C'est confirmé : le rap français n'a jamais autant cartonné à l'étranger

Selon les chiffres présentés la semaine dernière par le CNM (Centre national de la musique), le rap français passe pour la première fois devant l'electro et devient le genre musical qui s'exporte le mieux à l'international. Pour le rock/metal et les artistes féminines en revanche, il n'y a pas de quoi pavoiser.
  • On savait déjà que le rap français écrasait la concurrence dans le classement des artistes les plus écoutés dans le pays. Ce n'est pas franchement une nouveauté, et l'omniprésence du genre a même amené à la création d'une cérémonie dédiée de remise de prix, Les Flammes, dont la première édition a eu lieu jeudi dernier.

    Mais si certaines mauvaises langues doutaient encore de la capacité du rap français à rencontrer le succès à l'étranger, elles risquent fort de devoir ravaler leur venin. Car l'an dernier, notre rap hexagonal est devenu le genre musical le plus exporté (38%, +5 par rapport à 2022), devant l'electro que l'on pensait indétrônable, et qui est relégué à plus dix points (27%). Ça n'a l'air de rien, mais il s'agit d'une première historique.

    Cette domination est rendue possible par les succès de Ninho, Orelsan, Niska, Damso ou encore Gazo, qui multiplient les millions d'écoutes et les certifications (or, platine ou diamant) qui vont avec à l'étranger.

    Et la bonne nouvelle, c'est que ce succès du rap français s'accompagne d'une augmentation des chansons en langue française dans les morceaux certifiés : 68% en 2022, contre 54% en 2021. De quoi faire dire au CNM que "la langue française n'est pas une barrière à l'export".

    Les couleurs de la francophonie sont également portées à ce sommet grâce aux succès de Stromae, d'Angèle et d'Aya Nakamura. Signal beaucoup moins positif : ces deux dernières sont les seules femmes à être certifiées à l'étranger avec Nej, ce qui représente moins de 8% du total, contre 84% pour les hommes et 8% d'artistes mixtes.

    Comme le dit très pudiquement le CNM, "l’export français reste encore en dessous des attentes en termes de parité femmes-hommes", mais il ne s'agit là que d'une confirmation de l'invisibilisation des femmes dans la musique en France. Quant aux grosses tournées internationales d'Angèle et d'Aya Nakamura, elles ne suffisent malheureusement pas à cacher la forêt.

    Mais si ce pourcentage est faible, il ne l'est pas autant que la part du rock et du metal dans les chiffres de l'export, qui "représentent respectivement 3 et 2%", et ne sont donc même pas présents sur le graphique du CNM. Outre le recul de l'electro, on note que le R&B/soul (13%) talonne la variété/pop (17%), qui gagne toutefois 3 points par rapport à l'an dernier.

    Le CNM remarque enfin que ces succès sont portés par "l'essor du format vidéo" – comprendre TikTok –, qui bouleverse la diffusion et la découverte des artistes dans le monde entier, ce qui permet par exemple au… Me gustas tú de Manu Chao de cartonner à l'international, plus de vingt ans après sa sortie.

    Néanmoins, tout n'est pas rose pour la production française : le CNM rappelle que la part de celle-ci dans les revenus mondiaux de la musique est passée de 6% en 2011 à 4,4% aujourd'hui, dans un contexte de concurrence internationale accrue. De quoi relancer le débat sur un soutien étatique à une "F-pop" pour concurrencer la "K-pop", comme le recommandait un rapport sénatorial récent ?

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