2023 M04 24
On pourrait essayer de réécrire l’histoire et vous dire que les Beatles ont lancé un label de musique par pure passion musicale. Mais non. Barry Miles — un proche des Beatles et l’un des fondateurs du journal underground International Times — raconte ici les coulisses de la création d’Apple Corps, une grosse société pour gérer tous les aspects de la carrière des Anglais (films, musiques, ventes, publishing, télévision, etc.) qui a notamment été créée pour des raisons... fiscales.
Bref, l’une des branches de cette nouvelle entreprise s’appelle Apple Records. C’est un label qui a pour ambition d’accompagner des artistes émergents, validés par les Beatles en personne. Toujours selon Barry Miles, John et Paul se sont rendus à la première session d’écoute organisée par le label qui a eu lieu le 24 novembre 1967. Ce jour-là, Apple Records fait signer un contrat à la formation Grapefruit. Cette même année, un jeune artiste anglais sort son premier album éponyme : David Bowie. Le disque de pop baroque sort sur le label Deram Records, une sous-division de Decca. Le vinyle débarque dans les bacs presque le même jour qu’un autre album, « Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band » des Beatles, et peine à décoller (logique).
On this day in music history, The Beatles new label Apple Records turned down the offer to sign a young David Bowie (1968). pic.twitter.com/zLeKlKDY8S
— Jake (the ‘80s never ended in my world) Rudh (@JakeRudh) April 24, 2022
En 1968, Bowie, qui a entendu que les Beatles avaient lancé un label, tente sa chance. Il demande alors à son manager de l’époque, Kenneth Pitt, d’envoyer ses démos. Mais même s’il a déjà sorti un premier album, le nom de David Bowie à la fin des sixties n’est pas encore magique. De plus, Apple Records est le label des Beatles. Il faut déjà que les quatre garçons dans le vent valident de manière unanime un artiste et qu’ils prennent aussi le temps d’écouter les cassettes, chose qu’ils ne font pas de manière régulière et assidue. En résumé, le label a tendance à signer des potes des Beatles — genre leur clavier génial Billy Preston — ou des artistes qui ont des liens avec le groupe et son entourage.
Résultat : Apple Records met trois mois à répondre à Kenneth Pitt pour finalement lui dire que Bowie n’est pas le genre d’artiste qu’ils recherchent en ce moment. Dans ses mémoires publiées après sa mort, en 2021, l’ancien manager a écrit que le label était une « organisation déplorable » et qu’elle avait preuve « d’amateurisme et d’une impolitesse flagrante ». Visiblement, même plus de 50 après les faits, Kenneth l’avait encore mauvaise.
En 1970, Kenneth Pitt est remercié et l’image de Bowie commence à changer sous l’impulsion de sa future femme, Angie. David signe finalement avec Phillips et sort sur ce label son premier vrai single, Space Oddity. Avant de réellement décoller dans l’espace pour devenir l’artiste le plus emblématique des années 70.
En 1974, dans un hôtel de New York, David rencontre finalement John Lennon. Les deux Anglais se revoient quelques jours plus tard quand David enregistre une cover d’une chanson des Beatles pour son futur album « Young Americains » (Across The Universe). Durant la session, un autre titre commence à prendre forme, Fame, co-écrit avec Lennon et le guitariste Carlos Alomar. La morale de cette histoire ? Un refus n’est pas forcément un échec. Même quand il vient des Beatles.
Today in 1975, David Bowie's "Fame" was released.
— Eric Alper 🎧 (@ThatEricAlper) June 28, 2021
That's John Lennon on guitar and vocals, and Bowie felt Lennon's contributions during the recording was significant enough that he gave him co-songwriting credit. pic.twitter.com/Q0P0ifkoJJ