Coup de vieux chez les jeunes : "Favourite Worst Nightmare" des Arctic Monkeys a 15 ans

Après un premier album qui avait tout cassé en 2006, les Arctic Monkeys ont cherché à sortir du rock adolescent surdoué. Ce qui donnera en 2007 un « Favourite Worst Nightmare » essentiel dans leur évolution. Petit retour en arrière sur un album qui a fait du bruit, et qui a propulsé le groupe dans une nouvelle dimension : celle des rockstars anglaises.
  • Les Arctic Monkeys sont sûrement les derniers jeunes rockers à avoir à ce point là tout cassé. La folie. Les concerts sold-out. Les unes de magazines. Les tournées dans le monde entier. Et c’était il y a déjà plus de quinze ans. Depuis, le groupe a confirmé ce statut de véritables rockstars avec une carrière exemplaire. Pour cela, il a fallu passer le fameux « cap du toujours difficile deuxième album ». D’autant plus dur après un coup d’essai aussi gigantesque. Et s’il n’est pas autant resté dans les mémoires, « Favourite Worst Nightmare », sorti le 23 avril 2007, a largement permis de relever le défi. Et reste pour de nombreux fans un disque de chevet porté par des chansons devenues des tubes sur la planète rock.

    Il y avait pourtant de quoi avoir peur. Bien qu’issu de la génération MySpace, le groupe de Sheffield arrivait dans une époque où la presse musicale était encore puissante. Et surtout en quête perpétuelle de nouveautés. Chaque groupe était porté aux nues, mis sous une pression énorme avant de craquer dès le deuxième disque. Les singes arctiques semblaient suivre le même chemin. Épuisé, le bassiste Andy Nicholson avait quitté le navire, remplacé par un Nick O’Malley toujours en poste. Et ce deuxième disque arrivait à peine plus d’un an après le triomphe de « Whatever People Think I Am, I Am Not ». À l'image d'Oasis, qui avait sorti ses deux premiers albums à une année d'intervalle, les nouveaux princes du rock pouvaient-ils suivre les pas de leurs ainés ? Spoiler : ils ont réussi. 

    Certes, on peut reprocher au disque de vouloir sonner plus vite, plus fort, et donc plus lourd. Quitte à perdre en spontanéité. Mais est-ce vraiment un reproche ? Le groupe a su rester concentré, et a conservé son incroyable précision, tant dans les riffs que les textes d’Alex Turner. Ce dernier confirme également son talent d’interprète, notamment avec Do Me a Favour (une rupture lors d'un trajet en voiture) mais aussi dans la ballade Only Ones Who Know (encore une histoire de couple) et le sublime 505 (écrite alors qu'il allait voir sa copine dans la chambre 505 d'un hôtel), qui possède au passage un sample d'Ennio Morricone. 38 minutes intenses où le groupe parvient à affirmer un style, à générer des tubes comme s'il en pleuvait, à faire danser, à faire rêver, à faire pleurer. Le résultat final est célébré unanimement par la presse. Du coup : double disque de platine, rien qu'en Grande-Bretagne. Et partout où ils vont, les petits gars de Sheffield sont reçus comme les dignes héritiers des Beatles, d'Oasis ou des Libertines. En gros, ce sont à eux de porter le rock anglais à travers la terre. En bonus, ils fédèrent une génération, utilisant leurs histoires personnelles pour mieux ancrer le groupe dans le présent.

    Plus largement, le disque est frappant par sa production. Alors que le post-punk se fait aujourd’hui volontiers froid et dur, le groupe misait sur un côté très "pop". Certes, cela leur permet également de jouer sur un registre volontiers ironique. Mais « Favourite Worst Nightmare » est avant tout un disque incroyablement... solide. La récompense ? Le nom du groupe est affiché en gros sur l'affiche du festival Glastonbury de 2007, aux côtés de Kasabian, des Who, d'Arcade Fire ou encore des Killers.

    Les Arctic Monkeys ont ainsi pu sortir de la case « phénomène ». Pour ensuite pouvoir évoluer et devenir des tauliers en l'espace de trois ans. C’est ce qu’analysait dès 2011 Alex Turner, reconnaissant à demi-mot l’aspect mineur du disque : « Je suis très content qu’on ait fait ce disque. Sans lui, je serais encore à essayer d’écrire ‘Hallelujah’. Après ça, on a tous senti qu’on devait avancer ». Ce qu’ils ont fait avec des albums plus ou moins bons, mais toujours passionnants et, mine de rien, fédérateurs. En attendant le septième, « AM7 » (à venir à priori dans l’année) et leur passage à Rock En Seine. Mais on sait désormais que le groupe sait parfaitement gérer la pression.

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