2022 M05 30
Dès le départ, We Love Green voulait être plus qu’un festival. D’ailleurs, le mot qui revient souvent est celui de laboratoire. « On est un festival indépendant et on veut continuer d’être un laboratoire d’expérimentations », raconte Marie Sabot au téléphone. Think tank, conférences, restaurateurs locaux, démarches environnementales et une programmation qui met à l’honneur la diversité musicale actuelle : We Love Green, qui s’est inspiré d’autres festivals européens — Bestival, Green Man, End of The Road, Shambala, etc — n’est pas la copie conforme du voisin.
« Les Anglais sont très forts pour créer des festivals pluridisciplinaires. Il n'y a pas que de la musique : la nourriture est importante, il y a des scènes de stand-up, des scènes littéraires, des scénographies incroyables. Je pense notamment au Bestival qui avait lieu sur l'Île de Wight et qui était complètement fou avec des scènes musicales très variées. Il organisait aussi des courses à la nage, des concours de déguisement, ils mettaient en place des initiatives pour inciter les festivaliers à venir à vélo... ils avaient une idée à la minute. L'idée, c'était de s'inspirer de ces festivals-là, indépendants, pour créer un évènement nouveau en France. » Dès 2010, le projet est lancé. Mais Marie et ses équipes ne se sont pas projetées dans l’aventure sans expérience.
👾 WE LOVE GREEN 👾
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🚀 2, 4 & 5 JUIN 2022
3 jours de concerts, de rencontres et d’explorations. Le nouveau monde se rêve en musiques 🎶
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Marie a débuté sa carrière dans la musique chez Garance Production au début des années 90. « À l'époque, on faisait tourner des groupes de grunge, du metal, de rock alternatif. Par exemple, on a fait joué Massive Attack en soundsystem, les premiers concerts de Bjork, Lee Scratch Perry, etc. On était aussi au début du hip hop avec NTM… », raconte Marie.
Puis elle tombe dans les musiques électroniques et commence à soutenir et défendre cette scène. Elle créée des événements éphémères baptisées « We Love » dans des lieux improbables, que ce soit à l’Aquaboulevard, au Louvre ou au Grand Palais. Des expériences qui donnent envie de passer à l’étape supérieure. Mais sans reproduire les mêmes schémas classiques, c’est-à-dire faire jouer les mêmes artistes que les copains, faire appel aux mêmes prestataires ou encore concevoir le festival de la même manière. Pour ça, We Love Green définit ses propres règles et met l’accent sur le fait d’être le plus éco-responsable possible.
Les engagements historiques du festival ? « Les principaux, ce sont l'énergie, les déchets, la valorisation des déchets, la traçabilité de la nourriture et le transport des festivaliers et des artistes. Ça ne veut pas dire qu'on trouve des solutions pour tout mais on se questionne et on sait où on en est. Et tous les jours, il y a des succès et des échecs », confie la directrice, qui poursuit : « le plus gros impact carbone, c'est le transport des festivaliers. On a décidé d'être dès le départ un festival sans parking. On a environ 78% des festivaliers qui viennent en transport en commun. On a réussi à composter nos déchets et notre vaisselle alimentaire et même à la normer, c'est-à-dire que ce compost devient une vraie ressource. »
Cette année, le festival a décidé de faire des analyses avec la LPO, la ligue de protection des oiseaux, « pour savoir s'ils s'en vont avant et après le festival ». Les équipes ont aussi créé une ferme énergétique avec 100 mètres de panneaux solaires, ils testeront également un groupe électrogène à hydrogène vert « pour voir comment il résiste » et utiliseront trois biocarburants différents. En résumé, ils mènent des initiatives. « Nous, ça fait 10 ans qu’on teste des choses, et on peut en parler. Il y a beaucoup de festivals qui ne savent pas combien ils consomment : ils commandent des groupes électrogène à diesel mais ils n'ont pas analysé ce sujet-là ».
Marie a déjà des envies pour la suite. Elle aimerait, comme au festival Roskilde au Danemark, avoir sa propre centrale d’achat et élaborer avec les restaurateurs une charte des produits afin d’avoir un impact sur le territoire, mais aussi de collaborer avec des professionnels qui respectent les mêmes valeurs, « que ce soit au niveau social (le prix des salaires des ouvriers agricoles par exemple) ou écologique, contre sur les pesticides », explique Marie.
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— WE LOVE GREEN J-5 (@WeLoveGreen) May 27, 2022
Mais si We Love Green est un « laboratoire », c’est avant tout un festival, avec certes des conférences et des talks, mais surtout des concerts. Le premier concert de PNL en festival ? C’était ici. Des affiches où l’on peut croiser Damso, Anderson Paak., Action Bronson et Perfume Genius ? C’était ici. Faire venir un humoriste pour qu’il y présente un nouveau spectacle ? Ça sera ici cette année, avec la venue de Fary. « Les jeunes sont engagés sur le plan écologique, c'est certain. Mais c'est la programmation qui prime », assure Marie. Et sur ce point, « elle doit être très large. Ce qui est important, c'est que des publics différents se rencontrent. C'est pourquoi on va chercher des artistes de niche comme Rema, Shygirl, Amaarae. On a des artistes assez jeunes (et quelques têtes d'affiche historiques) et surtout, on ne veut pas affirmer un style musical en particulier. »
Cette année, avec la venue de Gorillaz ou Phoenix, le retour de PNL ou Angèle et la présences de plusieurs artistes en vogue (Shygirl, Slowthai, Ascendant Vierge, Charlotte Adigery et Bolis Pupul, Mad Rey, etc.), We Love Green se démarque une fois de plus.
Mais ces bons coups ne suffisent pas à Marie pour être sereine à 100% : « Comme les budgets ont augmenté de 40% sur certains groupes d'une année sur l'autre, si on n’arrive pas à tenir financièrement tout en ayant les artistes qui nous semblent les plus adaptés au festival, on est fragilisé. Un festival, c'est avant tout de la musique et les artistes s'achètent aux enchères. On se pose fatalement des questions : est-ce qu'on doit devenir un festival plus petit, faut-il demander plus d'effort de la part des artistes ? ». Des questionnements sur l’avenir inhérents aux festivals, qui ont pour certains un genou à terre à cause de la crise sanitaire. Mais on peut se rassurer en se disant que jusqu’à présent, We Love Green a toujours réussi à recycler les bonnes idées.
We Love Green a lieu du 2 au 5 juin au bois de Vincennes. Plus d'infos par ici
Crédits photos : Claire Gaby et Maxime Chermat