2017 M03 15
Théocrite disait qu’en persévérant, on arrive à tout. Le quatuor néerlandais Kensington ne pouvait pas mieux illustrer une telle pensée tellement ses efforts ont su être récompensés. Mais pour une raison qui nous échappe, le groupe né dans la belle citadelle d’Utrecht au cours des années 2000 n’a jamais vu son avatar placardé sur les colonnes Morris du Vieux Continent. Comment un groupe inconnu du grand public occidental peut-il afficher complet dans l’insouciance générale ? Petit retour en arrière.
Des héros très discrets. Nous sommes en 2008. La scène indie-rock reste sans porte-parole notoire. TV On The Radio, We Are Scientists et les Kills opèrent leur grand retour, mais, cette année-là, le raz de marée enregistré par tous les esprits répond au doux prénom de Foals, un petit groupe de math-rock-pop qui semble promis à un grand avenir. Les grands leaders des précédentes promotions, eux, figurent sur la liste des absents : les Arctic Monkeys et Bloc Party sont en tournée et/ou en fin de promotion, tandis que les Yeah Yeah Yeahs ne sonneront les platines qu’un an plus tard. Puis, jusqu’à aujourd’hui, les vagues se sont enchaînées : la nu-rave a englouti toutes ses pilules de LSD, Phoenix a finalement conquis les ondes américaines, Arcade Fire a continué d’organiser de grandes parades remplies d’amour et le bébé Foals est devenu grand. Pendant ce temps-là, Kensington a accouché de quatre albums (« Borders », « Vultures », « Rivals », « Control »), tourné en Asie et en Europe germanophone dans un joli van et accroché tous les six mois sur son mur des récompenses plus éloquentes les unes que les autres (3FM Awards à tire-larigot, Edison Awards, MTV Europe Music Awards…). Ce que l’on assimilait auparavant à un monument historique britannique est pourtant en train de devenir le futur chef de fil du rock européen moderne.
« Meilleur groupe des Pays-Bas ». Kensington, c’est un groupe qui touche à tout – même aux reprises les plus mainstream que la Terre ait portées comme Rihanna ou Hozier – sans jamais tomber de façon grossière sur l’écueil de la facilité. On ne prépare jamais la même recette, mais on use toujours des mêmes ingrédients : des rythmiques dance d’une puissance ahurissante, des groove saccadés, des guitares grandiloquentes et des voix piochées directement à la source de l’espérance céleste. Celui que l’on appelle “le meilleur groupe des Pays-Bas” s’apprête à pénétrer l’ouïe du monde entier. Et à voir ses shows dantesques sur YouTube, nul doute que la formation alt-indie dynamitera les ondes de nos belles contrées. Il ne faudra pourtant pas s’étonner, le groupe patiente, expérimente, besogne depuis dix ans. Retenez bien le nom de Kensington. Il va devenir le meilleur groupe de rock du monde. Si ce n’est pas déjà le cas.