2021 M11 27
Dès sa sortie, “What’s Goin On” est un événement national. L’album de Marvin Gaye regroupe les sujets sociétaux qui lui tiennent à cœur, comme la guerre du Viêt Nam, la pauvreté ou la toxicomanie. Six mois plus tard, Sly & The Family Stone balance “There’s A Riot Goin’ On”, dont le titre est une réponse directe à Gaye. Ici, il n’est plus question de s’interroger sur ce qu’il se passe dans le monde, mais bien d’y déclencher une révolte.
November 20th, 1971: Sly & the Family Stone releases There's a Riot Goin' On appropriately on Epic Records.
— Punky Booster (@djlesboogie) November 20, 2021
The greatest album of the greatest band. pic.twitter.com/ZYfE3w9n0g
Au centre de “There’s A Riot Goin’ On”, on retrouve deux éléments indispensables à sa conception : la connexion entre Sly et les Black Panthers et une forte consommation de stupéfiants. Après le succès massif de l’album précédent “Stand”, le leader du groupe chope la grosse tête et surtout, il tombe dans la coco. Sly va manquer un tiers des concerts du groupe au cours de l’année 1970 et la Stone Family n'enregistre que très peu de morceaux puisque son chef de file a constamment le nez dans la poudreuse.
Petit à petit, cette fâcheuse addiction le rend totalement paranoïaque. Au même moment, le musicien se lie avec les Black Panthers, de plus en plus présents aux Etats-Unis. Certains de ces adeptes vont lui suggérer de faire de la musique plus engagée, mais ce n’est pas tout. Deux des sept membres de Sly & The Family Stone sont blancs : Greg Errico et Jerry Martini. Ils se font virer entre “Stand” et “There’s A Riot Goin’ On” simplement à cause de leur couleur de peau qui ne correspond pas à la nouvelle image voulue par Sly. Ce dernier n’est alors qu’un simple pantin dirigé par les Black Panthers et la drogue.
Même si cet album est signé Sly et la Family Stone, le leader a en réalité enregistré la majeure partie du disque seul dans son coin. Toujours épris d’une paranoïa dévastatrice, il refuse de se joindre à ses acolytes (dont certains font tout de même partie de sa famille) pour s’enfermer dans sa maison et enregistrer ses morceaux par lui-même. Dans le livre There’s a riot goin’ on de Miles Marshall Lewis, ce sont les autres membres du groupe qui témoignent du mode de fonctionnement de Sly. Ils révèlent que sur le tube de l’album, Family Affair, ce sont pas leurs voix, mais celles d’autres musiciens que le meneur a embauché discrètement dans son coin. Il s’est aussi mis à composer des chansons petits bouts par petits bouts avant de les emboîter ensemble. C’est ce qui donne à “There’s A Riot Goin’ On” ce son sale qui ne ressemble à aucun autre.
Malgré un enregistrement tumultueux, le cinquième album de Sly & The Family Stone est une réussite commerciale. A sa sortie, il se place au sommet des charts de la catégorie « soul » du Billboard et le morceau Family Affair devient numéro un dans tous les Etats-Unis. Sacrée ironie du sort quand on sait qu’il s’agit du seul titre qui n’est pas interprété par la Family Stone. Du côté des critiques, le disque ne reçoit pas le même accueil. Il faudra attendre plusieurs années avant que les médias reconsidèrent son importance tant “There’s A Riot Goin’ On” a influencé une grande partie du funk des seventies - avec l’arrivée de George Clinton - tout en influençant les prémices du hip-hop.
A l’occasion de son cinquantième anniversaire, l’album de Sly & The Family Stone se refait une beauté avec la sortie d'une nouvelle réédition que vous pouvez vous procurer juste ici.