Quand Virgil Abloh réalisait des pochettes d'albums pour le hip-hop

Design, mode, direction artistique, réalisation : à 41 ans, Virgil Abloh, décédé hier des suites d’un cancer, avait le don de toucher à tout. Grâce à ses connexions avec les rappeurs, on lui doit également un certain nombre de covers plus ou moins cultes. En voici déjà cinq.
  • Kanye West - « Yeezus » (2013)

    Il y aurait un long article à réaliser sur les relations entre Kanye West et Virgil Abloh. Ensemble, les deux compères ont beaucoup tenté, énormément expérimenté. Avec, en point d'orgue, la pochette de « Yeezus », résultat de nombreux mois d'essais infructueux. À en croire le livre Figures Of Speech, dix designers différents auraient en effet participé à la réalisation de la cover, une sculpture aurait même été envisagée pendant un temps. C'est toutefois Virgil Abloh qui, après avoir visité un magasin de magazines populaires à New York, a eu l'idée de créer ce boîtier transparent, simplement accompagné d'un ruban adhésif rouge. D'après lui, celui-ci a été pensé dans l'optique d'imiter « un cercueil ouvert » censé symboliser la mort du CD. Malin.

    A$AP Rocky - « Long.Live.ASAP » (2013)

    Bien avant de clasher ouvertement Virgil Abloh dans Multiply, en s'attaquant notamment à l'une de ses marques (Been Trill), A$AP Rocky sollicitait sans scrupule le styliste américain. C'était en 2013, à l'occasion de « Long.Live.ASAP », un album où Virgil Abloh joue le rôle de directeur artistique - un exercice qu'il répétera pour Theophilus London (« Vibes ») ou Pusha T (« King Push » et « My Name Is My Name », avec ce code barre qui suggère l’influence du design industriel). À noter que Virgil Abloh a également conçu les décors des premiers concerts du rappeur new-yorkais, et qu'il a profité de cette collaboration pour réaliser son premier clip, judicieusement nommé Fashion Killa.

    Lil Uzi Vert - « Luv Is Rage 2 » (2017)

    En plus de convier les grandes figures du rap US aux défilés d'Off-White et Louis Vuitton, dont il assurait la direction artistique, Virgil Abloh profitait également de ses collaborations avec tous ces artistes pour faire du placement de produit. Une preuve ? La pochette de « Luv Is Rage 2 » de Lil Uzi Vert, sublime et traversée en son milieu par un ruban adhésif de la marque Off-White. Sauf qu'au moment d'évoquer la présence d'un tel clin d'œil, le styliste a toujours préféré parler d’un autre aspect de son esthétique, profondément connectée avec l'envie de dévoiler l'ensemble du processus de création : « De cette façon, toute une génération d'enfants pourra faire le travail de son côté, déclarait-il à The Fader. Cette pochette est un bon exemple. On a l'impression qu'on peut la décoller, et c'était important pour moi. » Virgil Ablot, ou l'art de faire passer l'artisanat pour une œuvre luxueuse.

    Westide Gunn - « Pray For Paris » (2020)

    Lorsque l’on collabore à plusieurs reprises avec Kanye West (« Yeezus », donc, mais aussi « Watch The Throne » et « My Beautiful Dark Twisted Fantasy »), le processus de crédibilisation se révèle aisé, et permet rapidement de varier les projets, entre mainstream et underground. En marge de ses collaborations de prestige, Virgil Abloh collaborait ainsi l'année dernière avec Westside Gunn pour la pochette de « Pray For Paris ». Pour le rappeur new-yorkais, membre de Griselda, il s'agissait alors de représenter Paris de manière crasseuse.

    « Il m'a envoyé trois pochettes différentes, mais c'est celle que je préférais, précise Westside Gunn dans une interview à Complex. Il en a même fait une avec une vieille photo de moi dans le Pyrex 23, avec mes chaînes. Malgré tout, je préférais la version avec David et Goliath. Ça ressemble à quelque chose que l'on pourrait voir à Paris. »

    Pop Smoke - « Shoot for the Stars, Aim for the Moon » (2020)

    Si beaucoup seraient tenter d'accrocher chez eux la cover de « Dark Sky Paradise » de Big Sean, Virgil Abloh et les pochettes d'albums, ce n'est pas qu'une histoire d'amour ou de franche réussite. À coup sûr, celle de l'album posthume de Pop Smoke, « Shoot for the Stars, Aim for the Moon », restera dans les mémoires comme ce moment où le directeur artistique a suscité les moqueries de toute une industrie. Le mécontentement des fans était tel que le label, Victor Victor, a décidé de proposer une autre pochette quelques semaines plus tard. Sans rancune, Virgil Abloh, qui avait également réalisé le clip de Shake The Room, dira que la cover originale était simplement inspirée d'une discussion entre Pop Smoke et lui.