2021 M08 26
Il a collé une beigne à Mick Jagger. C'est l'histoire la plus connue des fans de Watts, et elle illustre bien la face cachée de celui longtemps vendu comme le père tranquille des Rolling Stones. Un soir de concert à Amsterdam, alors que tous les membres du groupe sont rentrés à l'hôtel, Mick Jagger, un poil ivre, se met à crier dans les couloirs "où est mon batteur?". Pas de réponse. Jusqu'à ce que Watts, bien remonté, ne se décide à sortir du lit pour se raser et à s'habiller en costume complet - il est 5H du matin - avant de débouler dans la chambre de Keith Richards pour coller un pain à Jagger avec, comme réponse ultime : "Ne dis plus jamais que je suis ton batteur, tu es MON chanteur". Fin de l'histoire ? Non, et la suite est encore plus dingue. Dans son autobiographie Life, Richards expliquera que s'il a finalement séparé les deux zozos, c'est uniquement parce Mick Jagger portait la veste de mariage de Keith. Le cirque du rock'n'roll expliqué en une seule anecdote.
The best Charlie Watts story, courtesy of Keith Richards: pic.twitter.com/pEycNN9bKx
— Kyle Daly (@dalykyle) August 24, 2021
Il est devenu batteur de rock parce qu'il n'était pas assez bon pour le jazz. Ce n'est plus un secret; Charlie Watts était avant tout un jazzman égaré dans le monde du rock. On lui doit plusieurs formations et plusieurs albums (Rocket 88, le Charlie Watts Quintet et le Charlie Watts Tentet) et selon Richards, c'est la raison pour laquelle il ne cognait pas assez fort sur la batterie aux débuts des Stones. Rapidement, les choses changeront et permettront aux Stones de ne jamais sonner daté ni lourdingue. Toujours dans Life, Keith Richards explique que "Watts [était] le lit sur lequel il aime s'allonger musicalement". Cet amour pour le jazz, du reste, vaudra à Watts d'aimer porter de belles fringues semblables à celles que portaient ses héros Fred Astaire, Miles Davis et Duke Ellington.
Il aurait dû devenir graphiste. Charlie Watts détourant des visages sur Photoshop, vous y croyez ? Cela aurait bien pu arriver puisqu'avant de rejoindre les Stones en 1963, l'Anglais travaillait comme graphiste au Danemark puis dans l'agence anglaise Charles, Hobson and Gray. Il gardera de ce goût esthétique assez de connaissances pour concevoir plusieurs décors de tournées pour les Stones.
Il a dessiné tous les lits des chambres d'hotels où il a dormi. La vie en tournée, c'est sex, drugs et rock'n'roll ? Oui, mais sauf pour Charlie Watts. Surement parce qu'il aura été fidèle toute sa vie à son épouse, le batteur trouvait le temps long après les concerts. Sa solution pour trouver le sommeil ? Dessiner les lits des hôtels où il séjournait, jusqu'à compiler tous ses croquis dans un livre qu'on espère bien lire un jour, même s'il y aura peu de ragots croustillants à l'intérieur. En comparaison, l'ancien bassiste des Rolling Stones, Bill Wyman, est de loin le plus chaud lapin du groupe : il aurait couché après plus de 1000 femmes tout au long de sa "carrière", avec un record de 64 relations sexuelles en seulement 19 jours. Heureusement que ce dernier n'a pas eu la mauvaise idée d'ouvrir un compte Twitter en 2021... au temps pour nous, Bill Wyman a bien un compte Twitter.
Il n'a jamais fait de solos de batterie. Contrairement à Phil Collins et quelques autres, Watts n'a jamais fait dans le solo malaisant avec congas et percussions pendant 10 minutes, et rien que pour ça les fans du monde entier lui sont reconnaissants. Pourtant le batteur des Stones ne détestait pas l'exercice; il en était simplement incapable. "Je ne peux pas les faire, vraiment", avouait-il en 2012, mais j'aime entendre d'autres personnes les faire. Je suis plus intéressé par la batterie en tant qu'instrument d'accompagnement. Quand j'étais jeune, beaucoup de disques que j'aimais étaient vraiment plus centrés sur la section rythmique que sur un solo de batterie". Peut-être aurait-il fallu passer le message à Ringo Starr, auteur de plusieurs albums que personne n'a jamais écouté.
Il est tombé dans l'héroïne à la quarantaine. "Si une rockstar est capable de vous raconter les années 70, c'est qu'elle ne les a pas vraiment vécu". La citation est de Mick Jagger, à propos de la quantité pharaonique de drogues que tous se sont envoyés dans les narines (et ailleurs). Ce que Mick n'avait visiblement pas prévu, c'est que son batteur si sage ferait une violente crise de la quarantaine, au point de devenir accro à l'héroïne et à l'alcool durant les années 80. Etonnant, non ? "J'étais devenu une personne complètement différente ; un sale type. J'ai failli perdre ma femme et ma famille et tout". Moralité, après s'être pété la cheville après une énième cuite, Watts a heureusement repris sa vie en main, stoppé la cigarette et toutes les drogues. Et le pire dans tout ça, c'est qu'il a trouvé un allié inattendu pour l'aider dans sa cure de sobriété : Keith Richards !
C'était le plus fidèle de tous les Stones. Qualifié de mec ennuyeux face aux deux énergumènes que furent Keith Richards et Mick Jagger, Charlie Watts doit une partie de cette réputation au fait que, contrairement aux deux autres, il n'a pas dilapidé sa fortune en frais de divorces. Toute sa vie, il aura été marié à la fille d'un platrier, Shirley Ann Shepherd, rencontrée en 1961. Il l'épousera discrètement trois ans plus tard afin de continuer à faire croire au public féminin qu'il était célibataire; une règle qui valait alors pour tous les jeunes Stones, alors en pleine compétition avec les Beatles."C'est une femme incroyable" expliquera plus tard Watts, "le seul regret que j'ai c'est de n'avoir jamais été assez à la maison. Mais elle dit toujours quand je quitte la tournée que je suis un cauchemar et me dit de repartir". En presque 60 ans d'activité, Watts n'aura jamais manqué un seul concert des Stones. Jusqu'à ce mardi 24 aout, qui marque définitivement un tournant pour ces pierres qui peut-être ne rouleront plus jamais.
— Keith Richards (@officialKeef) August 24, 2021