2018 M01 15
Un clip bricolé. À priori, si l’on vous dit marteau, perceuse et dimanche au rayon bricolage, vous avez envie de fuir. Et si en plus il est question de marketing avec un morceau lunaire diffusé à 20h30 après le journal télévisé, à moins que vous n’ayez 65 ans, vous êtes déjà parti(e).
L’agence de pub indépendante Steve est, grosso modo, arrivée au même constat que vous. Chargés d’imaginer la nouvelle campagne du produit phare de la marque Sader (Fixer Sans Percer, une colle pour tout accrocher sans bousiller les murs), ses créatifs en viennent à l’automne dernier à une idée tirée par les cheveux : écrire un morceau de rap old school où un papa, casquette vissée de travers, improvise un freestyle les bras croisés avec des pépites comme : « Tu vois cette grosse étagère ? Je la fixe ! » En boucle. On a tous envie de rire, sauf que ça adhère à fond : presque un million de vues pour Fix Squad.
Le rap des familles. Derrière ce cas d’école contredisant la théorie selon laquelle il serait impossible de créer un buzz viral (qui plus est pour une marque de colle), un double coup de génie : faire dans le troisième degré et associer un produit franchement pas sexy au genre musical le plus écouté de ces dernières années.
C’est certes plus du Benny B que du Damso, mais le Fix Squad de l’agence Steve réussit avec humour à contourner le piège de la récupération en partant du principe qu’il était possible de parler à tout le monde sans prendre les consommateurs pour des abrutis. « L’enjeu n’était pas de raconter des scènes de fixations improbables, mais de remettre le produit dans le quotidien des gens, explique Guillaume Lartigue, directeur de la création de Steve. Le rap nous a semblé être le meilleur moyen d’ancrer la marque dans la culture populaire et dans le cœur des gens. » Contre toute attente, pari gagné.
+40% en magasin. Trois mois après sa sortie, le clip culmine à 907 000 vues sur YouTube. Sans dire que tous les fans de Roméo Elvis et Lomepal ont troqué leurs smartphones contre un tube de colle, les chiffres sont là : une hausse de 3 points de la notoriété spontanée pour Fixer Sans Percer, +40% de rotation en magasin d’octobre à décembre et 82% trouvent que la campagne donne une image moderne du produit. C’est vrai qu’avec des punchlines comme : « Je colle avec mon crew et c’est facile j’avoue », difficile de résister…
Bref, peut-être la preuve ultime que le rap s’est peu à peu imposé partout en prime time, et ça, sans jeu de mot, c’est plutôt scotchant.