Il y a 50 ans sortait "Sticky Fingers", le sommet des Stones

Considéré par beaucoup comme leur meilleur disque, l’album à la fermeture éclair, porté par les tubes « Brown Sugar » et « Wild Horses », a été l’un des plus gros succès du groupe. Voici l'histoire de ces "doigts collants".
  • La fin des sixties a été dur pour les Stones. En plus de problèmes avec le fisc pour non paiement de taxes (ils partiront pour la France dès l’été 71 pour fuir le fisc britannique) et la fin du deal avec Decca (ils lancent par la suite leur propre label Rolling Stones Records), la mort de Brian Jones le 3 juillet 69 à l’âge de 27 ans a chamboulé l’enregistrement de « Let It Bleed » qui sort la même année. Le blondinet est alors remplacé par Mick Taylor. 

    Le groupe aurait pu se séparer, dire ciao à tout le monde, et laisser derrière lui une poignée d’albums de haut-vol (« Beggars Banquet » est le véritable chef-d’œuvre des Stones, on le sait tous). Mais en 1970, ils partent sur la route en Europe (histoire de renflouer un peu les caisses). Ils profitent aussi du passage à la nouvelle décennie pour demander à un étudiant du Royal College of Art de Londres, John Pasche, de créer les affiches pour cette tournée. Fun Fact : John sera aussi le créateur du fameux logo avec la langue, qui apparaît pour la première fois sur l’album « Sticky Fingers ». Eh oui, les Stones ne veulent plus être un groupe : ils veulent devenir une marque et prendre leur rôle de « plus grand groupe rock de la planète » au sérieux pour devenir, par la même occasion, des businessmen. Preuve ultime : il existe des skis Rolling Stones avec le fameux logo.

    Le disque, dont certaines chansons ont été enregistrées en 1969, sort le 23 avril 1971. Un peu avant la sortie de l’album, les Stones lâchent Brown Sugar. Le premier single de l’album, avec un riff devenu culte inventé par Jagger (et non Keith), et des paroles sur une esclave noire objet sexuel d’hommes blancs, passe crème en 1971 (aujourd’hui, certaines voix s’élèvent pour dénoncer ce texte). Ce titre, comme You Gotta MoveWild Horses et Sister Morphine, est issu d’une session studio de décembre 1969 en Alabama. Le reste se fait entre le Hampshire où Mick possède une baraque et Londres, aux Olympic Studios. Mick Taylor, 21 ans, a un peu de mal avec son nouveau statut, mais ses qualités de guitariste permettent aux Stones de pousser plus loin et d’expérimenter dans des directions encore sombres pour eux (Mick déclarera plus tard qu’avec lui, les Stones avaient la meilleure formation possible, sympa pour Ronnie Wood). La fluidité du jeu sur Sway, I Got The Blues ou encore Can’t You Hear me Knocking en sont des preuves irréfutables, tout comme le riff de Bitch.

    Le disque est excellent, rien à dire. Un 10 sur 10. Si la pochette est attribuée à Andy Warhol, il s’agit en réalité d’une collaboration entre le pape du Pop Art et Craig Braun, connu pour son travail sur la cover du premier Velvet Underground par exemple (avec la banane). Pour ceux qui le souhaitent, l’histoire de la pochette est racontée ici sur Vanity Fair. On y apprend par exemple que l'homme en slip sur la cover s'apelle Corey Tippin. Dans cet article du New York Times, Craig Braun explique que la fermeture éclair abîmait aussi le vinyle, notamment la troisième piste de la face B, là où se trouve le titre Sister Morphine

    Bref, les fans peuvent zipper et dézipper la fermeture, les chansons sont incroyables et les Stones s’envolent pour la France (plus précisément dans une villa à Villefranche-sur-Mer), échappent au fisc puis se mettent à enregistrer ce qui deviendra « Exile on Main Street ». On a connu pire comme exil fiscal.