La fin d'une époque : Apple débranche définitivement l’iPod

Sorti en octobre 2001, ce baladeur a révolutionné la consommation de la musique. Apple vient d'annoncer la fin de sa production.
  • Il est probable qu’une fois dans notre vie, vous l’ayez eu entre vos mains. Vous êtes là, au début des années 2000 en train de faire défiler vos groupes préférés. La batterie est bonne. L’outil est ultra simple à prendre en main et peut stocker plus de « 1000 chansons », la majorité téléchargées en peer to peer depuis l’ordinateur familial. L’iPod n’est pas le premier baladeur sur le marché. Mais c’est clairement le plus cool. Et même si ces dernières années avec l’avènement des plateformes de streaming, il n’était plus vraiment en phase avec l'époque, son arrêt marque la fin d’une époque.

    Comme l’explique Sophian Fanen, journaliste notamment spécialisé dans le streaming, l’iPod a été inventé par l’ingénieur Tony Fadell, en charge d’un projet de baladeur chez Philips. Il rejoint les équipes d’Apple au début de l’année 2001 et a moins de 12 mois pour créer le prochain baladeur révolutionnaire. À peine 10 mois plus tard, en s’inspirant entre autre du design d’une radio de Braun, l’iPod est prêt. Niveau marketing, les équipes trouvent la phrase « catchy » qui va bien — « iPod: 1000 chansons dans votre poche » — et son design avec la molette est à la fois ludique et facile d’utilisation. 

    C’est révolutionnaire. Mais en 2001, et même si iTunes existe déjà, il n’y a pas de plateformes ou d’outils pour télécharger légalement des fichiers musicaux MP3. On peut encoder ses CDs, mais c’est à peu près tout. Alors pour remplir leur iPod de 1000 chansons, les internautes se ruent vers des sites de téléchargement illégaux (Emule, LimeWire, etc) où l’on trouve en quelques clics un vaste choix d’albums et de singles. Au début, les majors voient d’un mauvais œil l’arrivée de l’iPod, synonyme de piratage.

    Apple résout en partie le problème dès 2003 avec le lancement de l’iTunes Store qui permet d’acheter légalement des chansons et de les jouer uniquement sur son iPod. En 2007, l’iTunes Store représente 70 % du marché du téléchargement légal. La firme de Steve Jobs surfe rapidement sur la vague en lançant des déclinaisons — l’iPod Mini, Nano, Shuffle et Touch — et éloigne la concurrence sans trop d’efforts. En 2010, neuf ans après le premier iPod, les ventes dépassent les 275 millions d’unités vendues. 

    Le mardi 10 mai, Apple a donc annoncé qu’il arrêtait la production de l’iPod Touch lancé en 2007. Les derniers exemplaires sont disponibles en magasin jusqu’à épuisement des stocks — ils seront sûrement revendus à prix d’or sur le net par la suite. Bien évidemment, la firme a rappelé que ses utilisateurs pourront continuer d’écouter de la musique via iPhone, iPad, Apple Watch, Apple TV, Mac ou Apple Music. Une manière de rappeler que l’iPod, c’est un peu de l’histoire ancienne, et que les modes de consommation nomades ne nécessitent plus d’avoir un baladeur dans sa poche. « La musique a toujours été au cœur des préoccupations d'Apple, et le fait de la mettre à la portée de centaines de millions d'utilisateurs comme l'a fait l'iPod a eu un impact sur l'industrie musicale, mais aussi sur la façon dont la musique est découverte, écoutée et partagée », a déclaré Greg Joswiak, vice-président du marketing mondial d'Apple, dans un communiqué.

    Mais comme l’écrit Bloomberg, ce baladeur a aussi été primordial pour le développement d’Apple, mal en point au moment de sortir son nouveau jouet : « l'iPod a contribué à faire passer Apple du statut de société en faillite — elle perdait des millions de dollars, Ndlr — à celui de mastodonte de 3000 milliards de dollars. L'iPod a ouvert la voie au développement de l'iPhone, de l'iPad, des AirPods et des produits qui représentent aujourd'hui la majeure partie des revenus d’Apple. » Merci Tony Fadell.