Que penser du docu Disney+ sur les mythiques studios d'Abbey Road ?

Disponible depuis quelques jours en France, le film réalisé par Mary McCartney est le premier à avoir pu pénétrer derrière les portes du studio le plus mythique du monde. Intitulé "If These Walls Could Sing", est-ce pour autant un bon documentaire ?
  • Abbey Road. Deux mots qui suffisent à faire saliver plus que de raison les fans des Beatles. Des studios tellement célèbres et importants dans l'histoire du rock qu'ils ont eu le privilège d'être classés monument historique au Royaume-Uni en 2010. Oubliez Muscle Shoals, Trident, Sunset Sound, Sun, Capitol ou Electric Lady, aucun studio d'enregistrement n'égale de près ou de loin la notoriété d'Abbey Road auprès du grand public.

    Il n'est donc pas très surprenant de voir Abbey Road avoir droit aujourd'hui à un documentaire Disney+ à l'occasion du 90ème anniversaire du studio. Eh oui, comme le rappelle le film dans ses premières minutes, il y avait une vie dans les cabines d'enregistrement du 3 Abbey Road à Londres avant les Beatles. Ce fut le cas notamment avec le pionnier Cliff Richard, qui fait partie du casting très prestigieux des artistes interviewés dans le film, et qui a été l'un des premiers à faire entrer le rock dans ces murs.

    Mais en toute logique, ce sont évidemment les Beatles qui occupent la plus grosse partie des 90 minutes du documentaire. Mary McCartney interviewe longuement son père qui ne nous livre pas de révélations fracassantes, mais il y a plus désagréable que de voir le toujours adorable Macca (80 ans) s'amuser à rejouer la mélodie de piano de Lady Madonna sur l'instrument utilisé pour l'enregistrement.

    Au chapitre Beatles, les moments les plus captivants sont ceux passés en compagnie de Giles Martin, fils du producteur légendaire du groupe (George Martin) et remixeur controversé de leur discographie. L'entendre passer les parties isolées de certains morceaux réjouira les fans, dont tous les poils se dresseront carrément en découvrant le décorticage du chef-d'œuvre A Day in the Life, et notamment celui du crescendo de la partie orchestrale en mur du son avant le célébrissime accord de piano final.

    Et même si l'on entend fugacement les voix de John Lennon et George Harrison – les images d'archives présentées sont par ailleurs vraiment dignes d'intérêt –, il y en a aussi pour les autres.

    Jimmy Page revient sur ses débuts en tant que musicien de studio sur place, notamment pour l'enregistrement du morceau culte du meilleur film James Bond, le Goldfinger de Shirley Bassey (1964).

    Elton John en fait de même en racontant entre autres qu'il était dans ses petits souliers au moment de s'adresser à Paul McCartney sur place en 1969 – comme on le comprend, sachant que ce dernier venait de lui jouer un nouveau petit morceau nommé Let It Be.

    Présents dans le studio en 1967 pour enregistrer leur fantastique premier album ("The Piper at the Gates of Dawn") au moment où les Beatles enregistraient "Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band", les jeunes membres de Pink Floyd ont sans doute été aussi impressionnés. Mais après avoir rendu hommage au génie de l'étoile filante Syd Barrett, Roger Waters et David Gilmour évoquent surtout le fait que le non moins classique "The Dark Side of The Moon" (1973) a aussi été enregistré à Abbey Road.

    Le documentaire a le mérite de rappeler que les années suivantes ont été plus difficiles pour le studio, finalement sauvé de la crise dans les années 1980 en commençant à enregistrer des musiques de films. Et pas n'importe lesquelles, puisque l'immense John Williams y a posé ses valises pour la bande-originale d'Indiana Jones et de Star Wars.

    Ce segment du film est clairement le plus intéressant pour les adeptes du son, car le composteur américain est le seul à expliquer avec un peu de précision ce qui fait la spécificité de l'acoustique des studios Abbey Road. Et rien à faire : lorsque qu'on le voit conduire l'orchestre pour le Duel of the Fates de La Menace fantôme (1999), les poils se dressent à nouveau.

    Cela étant dit, il faut reconnaître que ce documentaire est d'abord et avant tout un voyage touristique nostalgique – bien plaisant au demeurant – dans l'âge d'or de la musique populaire des soixante dernières années. Produit pour Disney+, le film reste très grand public dans son approche du studio, et la plupart des artistes interrogés sont incapables d'expliquer l'attrait sonore d'Abbey Road, en dehors de paroles un peu redondantes à la longue sur la magie du lieu et son caractère forcément sacré, digne d'une cathédrale où l'on n'ose rien toucher de peur de faire évoluer l'acoustique.

    Heureusement, on peut compter sur les frères Gallagher pour ne pas avoir ce genre de scrupules. Présent à Abbey Road pour enregistrer le très polémique "Be Here Now" (1997), Oasis fait partie des rares groupes à avoir été viré du studio. La raison ? Une enceinte a explosé alors que les membres écoutaient toute la discographie des Beatles dans le noir avec le volume à fond. Mais même là-dessus, Liam et Noel ne sont pas d'accord.

    Derrière les murs des Studios Abbey Road, un documentaire Disney+ disponible avec CANAL+.

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