En 2023, Warp Records pourrait bien redevenir le plus grand label d'Angleterre

Aphex Twin ? De retour sur scène. Kelela et Yves Tumor ? Probablement auteurs des deux meilleurs albums à venir d'ici la fin de l'hiver. Warp Records ? Fier d'avoir retrouvé un certain sex appeal, le label anglais est prêt à faire hurler 2023 de plaisir.
  • À 35 ans, la tentation est grande d'accueillir la nostalgie, d'évoluer dans un environnement où chaque photo renvoie illico au passé. À 35 ans, Warp Records refuse toutefois de se transformer en musée poussiéreux, en une structure sclérosée et trop paresseuse pour renouer avec l'énergie et la fougue de ses jeunes années.

    En 2022, déjà, le label anglais frappait fort avec les publications successives de « MK 3.5: City Planning / Die Cuts » de Mount Kimbie et « Loggerhead » de Wu-Lu, deux albums remplis de jolies trouvailles, malheureusement tenus à l'écart du grand public mais porteurs d'une liberté artistique dont la seule limite tient à l’imagination de leurs auteurs.

    Cette année, Warp a bien l'intention de poursuivre sur sa belle lancée. Mieux, il compte accélérer le rythme avec deux albums capables à seuls d'ouvrir une voie parallèle à ce que l'on nomme faute de mieux la pop music. Le 10 février, c'est à Kelela de lancer officiellement l'année avec « Raven », un disque qui envoie en première ligne un R&B futuriste que personne n’aurait pu voir venir. D'une, parce qu'il a fallu attendre sept ans pour entendre le successeur de « Take Me Apart », produit par Arca, salué par Solange et Björk. Et puis parce qu'il est si rare d'entendre un tel album, audacieux, alternatif, qui vient s'abreuver de 2-step, de UK Garage, de soul brumeuse et d'électro comateuse le temps d’une dizaine de morceaux qui, c’est indéniable, contiennent d’ores et déjà les meilleures mélodies de 2023.

    Un peu plus d’un mois plus tard, le 17 mars, soit quelques semaines avant son concert à Coachella, Yves Tumor poursuivra lui aussi la même ambition, le futur en tête. Pour cela, l’Américain a réuni une fine équipe d’architectes du son : Noah Goldstein (producteur de Frank Ocean, Rosalía, Drake, Rihanna, Bon Iver), Alan Moulder (au mixage des albums de My Bloody Valentine ou Nine Inch Nails) et Chris Greatti (collaborateur de Yungblud, WILLOW), tous sont réunis sur ce nouvel album (« Praise A Lord Who Chews But Which Does Not Consume ; (Or Simply, Hot Between Worlds) », au titre aussi long que la vie qu’on lui prédit.

    « God Is A Cercle », dit le premier single d'Yves Tumor. À l'inverse, le répertoire de Warp ressemblerait plutôt à une figure géométrique abstraite, où toutes les générations et tous les styles se croisent sans jamais se faire de l'ombre. En parallèle à ces deux sorties, le label de Sheffield se permet de convoquer ses héros personnels pour mieux anticiper l'avenir, entretenir le mythe : ainsi, après quatre années d'absence scénique, Aphex Twin a dernièrement annoncé qu'il jouerait au festival Field Day à Londres, le 19 août prochain. Un évènement, forcément, renforcé par la présence de Kelela au sein de la programmation. À croire que chez Warp, plus qu’ailleurs, anciennes et nouvelles gloires avancent ensemble, dans un même élan créatif.

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