveni, c’est ce qui nous pousse à ne pas nous enfermer dans un style. Musicalement, on a un état d’esprit libéral, on aime la musique. Le rap, c’est notre maison, c’est là que tout a commencé, mais on aime s’ouvrir à d’autres univers, notamment grâce aux rencontres que l’on a occasion de faire. Quand on était petits, on était obligés de choisir notre camp : le rap et le foot ou le skate et le rock. Nous, aujourd’hui, on fait le pont entre ces deux cultures. On est de la génération 90 après tout, on se fiche des étiquettes.
Est-ce que vous êtes réellement ce que vous prétendez être, de bons gamins ?
En tout cas, je travaille à essayer d’être bon. Alors, oui, bien sûr, ma dernière mixtape s’appelait « FDP », mais c’était une réaction à l’époque, une façon pour moi de violenter cette violence qu’on voit quotidiennement autour de nous sans forcément réagir. C’était peut-être paradoxal, peu clair, mais ce qui est sûr c’est que j’ai fini par comprendre que cette violence ne me servait pas. C’est pourquoi j’ai envisagé « Il suffit de le faire » comme une réponse à cette mixtape.
Loveni est présent sur l’un des morceaux. Quelle est la part d’implication de Myth Syzer sur ce projet ?
Comme sur la précédente mixtape, Myth a dû réaliser environ 45% des productions. 22 aussi est de nouveau présent, tout simplement parce que j’aime m’entourer de proches et de gens avec qui j’ai l’habitude de travailler. Mais je ne suis pas fermé pour autant : 2017, par exemple, a été produit par Mingo. Il m’a envoyé un message sur Insta, j’ai aimé ce qu’il a fait et on s’est lancés.
Sur 2017, justement, tu rappes : « On veut plus lâcher la balle, on va pas voter pour Fillon. Le pouvoir c’est la base, on veut pas rester des pions …«
(Il coupe) Depuis toujours, je place des morceaux politiques ça et là. Le premier de la mixtape, Tennessee, l’est également. Mais attention, je me fiche de la politique, je dis juste qu’on n’a pas à attendre quoi que ce soit de ces gens, que l’on n’a pas besoin qu’ils nous valident.
Comment fais-tu pour passer de projets très rap comme celui-ci à des titres carrément pop comme Le Code avec Myth Syzer ?
Ça se fait naturellement. J’ai envie de tout faire, de tester des choses, sans qu’un projet puisse dénoter au sein de ma discographie. D’ailleurs, si tu écoutes le premier morceau que j’ai balancé sur YouTube en 2008 ou 2009, je chante déjà. Je donne ma vie à ma musique, je n’ai donc pas envie de me limiter, de m’imposer une ligne directrice.
« J’ai simplement envie que les gens s’aiment. »
Tu as conscience de faire partie aujourd’hui de ces artistes qui popularisent le hip-hop, qui le rendent « pop », en quelque sorte ?
On me le dit de plus en plus, donc j’en prends conscience petit à petit. Mais ce n’est pas mon souhait de changer les choses, ce n’est pas mon rôle. Moi, j’ai simplement envie que les gens s’aiment.
J’ai lu que tu avais commencé l’écriture grâce à des lettres d’amour que tu envoyais aux filles en CE2. Ça vient de là, tu penses, le côté très romantique de tes morceaux ?
Ça vient de mon amour pour les femmes, pour la vie et pour les mots. Le romantisme, c’est quelque chose qui m’inspire énormément, c’est la poésie de la vie. Tu sais, je ne suis pas différent des autres : moi aussi j’ai commencé à écrire et à faire de la musique pour plaire aux filles. Ça marche très bien, ça te rend beau et intelligent, et c’est une excellente façon de se faire comprendre.
Aujourd’hui, tu arrives à vivre du rap ?
Disons que je me suis entouré de manière à ce que je puisse en vivre. Je fais de la promo, j’organise des tournées, etc. Je ne roule pas sur l’or, mais j’ai d’autres projets à côté qui permettent de satisfaire mes besoins : j’ai une marque de fringue, même si elle ne fonctionne pas actuellement, je patronne d’autres marques, j’ai des parts dans le restaurant de mes parents et je fais du mannequinat. D’où le titre de ma mixtape : « Il suffit de le faire », c’est une façon pour moi de dire à ma génération qu’il faut être débrouillard, que l’on n’a aucune limite et que l’on peut toucher à tout.
L’un des morceaux phares de cette mixtape, c’est Demain où tu dis : « Je n’ai pas envie de penser à demain. » C’est un leitmotiv de carrière ?
Je n’ai pas envie, mais j’y pense quand même, ahah ! C’est aussi pour ça que je dis « nique lundi » dans le titre, dans le sens où, bien que j’ai envie de m’amuser, je sais que je vais retourner au boulot… Heureusement, j’ai la chance de cumuler plaisir et travail en même temps. En espérant que mon premier album me rendra encore plus libre et heureux.
Un projet Bon Gamin est également prévu, non ?
Ce sera une mixtape ! On est justement en train de la préparer actuellement. On termine chacun nos projets solos et on balance ça ensuite.