2018 M02 23
Good Kid — 2012
L’un des tout meilleurs titres du premier album de Kendrick, Good Kid, est bourré de messages cachés. L’un d’eux se trouve dans cette phrase : « What am I supposed to do when the topic is red or blue ? » Le rappeur fait en fait référence aux Crips et aux Bloods, les deux gangs majeurs de Los Angeles, qui alternent entre trêves et guerres ouvertes depuis le début des années 1970. Le rouge est la couleur des Bloods, le bleu celle des Crips. Le « good kid », le « bon garçon », qui grandit dans cet environnement violent, est le leitmotiv de l’album « Good Kid M.A.A.D. City ».
Poetic Justice feat Drake — 2012
Poetic Justice est clairement l’un des textes les plus complexes de Kendrick Lamar. Le début du morceau commence avec l’éloge de l’amour physique, explicite, mais plus on avance dans les paroles, plus cet éloge est flou. En fait, Kendrick se laisse ici aller à une réflexion qui le mène de l’amour à la remise en question de son art, de sa musique, de son rap… « Every time I write these words they become a taboo. » Longtemps, ce sens caché n’a pas mobilisé l’intérêt des fans, en raison de la qualité extrême du couplet de Drake, qui a un peu occulté les pérégrinations de Kendrick.
King Kunta — 2015
Les auditeurs assidus de rap ont très certainement déjà décelé des clins d’œil à Kunta Kinte chez le Ministère A.M.E.R., Big Sean, Busta Rhymes, Sefyu, Missy Elliott, IAM… Il s’agit en fait du personnage d’un livre. Kunta Kinte est un esclave vivant en 1767 dans l’ouvrage de l’écrivain Alex Haley : Roots. Le livre raconte sa vie, puis celle de ses descendants, et traite, au-delà de l’aspect romanesque, de la lutte contre le déterminisme social et de la condition des Noirs dans l’histoire des États-Unis. Devenu un symbole d’émancipation, Kunta Kinte a été très largement cité en référence dans le rap au fil des ans. King Kunta de Lamar reste très certainement, entre les lignes, l’exemple le plus virulent.
YAH. — 2017
Le rapport entre Kendrick Lamar et la religion fait l’objet de très nombreuses analyses de fans. Même s’il revendique n’être que « très peu concerné par Dieu », il a tout de même écrit plusieurs morceaux y faisant référence, comme YAH.. Le titre de la chanson, d’abord, est un hommage à Yahveh, le dieu des enfants d’Israël. Dès le premier couplet, il parle de ses doutes (« I got so many theories and suspicions »), de sa condition de jeune Noir originaire de Compton (« I’m diagnosed with real nigga condition »), ce qui le pousse à pécher (« Keep the family close, get money, fuck bitches »). Dans le refrain, il dit : « Buzzin, radar is buzzin… Yah yah, yah yah », comme si ce radar s’allumait à l’évocation de ces péchés (« Buzzin… »), et comme s’il appelait Dieu pour l’en extirper.
XXX. — 2017
Dans le premier couplet de XXX., autre morceau tiré de « DAMN. », Kendrick reçoit l’appel d’un ami qui lui annonce le décès de son fils. Le rappeur est censé prier pour lui et lui remonter le moral, mais sa réponse est la suivante: « Si quelqu’un tuait mon fils cela voudrait dire que quelqu’un devrait mourir. » Dans cet album, porté par des titres comme HUMBLE. ou LOYALTY., cela contraste fortement avec les thèmes de paix, d’humilité et d’appels à la raison qui rythment la tracklist. Il conclut en disant : « Il n’y a pas de black power quand ton enfant est tué par un lâche. » C’est le moment où Kendrick laisse parler la part instinctive de son combat et de sa personne.