Guizmo : l'interview vérité d’un MC authentique

  • Plus qu’un simple album de rap français, c’est une véritable autobiographie que propose Guizmo avec « Amicalement Vôtre », une plongée dans l’intime dont on ne ressort pas indemne. De franchise, il en également question dans cet entretien 100% honnête.

    Un de tes morceaux s’appelle Je n’ai plus peur de me souvenir. C’est cette absence de crainte qui t’a poussé à livrer un album aussi sincère et intime ?

    Ces souvenirs, ça faisait un moment que j’avais envie d’en parler, mais j’avais peur de savoir comment ça allait être interprété. Aujourd’hui, je m’en fiche : j’assume mon passé, je n’ai plus peur d’y repenser. C’est aussi pour ça que ce disque est 100% authentique, sans fiction.

    J’imagine que, grâce à ta musique, ta vie se porte mieux désormais, non ?

    C’est sûr ! Aujourd’hui, j’ai une belle femme, j’ai des enfants et je suis plus serein financièrement. C’est d’ailleurs pour ça que je parle quand même pas mal de choses anciennes sur « Amicalement Vôtre », qui est un peu comme une grosse gueule de bois : il est le résultat de ce qui a pu se passer hier, mais c’est aujourd’hui que je vomis tous ces excès.

    L’alcool est justement un thème très présent dans le disque. C’est un problème chez toi ?

    C’est un problème, oui, mais qui se règle super bien en ce moment. Mon gamin me motive à ça, à éviter de rester au lit jusque 16h et à glander le reste de la journée. D’ailleurs, quand j’ai eu mon premier enfant, j’avais déjà arrêté l’alcool fort. Pas forcément par rapport lui, mais parce que j’avais envie d’autre chose.

    « « Amicalement Vôtre », c’est presque le carnet de bord d’un dépressif. »

    Tu te disais que ça allait trop loin ?

    Tu sais, j’ai un passé difficile, douloureux même, et je suis un écorché vif. Il ne faut pas être un génie en psychologie pour comprendre qu’ajouter de l’alcool à tout ça ne fait pas forcément un bon cocktail… C’est sans doute pour ces raisons également qu’ « Amicalement Vôtre » est un disque si sombre. C’est presque le carnet de bord d’un dépressif. Cela dit, je le trouve plus réaliste que défaitiste, là où mes précédents disques étaient plus no future.

    Au niveau des influences, ça te va si on dit que tu es un mélange parfait entre 2Pac, Salif et Dany Dan ?

    Oui, c’est une superbe image ! Ce sont d’ailleurs des artistes que j’ai dégommés étant plus jeune, je m’inspirais d’eux. Notamment de 2Pac, qui m’a donné envie d’écrire et m’a appris qu’il fallait rentabiliser le temps en studio en écrivant vite et en se concentrant uniquement sur la musique. Escort Girl, par exemple, je l’ai écrit et enregistré en 2h grand maximum.

    Dans Noyé dans mes rêves, tu dis : « Dans mes rêves les plus fous, j’ai fait un feat avec Michael Jackson. » Il n’y a pas d’artistes hip-hop avec qui tu rêves de collaborer ?

    Michael m’a plus influencé que n’importe quel autre rappeur. Plus jeune, je dansais sur sa musique. Là, sur Pardon, je reprends même un gimmick de Dirty Diana. C’est une vraie influence, une vraie inspiration, et aucun autre artiste ne peut faire le poids face à lui.

    Sur l’album, il y a aussi ce fameux passage dans L’histoire d’un négro où tu insultes Joey Starr et Doc Gynéco. Les rencontres se sont mal passées ?

    Ces deux mecs sont des fils de pute. Joey Starr, la première fois que je l’ai rencontré, il était cocaïné avec une fille de 19 ans à son bras et parlait mal à tout le monde. Plus tard, il a même bousillé un Planète Rap d’une de mes artistes sur Skyrock. Ça m’a déçu… Pareil pour Doc Gynéco, qui a fait beaucoup d’argent avec le travail des autres. Je sais que j’emploie des mots forts, mais c’est parce que ces mecs ont bercé ma jeunesse et que je suis tombé de haut. La peine est toujours plus lourde quand tu apprécies quelqu’un… C’est comme si je te disais là que j’adorais ma femme et qu’une fois l’interview finie, je rentre chez moi et la trouve au lit avec un autre négro. La déception serait trop forte…

    « Je veux laisser une trace. »

    Aujourd’hui, en dépit de la qualité de ton album, on sent quand même que tu ne jouis plus du même enthousiasme populaire qu’à l’époque des Rap Contenders. C’est quelque chose qui te rend triste ?

    Je suis peut-être moins fort dans les bacs, mais je le suis davantage sur le web. C’est là qu’est la force des rappeurs de toute façon, là que je me suis fait reconnaître. Après, je me fiche d’être un rappeur à buzz, un de ces mecs qui fait un braquage avec un titre ou un album et disparaît ensuite. Moi, je veux simplement faire de la bonne musique, laisser une trace. En plus, 10 000 exemplaire en une semaine, c’est plutôt pas mal, non ?

    Dernièrement, tu passais dans Le Cercle, l’émission de Sofiane. Tu vois des parallèles entre ce concept et celui des Rap Contenders ?

    Les concepts sont très différents, mais l’idée est un peu la même : il faut montrer ce que tu vaux, montrer que t’as des couilles. Après, Le Cercle c’est encore plus dur : tu n’affrontes plus seulement le regard du public et des mecs derrière leur écran. Tu dois également gérer le regard des rappeurs à côté de toi. C’est un sacré défi !

    Toi-même, tu as ton propre label, Y&W. Tu penses que les rappeurs doivent créer leur propre structure pour pouvoir éviter l’accueil condescendant des grands médias français ?

    Tant que le rappeur n’aura pas compris qu’il est le centre de tout, il ne fera rien. Sans rappeur, un label, un DJ, un beatmaker ou même un média n’existe pas. Si tu veux, tu crées une chaine YouTube ou un compte Facebook et tu balances tes morceaux. A capella si tu n’es pas capable de composer. Mais là encore, ce n’est pas très compliqué : si tu aimes profondément la musique, ce n’est pas très mystérieux de faire un beat.

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