Arctic Monkeys est-il le dernier grand groupe d'indie-rock des années 2000 ?

Alors que les Anglais sortiront leur septième album le 21 octobre prochain, « The Car », il est temps de poser une question qui fâche : Alex Turner et sa bande sont-ils les derniers rockeurs du début du 21è siècle à jouir d'une véritable aura populaire ?
  • Quand il sort en janvier 2006, le premier album d'Arctic Monkeys est précédé d'une solide réputation, tapageuse, présentant « Whatever People Say I Am, That's What I'm Not » comme le renouveau du rock anglais. Une mauvaise habitude. Une expression bien trop souvent utilisée par la presse, spécialisée ou non, mais qui en dit autant sur le potentiel des Anglais que sur l’effervescence de la scène rock britannique de l'époque. The Kills, Franz Ferdinand, Bloc Party, Klaxons, Metronomy : le pays est alors en état de grâce. Même constat aux États-Unis où, des Strokes à The Killers, de LCD Soundsystem à MGMT, une nouvelle génération a conquis le public.

    Pourtant, à l’exception de la bande à Julian Casablancas, quoique trop indisciplinée pour assurer un état de forme constant, aucune de ces formations ne peut se targuer aujourd’hui de remplir n’importe quel stade à travers le monde, voire de permettre à un festival de faire sold-out simplement grâce à sa présence. Cet exploit, Alex Turner et ses comparses peuvent le revendiquer (la dernière édition de Rock en Seine en atteste) et ils semblent bien être les seuls.

    Disons les termes très simplement : Muse et Radiohead ? Sans leur faire injure, ou négliger ce qu’ils ont publié ces vingt dernières années, une partie de leur discographie appartient à la décennie 1990. The Libertines ? Le groupe surfe davantage sur une nostalgie que sur un vent de fraicheur à même d’espérer d'eux de nouveaux tubes fédérateurs. Arcade Fire ? Dans la mouise suite aux récentes accusations d’agressions sexuelles de Win Butler. Tame Impala ? Les Australiens ont réellement vu leur statut changer au cours des années 2010. Coldplay ? Le virage pop pris par Chris Martin et ses sbires empêche de les inscrire dans une dynastie « rock », aussi réductrice soit cette étiquette.

    Dès lors, il faut bien se rendre à l’évidence : Arctic Monkeys jouit à l’heure actuelle d’une réputation et d’une aura aptes à donner des insomnies à bien d’autres formations apparues au début du 21ème siècle. Le fait que ces ex-adolescents fluorescents semblent incapables de stagner, de spéculer sur un son ou un savoir-faire ne fait qu’accentuer la puissance et l’importance de leur musique.

    Au sein d'une époque abandonnée au hip-hop et aux nouvelles technologies, il y a presque quelque chose d'anachronique à voir les foules s'exciter au sujet de ces quatre compères, seuls rescapés d'une période fertile dont ils ont su s'extraire à merveille via des albums plus orchestrés, moins immédiats. C’est même sans doute là le tour de force réalisé par les Anglais : ne pas s’être enfermés dans une catégorie trop figée, avoir su développer une musique qu’il faut désormais prendre le temps de disséquer, assimiler, et toucher aujourd’hui les dividendes d’une vingtaine d’années d’exigences mélodiques.

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