2017 M07 22
Un homme heureux. Depuis son immense loft au nord de Montréal, où l’on trouve aussi bien des tas de CD empilés que des appareils de muscu, Sebastian Cowan est devenu le relais d’une génération DIY et hyper-créative. Son label, Arbutus Records, fait partie des structures qui comptent dans le paysage indie. La plupart des sorties ne s’écoulent certes qu’entre 1 000 et 2 000 exemplaires, mais toutes, de « Tender Opposites » de Tops à « Untogether » de Blue Hawaii, en passant par « Visions » et « Lesser Evils » de Grimes et Doldrums, ont fait du Montréalais un homme heureux.
Jeune et ambitieux. Comment pourrait-il en être autrement pour un mec qui, en débarquant en 2007 à Montréal après des études à Londres, ne s’imaginait pas une seconde investir dans l’industrie musicale ? Il n’a plus Grimes dans son catalogue (suite à une brouille dont il ne souhaite pas parler), et alors ? Claquettes-chaussettes aux pieds, il est toujours à la tête d’un des labels indépendants les plus excitants de Montréal.
« Je ne pouvais pas rester à écouter tous ces musiciens géniaux que je rencontrais sans les aider à publier leur musique. »
Au départ pourtant, c’était pas forcément gagné : « Quand Arbutus a été officiellement lancé en 2009, Montréal était en pleine crise économique, assure-t-il aujourd’hui. Il n’y avait pas de travail, pas de possibilité, sauf si tu sortais d’une grande université. Pareil dans l’industrie musicale : c’était post-Napster et pré-Spotify, il n’y avait plus vraiment d’argent. Lancer un label pouvait donc être risqué, mais je ne pouvais pas rester à écouter tous ces musiciens géniaux que je rencontrais sans les aider à publier leur musique. »
100% Montréal. Si ces « musiciens géniaux » viennent tous de Montréal, c’est pour une simple et bonne raison : « C’est là où je vis, là où sont mes amis. » Pour le dire autrement : Sebastian Cowan ne travaille qu’avec des proches, qu’importe les catégories musicales. « Si tu regardes bien, il n’y a pas vraiment de lien entre Sean Nicholas Savage et Braids, pareil entre Majical Cloudz et Pop Winds. Le seul point commun, c’est cet amour que l’on a tous pour les marges de la pop music. On aime quand l’approche est inhabituelle mais que la mélodie paraît tout de même assez évidente. »
Don’t believe the hype. Histoire de renforcer l’esprit communautaire d’Arbutus Records, Sebastian a également tenu à tout centraliser. Dans les locaux du label, on trouve ainsi un local de répétition et un studio d’enregistrement, « afin que tout ce que l’on réalise soit fait ensemble ». C’est malin, ça crée une belle émulation créative et, surtout, ça renforce l’indépendance du label. Un statut dont le Canadien s’accommode, faute de mieux : « Ça nous est arrivé de vendre jusqu’à 10 000 albums, mais ça nous faisait entrer dans un tout autre marché et une toute autre logique de promotion. On n’a pas l’équipe nécessaire pour gérer de telles ventes », dit-il sans amertume. Et de conclure : « De toute façon, il faut bien des structures comme la nôtre pour soutenir une scène locale pleine d’idées. » Imparable !