2022 M12 17
Pour comprendre pourquoi ce pas de danse aussi appelé « back slide » ou « rétro-glissade » est autant associé à Michael Jackson, il faut remonter au 16 mai 1983. Ce soir-là, pour combler sa perte de vitesse et de popularité, la prestigieuse Motown a décidé de célébrer son 25e anniversaire en organisant une énorme fête au Pasadena Civic Auditorium de Los Angeles avec notamment Stevie Wonder, Diana Ross, Marvin Gaye et même les Jackson 5 qui se reforment pour cette occasion. Si le futur King of Pop a accepté de regagner les planches avec son ancien groupe, c’est parce qu’à un moment de cette nuit, il aura la scène pour lui seul, afin de chanter son tout prochain hit en puissance, Billie Jean.
Inutile de préciser ici que la soirée est un franc succès et que la foule est littéralement en délire au moment où les Jackson 5 interprètent leur classique I Want You Back. Après le passage de la fratrie vient le tour de Michael Jackson, en solo, pour présenter aux spectateurs ainsi qu’aux 34 millions de téléspectateurs, les yeux rivés sur leur écran un numéro dantesque autour de Billie Jean.
Michael Jackson n'a rien laissé au hasard; il avait tout prévu. En amont de la performance du soir, il avait exigé que sa chanson soit entrecoupée d’un solo de danse qui lui permettrait donc de réaliser ce fameux moonwalk qu’il avait répété de façon frénétique. Le grand moment se présente finalement et Jackson crève littéralement l’écran en exécutant à la perfection ce pas complexe. La réussite est totale et la légende raconte même que Fred Astaire aurait directement appelé Michael Jackson le lendemain de cette performance pour le féliciter. L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais il y a un hic.
Contrairement à ce que le King of Pop a écrit dans son autobiographie Moonwalk (1988), il n’a pas appris ce mouvement « tout seulen regardant des gamins le pratiquer dans la rue ». Non, pour le maîtriser, Michael Jackson s’est rapproché de Geron « Casper » Candidate et Derek « Cooley » Jaxson; deux jeunes danseurs qu’il avait déjà remarqués dans une émission de télé de 1979. Suite à leur performance, le chanteur les aurait rencontrés afin qu’ils lui enseignent comment exécuter ce moonwalk. Et bien que ces gamins lui aient révélé tous leurs secrets, Jackson ne leur rendra jamais la pareille, ne serait-ce qu’en mentionnant le nom de ses deux « mentors » dans son bouquin. D’un côté, ce n’est pas si grave. « Casper » et « Cooley » ne sont pas non plus les inventeurs du back slide.
Même s’il est compliqué de déterminer précisément la date de naissance du moonwalk, le premier à l’avoir réalisé serait Cab Calloway, un chef d’orchestre de jazz et de big band. Il serait apparu dans les années 1930, comme l’explique ce document :
« Calloway l’appelait “The Buzz”, mais il était plus saccadé et pas aussi flottant que le moonwalk moderne. Il existait également une danse de ragtime populaire à la même époque, nommée “The Camel Walk”, qui est un pas de danse en avant, en zigzag, qui exige que le danseur traîne les pieds. »
À défaut de Cab Calloway, l’histoire a retenu Bill Bailey, un fameux danseur de claquettes américain. Ce serait lui qui, en 1955 à l’Apollo Theater de Harlem, aurait réalisé ce geste difficile que de nombreux artistes reprendront plus tard. Il paraît même qu’avant Michael Jackson, David Bowie l’aurait reproduit dans une courte vidéo pour « Aladdin Sane ».
Quoi qu’il en soit, il faut rendre à César ce qui lui appartient. Même s’il ne l’a pas inventé, c’est bel et bien le King of Pop qui a donné à ce pas de danse signature toute la résonance internationale et historique qu’on lui connaît tous. Et c’est aussi grâce à lui que des petits jeunes essaient encore de le reproduire aujourd’hui.
Crédit photo en une : YouTube « Michael Jackson - Billie Jean (Motown 25) »