2017 M06 7
7 mai 1994 : son premier concert. Ce soir-là, NTM joue au Palais des Sports avec Ideal J en première partie. J’avais eu des places grâce à la maison de quartier, j’avais seize ans et c’était mon premier vrai concert. Une révélation : j’avais l’impression d’assister à la performance de véritables super-héros, de mecs très charismatiques et capables de manier les mots avec intelligence. Comme je commençais à rapper depuis quelques mois, ce concert a été une vraie claque : ce soir-là, j’ai pris conscience qu’il fallait que je m’investisse davantage dans le hip-hop. Je voulais vivre ce qu’ils vivaient, incarner ce qu’ils incarnaient… Autant te dire que lorsque Joey Starr a passé mon vinyle C’que les gens veulent entendre (Bête de bombe) dans son émission quelques années plus tard, ça été une mise en abîme de ouf.
5 juillet 2010 : obtention du DAEU. À cette époque j’avais 32 ans et j’obtenais enfin mon diplôme d’aptitude aux études universitaires (l’équivalent du bac). Ça été un accomplissement personnel de malade, quelque chose qui me semblait nécessaire vis-à-vis de mes enfants. Mon fils venait d’entrer en sixième, j’avais du mal à l’aider sur un devoir de mathématiques et j’avais honte de ça. Surtout, je redoutais le jour où il me dirait : « Papa, c’est bien beau de me dire de travailler à l’école, mais ils sont où tes diplômes ? » Bien sûr, ça n’a pas été facile. Il a fallu que je mette mon orgueil de côté, mais j’ai choisi de le faire pour mes enfants et pour ma mère. Elle a fondu en larmes en apprenant mes résultats. C’était touchant.
« Jouer à l’Olympia devant dix à quinze personnes »
23 mars 2011 : Olympia, acte 1. Ce soir-là, je jouais à l’Olympia dans le cadre d’une soirée organisée par le Gibus, à l’occasion d’un festival qu’ils avaient mis en place pour aider les jeunes groupes rock. À l’époque, je venais de sortir « Dans le ventre du crocodile » sous l’alias Disiz Peter Punk, et le Gibus m’avait proposé d’être la tête d’affiche du festival. Comme je n’avais jamais fait l’Olympia, j’ai accepté. Par fierté, j’en ai même profité pour inviter ma mère et une partie de mon entourage. Pas de bol pour moi la soirée a pris du retard, je ne suis pas arrivé sur scène avant une heure du matin et la salle s’était complètement vidée. Il ne devait rester que dix ou quinze personnes, alors que l’Olympia peut en contenir presque deux mille. On m’a dit que les gens étaient partis chercher le dernier métro, qu’il était tard, mais je l’ai pris pour moi. Mon album n’avait pas marché, l’orientation rock du disque avait dérouté et voilà que ma mère assistait à une telle scène… J’étais tellement triste en rentrant chez moi… J’avais vraiment l’impression d’être arrivé au bout.
23 avril 2013 : Olympia, acte 2. Là, on est deux ans après. Je viens de sortir « Lucide », un projet qui annonçait mon retour au rap et qui a cartonné. Par orgueil, je choisis de me produire en mon nom à l’Olympia et là, la salle affiche complet. Ça a été une soirée de ouf, qui m’a permis d’exorciser ce qu’il s’était passé en 2011. Ma mère était de nouveau là, me voyant dans un état de malade pendant une heure et quarante-cinq minutes. Je m’étais relevé de l’échec le plus cuisant de ma carrière.
« Collaborer avec des mecs comme Hamza et Stromae »
9 Juin 2017 : sortie de « Pacifique ». C’est une date capitale pour moi, encore plus que sur mes précédents albums. Pourquoi ? Parce que « Pacifique » est vraiment particulier dans ma carrière. Je n’ai jamais été aussi appliqué et impliqué dans la conception d’un disque et il m’a permis de collaborer avec des mecs comme Hamza ou Stromae. J’ai travaillé dessus pendant deux ans et je peux te dire que ça a été galère de faire comprendre aux gens avec qui je bosse où je voulais aller. On me disait que c’était une erreur, que ce n’était pas ma voie. Mais c’est mon onzième album et j’espère que les gens comprendront l’univers que j’ai voulu mettre en place. J’y ai mis tout ce que je connais, tout ce en quoi je crois.