2017 M06 23
Cette année, Calvi On The Rocks fête ses 15 ans. Est-ce que tu peux me parler de son évolution ?
Disons que c’est passé d’un festival de potes à un événement professionnel. Même si on a gardé notre ADN détente et vacances, il faut quand même avouer qu’on accueille plus d’artistes et plus de spectateurs qu’auparavant. Pour tout dire, on est passé de 150 festivaliers pour la première édition en 2003 à près de 15 000 sur cinq jours aujourd’hui. Mais bon, le plus important dans tout ça, c’est qu’on a réussi à conserver notre côté défricheur et éclectique, tout en parvenant à se diversifier et à s’internationaliser. Depuis que Kate Moss est venue au festival, la presse étrangère nous suit et ça encourage des Australiens, des Mexicains ou des Japonais à venir chaque année en Corse.
Vu l’ampleur de l’évènement, comment s’effectue la programmation ? Tu t’en occupes seul ?
J’en discute beaucoup avec Jean-Marie Tassy, un des fondateurs de Calvi On The Rocks, mais tout est pensé en fonction des différentes plages du festival. En fonction des jours également. Par exemple, je ne vais pas programmer le même type d’artistes le quatrième jour que le premier. J’aime commencer par des découvertes, comme The Blaze ou Romare, avant de programmer peu à peu des têtes d’affiches comme Nina Kraviz. Je me dis qu’au bout d’un certain temps, les festivaliers ont besoin d’entendre des artistes qu’ils connaissent.
J’imagine aussi qu’il y a des styles réservés au jour et d’autres à la nuit ?
C’est ça : avec le temps, on s’est rendu compte que la techno ne fonctionnait pas en pleine journée. Même pour nous, ce n’est pas intéressant : comme les plages sont accès en libre jusque 20h30, on ne peut pas se permettre de programmer des sets trop dynamiques avant, sans quoi les spectateurs risquent d’être épuisés avant le début de la soirée. Ce que l’on aime faire également, c’est demander à un DJ de jouer un set de quatre heures, ce qui lui permet de monter peu à peu en intensité. Par exemple, des mecs comme Jeremy Underground ou Lil’ Louis ont l’habitude de jouer en club entre trois et cinq heures du matin. Là, ils peuvent s’éclater en jouant des titres plus groovy, moins tapageurs.
Le secteur des festivals est de plus en plus concurrentiel. C’est compliqué d’avoir des groupes qu’on ne retrouve pas ailleurs ?
C’est sûr qu’avant c’était plus facile d’avoir des exclus. D’autant qu’on avait trouvé une astuce : auprès des tourneurs américains, on disait que l’on était un festival corse, ce qui nous permettait de ne pas passer par des agences françaises et donc d’avoir des dates uniques. Aujourd’hui, ça a un peu changé, mais on continue de miser sur les découvertes. Parcels, par exemple, on les a eus avant qu’ils ne collaborent avec Daft Punk et qu’ils ne commencent à faire de grosses scènes.
Il y a des groupes que tu aurais aimé programmer cette année ?
On a failli avoir LCD Soundsystem, mais ça ne s’est pas fait à cause du budget. Pareil pour Phoenix, un groupe avec qui on a un lien spécial, et Anderson .Paak. Avec lui, ça aurait pu se faire il y a deux ans, mais les plannings ne collaient pas. Aujourd’hui, ça aurait pu convenir, mais son prix a été multiplié par dix… C’est la principale difficulté pour un festival comme le nôtre : gérer les budgets et ne pas programmer des groupes qui se déplacent avec deux semi-remorques et une équipe de vingt personnes à leurs côtés. On n’a pas les moyens pour ça.
À l’inverse, quels groupes as-tu hâte de voir cette année ?
Généralement, je vois tous les groupes programmés à Calvi, mais cette année, il y a deux ou trois artistes que je n’ai pas eu l’occasion de découvrir sur scène, soit par manque de temps, soit parce qu’ils n’avaient pas encore fait de concert. C’est le cas de The Blaze, par exemple, dont la scénographie me paraît atypique. Sinon, il y a aussi, 10LEC6, la dernière signature Ed Banger, ou tous ces groupes, comme Red Axes, que j’ai hâte de redécouvrir sur scène, pour voir comment ça a évolué depuis. Il y a pas mal d’habitués à Calvi On The Rocks, c’est toujours sympa de se retrouver.