Selon une étude, les femmes sont toujours aussi invisibilisées dans la musique

Dans son "état des lieux de la présence des femmes dans la filière musicale", présenté la semaine dernière dans le cadre de ses "Assises de l'égalité femmes-hommes dans la musique", le CNM (Centre national de la musique) brosse un portrait peu reluisant des progrès énormes qui restent à accomplir sur ce sujet en France.
  • Ce n'est pas vraiment une surprise, mais plutôt une confirmation brutale par les chiffres d'une situation que chacun peut observer au quotidien depuis toujours. Ce constat est le suivant : pour être visible dans la musique, mieux vaut être un homme.

    Ces derniers sont en effet très majoritaires dans l'ensemble du secteur, à une exception près : 54% des emplois permanents dans l'industrie musicale sont tenus par des femmes.

    Une maigre consolation face aux chiffres qui vont suivre, qui vont tous dans le même sens et font l'effet d'une déferlante. Commençons par les concerts où en 2019, seulement 17% des artistes se produisant sur une scène étaient des leads féminins, contre 62% pour les hommes et 21% pour les leads mixtes.

    Et plus la taille des salles augmente, moins les femmes sont représentées : leur total atteint seulement 11% au-delà de 6000 places. Et dans les festivals de musiques dites actuelles, c'est encore pire que dans les concerts, puisque le pourcentage de leads féminins y tombe à 14%.

    Dans le détail, le CNM est aussi en mesure de déterminer quels sont les genres les plus inégalitaires au niveau des concerts, et comme on pouvait s'y attendre, le rap (10%), l'électro (11%) et le rock (14%) ferment la marche, alors que la chanson réalise la performance la moins médiocre avec 28% de leads féminins.

    Ce classement se retrouve peu ou prou dans la musique enregistrée et commercialisée : 5% de leads féminins dans le rap, 4% dans le reggae et 12% dans le rock/métal, contre 32% dans la catégorie variété/pop. Le pourcentage total – 28% de morceaux chantés par des artistes à tonalité féminine – est un peu meilleur grâce évidemment à la musique classique.

    Du côté de la diffusion, le CNM note que 29% des titres les plus diffusés à la radio et à la télévision sont portés par des voix féminines, contre 59% pour les hommes. Mais l'écart se creuse encore quand on s'intéresse aux plateformes de streaming – où le rap domine – et où seulement 14% des morceaux les plus écoutés possèdent un lead féminin. Ce n'est pas mieux pour les albums les plus vendus selon le SNEP, avec 17% d'artistes féminines dans le top 200.

    Un petit mot sur le classique aussi, alors que deux films sortis récemment (Divertimento et Tár) mettent en scène des personnages de cheffes d'orchestre. Dans tous les postes les plus importants – composition et direction notamment – à l'opéra et dans les orchestres, les femmes sont également très sous-représentées, conduisant le CNM à parler d'une "évaporation des femmes sur les postes aux responsabilités plus importantes".

    Difficile enfin de faire l'impasse sur les récompenses comme les Victoires de la musique, qui jouent forcément un rôle dans la visibilité médiatique des artistes. Le CNM répète là ce que l'on sait déjà, mais qui mérite d'être mieux connu.

    Depuis la création des Victoires en 1985, seules 5 femmes (contre 49 hommes !) ont triomphé dans la seule catégorie mixte, celle du meilleur album de l'année. Il y a quelques jours, c'est d'ailleurs Stromae qui a remporté cette récompense, et ce alors que trois femmes (Jeanne Added, Pomme et Angèle) étaient nommées.

    Crédit photo : Paul Hudson

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