2017 M05 12
The Show. En 1995, le hip-hop est déjà divisé en deux : d’un côté, les puristes, ceux qui défendent corps et âmes les valeurs du rap originel ; de l’autre, les newcomers, ceux qui ne vibrent qu’aux sons clinquants et aux clips grandiloquents des MC de la West Coast (Dr. Dre, Snoop Dogg) ou de New York (Wu-Tang Clan, Biggie). La force de The Show, réalisé par Brian Robbins et narré par le patron de Def Jam, Russell Simmons, est donc de réconcilier les deux camps. Le tout agrémenté d’une bande son à faire pâlir n’importe quelle compilation centrée sur un supposé âge d’or du hip-hop.
Biggie & Tupac. Parce qu’il fallait bien un documentaire réunissant les deux plus grands ennemis de l’histoire du hip-hop. Parce que Nick Broomfield en évoque les assassinats tragiques, toujours non élucidés à ce jour. Parce que le réalisateur anglais a parfois mené son enquête sous les menaces de l’entourage des deux rappeurs : « Les seuls intervenants à m’avoir fait peur sont les gens du label Death Row… Ils étaient agressifs, violents, intimidants, si bien que je n’en menais pas large pendant mon entretien avec leur boss, Suge Knight« , confiait-il aux Inrocks en 2003. Et parce que Biggie & Tupac en dit parfois bien plus sur la cruauté du hip-hop dans les 90’s que n’importe quel texte de gangsta-rap.
The Art of 16 Bears. On est alors 2005 : le rap venu de l’est des États-Unis domine pour peu de temps encore le marché du rap mondial grâce à des MC de la trempe de 50 Cent, Kanye West ou Common. Trois cadors qui, aux côtés de Guru, KRS-One, RZA, Mobb Deep ou encore Nas, tentent ici d’expliquer leur amour du verbe. C’est d’ailleurs là tout l’intérêt de ce The Art of 16 Bars : s’intéresser à la puissance des mots dans le hip-hop, de l’écriture au freestyle, en passant par des sessions d’enregistrement forcément plus studieuses qu’on ne pourrait le penser.
Si tu roules avec la Mafia K’1 Fry. Sorti en 2004, ce documentaire vient confirmer l’impact (un an auparavant, l’album « La cerise sur le ghetto » a squatté 21 semaines dans le top 10 des ventes en France) et l’influence du collectif du 94 sur le rap français. Surtout, il déploie un portrait puissant et subtil, aussi beau dans ses moments forts que faibles, magnifiquement porté par les témoignages de rappeurs aujourd’hui plus que jamais installés dans le circuit : Rohff, 113, Intouchables, etc. Bref, le meilleur moyen de comprendre comment des voyous en trois-quart cuir ont réinventé le rap français avec une gouaille et une attitude directement héritées de la rue.
Un jour peut-être, une autre histoire du rap français. Ici, tout est dans l’intitulé : plutôt que de revenir une énième fois sur les débuts du rap en France ou sur ses grandes figures connues de tous (ce qu’avait très bien fait Alain Chabat en 2000 avec NTM Auhentique : un an avec le Suprême), le réalisateur Romain Quirot et les journalistes Antoine Jaunin et François Recordier s’intéressent ici à une scène plus transgressive, portée par des artistes aussi hybrides que TTC, Grems ou les Svinkels. L’occasion de donner la parole à ces rappeurs dits « alternatifs » mais aussi de comprendre comment La Caution et les autres ont réussi à s’imposer comme des poids lourds en prônant des goûts musicaux éclectiques et des postures éloignées de la street credibility des rappeurs 90’s.
The Game. De l’ambition, il en faut pour retracer trente ans d’histoire hip-hop aux États-Unis à travers différents évènements clés (l’émission Yo ! MTV Raps, l’arrivée de Napster, celle du Mp3, etc.) pour comprendre comment cette culture a fini par devenir un mode de vie à part entière ainsi qu’un commerce planétaire. De l’ambition, The Game, de la street à Wall Street, le dernier film d’Alex Jordanov, produit par Canal +, en a à coup sûr. De par de son sujet, mais également grâce à la qualité de ses intervenants : Ice-T, 50 Cent, Young Thug, Migos, Chuck D ou encore Van Jones, ex-conseiller de Barack Obama. L’occasion d’avoir un regard éclairé sur l’émergence du gangsta rap à la fin des années 1980 à Los Angeles et d’en savoir plus sur les activités annexes des MC, toujours prêts à diversifier leurs activités afin de gonfler leur compte en banque.