Les frères maudits du rock : Ray et Dave Davies de The Kinks

Être frère, en musique, c'est un peu pour le meilleur et pour le pire. Victimes du "syndrome Oasis", les Ray et Dave en auront fait les frais bien avant les Gallagher. Retour sur une histoire qui dévisse et qui se terminera d’ailleurs par une histoire de gâteau d’anniversaire piétiné...
  • Il y a certains anniversaires qui ne s’oublient jamais. Dave Davies, cofondateur de The Kinks avec son grand frère Ray, se rappellera toute sa vie de ses 50 ans. Pour célébrer son demi-siècle, le guitariste de la formation créée à l’orée des années 60, décide d’inviter tous les membres du groupe. Grosse erreur : au moment où la pièce montée fait son apparition, son aîné saute dessus à pieds joints. Cet énième excès de violence fera office de coup de grâce pour les Britanniques.

    Pour revenir à la sortie de terre des Kinks, il faut rembobiner 50 années d'un coup. Nous sommes en Angleterre et la fratrie Davies décide de se lancer dans la musique. À ce moment-là, ils ne le savent sûrement pas encore, mais comme les Rolling Stones, les Beatles ou les Who, les Kinks feront partie de cet âge d’or du rock anglais. Des lettres de noblesse qu’ils obtiennent grâce à des morceaux tels que You Really Got MeLolaSunny Afternoon puis des albums plus complexes, des opéras tock aussi (« Preservation Act 1 et 2 »), et bien sûr, un chef-d’œuvre, « The Kinks Are the Village Green Preservation Society » (1968).

    Mais pendant toutes ces années passées ensemble, les deux Londoniens auront littéralement massacré leur relation. Outre le fait d’avoir été un moteur créatif pour le groupe, cette querelle incessante entre les deux frères les aura rendus à moitié fous. Comme on le comprend dans cette interview que Dave Davies accordait au quotidien britannique Daily Mail en 2010, l’une des raisons de la colère s’appelait narcissisme :

    « Ray est un trou du c*l. Un vampire. Il aspire mes idées, mes émotions et ma créativité. Il est toxique et c’est un maniaque du contrôle. Avec lui, c’est “moi, moi, moi”. Il croit qu’il est The Kinks. Quand je pense à toute la belle musique que nous avons faite, cela n’aurait pas été pareil si moi ou Pete Quaife n’avions pas été là. »

    En partageant de la sorte ses états d’âme, le cadet exprime en réalité une histoire commune aux deux frères, et qui date de bien plus longtemps. Dès leur tendre enfance, une rivalité sans nom régnait entre les deux hommes. À un tel point que, pour chaque petite chose, c’était la compétition.

    Retour à la vie de groupe. L’un des vrais points de bascule a été franchi en 1973, le jour du 29e anniversaire de Ray, lorsque sa femme l’a quitté. Toujours dans les colonnes du Daily Mail, le petit frère se souvient :

    « Nous avons essayé de le réconforter, mais un mois après, il a annoncé sa retraite lors d’un concert en disant : “J’en ai marre de tout ça”. Je pensais qu’il plaisantait, mais plus tard dans la nuit, j’ai reçu un appel. Ray avait fait une overdose de drogue et devait se faire pomper l’estomac. Au bout d’un mois, nous avons décidé de retourner en studio. J’étais optimiste quant à l’avenir. »

    Malgré cet épisode, le groupe a continué sa vie. Et leur relation est allée de mal en pis. Et une autre embrouille éclate dans les années 80. Alors que les Kinks sont en pleine création d’un nouveau disque, le cadet insiste pour incorporer une chanson à laquelle il tient beaucoup, Perfect Strangers. Il s’absente du studio quelques jours, et à son retour en écoutant le mix de l’album, surprise, une grande partie de ses prises de guitares a disparu. Après un échange de mots doux, Ray et Dave en viennent aux mains.

    Le dernier coup dur entre les Kinks interviendra en 1997, juste après que Ray Davies a annoncé à ses collègues qu’il se lançait en solo. Le 3 février 1997, Dave a l’idée de réunir tout le groupe pour fêter son cinquantième anniversaire. Là encore, tout partait d’une bonne intention, mais le destin en a décidé autrement :

    « Juste au moment où j’étais sur le point de couper le gâteau, Ray a sauté sur la table. Il hurlait qu’il était un génie. Après ça, il a tout bonnement éclaté la pièce montée. »

    Après ce dernier violent épisode, les Kinks ne se sont presque plus parlé ni vus. Lorsque ce fut le cas, c’était uniquement pour gérer leurs affaires. Mais en 2018, bon nombre de médias, à l’image de Rolling Stone, ont commencé à raconter qu’une reformation serait possible. Apparemment, toujours selon le même magazine et cet article datant de 2019, le groupe aurait su enterrer la hache de guerre le temps d’enregistrer quelques morceaux inédits. Mais, ne dit-on pas qu'on a beau chasser le naturel, il revient toujours au galop ? L’avenir nous le confirmera... ou pas.

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