La musique est-elle le seul secteur où l’homosexualité est acceptée ?

Après le coup de gueule de l’humoriste Muriel Robin lors de l’émission « Quelle Époque ! » diffusée le 16 septembre, affirmant que son homosexualité a été un frein dans sa carrière au cinéma, posons la question : la musique est-elle un secteur culturel plus ouvert sur ces questions-là ?
  • Le samedi 16 septembre, lors de l’émission Quelle Époque ! diffusée sur France 2 et animée par Léa Salamé, l’humoriste Muriel Robin a affirmé ceci : « Je suis la seule actrice au monde à dire son homosexualité ». Des propos qu’elle a ensuite expliqués : « citez-moi au monde un acteur ou une actrice qui a fait une grande carrière quand il est homosexuel, il n'y en a pas. Jodie Foster s’est tue pendant 30 ans. Kristen Stewart était d’abord avec Robert Pattinson, donc son homosexualité était un peu sexy, un peu rock. » Pour Muriel Robin, c’est clair : « la jeune fille colle la photo de l’acteur dans sa chambre, le jeune homme celle de l’actrice. Il y a quelque chose de l’ordre du désir, de sexuel. Quand on est homosexuels, on n’est pas désirable, on n’est pas pénétrable. Et quand on n’est pas pénétrable dans le cinéma, on ne vaut rien. »

    Plusieurs médias, dont Libération ou Têtu, ont salué cette prise de parole, estimant qu’elle dit tout haut ce que de nombreuses personnes pensent tout bas, à savoir que de nombreux acteurs et actrices continuent encore aujourd’hui de cacher leur homosexualité du grand public pour continuer de travailler. « J'ai interviewé plusieurs acteurs qui cachaient leur homosexualité. Un notamment, souvent en 1er rôle, qui dit que s’il faisait son coming out on ne lui proposerait plus que des rôles de gay », a écrit l’animateur de TF1 Christophe Beaugrand-Gerin sur X (anciennement Twitter). Des propos proches de ceux énoncés par Muriel Robin, qui a affirmé qu’il y avait de nombreux « acteurs homos français qui se taisent, sinon on ne leur mettra plus jamais une femme dans les bras ».

    Les réactions sur les réseaux sociaux ont été, comme souvent, virulentes. Les internautes accusent Muriel Robin d’avoir un discours victimaire et n’hésitent pas à donner des exemples de stars du cinéma et de la télévision homosexuelles qui ont réussi leur carrière (Neil Patrick Harris, Ian McKellen, Ellen Degeneres, etc.). On pourrait aussi citer Jean Marais, Lambert Wilson (qui a parlé de sa bisexualité en 2016) ou encore Jean-Claude Brialy.

    Mais bien souvent, l’orientation sexuelle reste taboue, et quand ces acteurs décident de faire leur coming out, leur carrière est déjà bien entamée. Ça a été le cas pour Jodie Foster, mais aussi pour Wentworth Miller (Prison Break) ou encore Alison Brie (Glow, Community). Têtu écrit d’ailleurs que « l'homophobie dans ce milieu reste systémique en ce sens que les producteurs anticipent l'homophobie du public qui empêcherait, par exemple, un acteur gay d'être jugé crédible dans un rôle d'hétéro archétypal ». Quid alors du secteur musical ? 

    Dire que la musique est une safe space pour les personnes LGBT+ serait mentir — il y a encore beaucoup trop de discriminations et de violences envers les personnes de cette communauté dans la musique. Ceci étant dit, le milieu de la musique est depuis longtemps un secteur où les questions de genres, de sexualité, d’orientation sexuelle ou de féminisme sont abordées, que ce soient par des artistes gays ou par des chanteurs ou chanteuses militants et engagés.

    On peut citer Bruce Wayne Campbell, alias Jobriath, considéré comme le premier rockeur américain ouvertement gay. Mais aussi Diana Ross — avec son tube I’m Coming Out —, Judy Garland, Madonna, Mylène Farmer, George Michael, Elton John, Freddie Mercury, Boy George, Dalida ou encore Cher. Des artistes considérés comme des « icônes gay » qui ont donné une visibilité et un soutien aux personnes LGBT+ à travers leurs arts. Ce sont aussi des artistes qui ont brisé des tabous, qui ont osé prendre parole, qui ont osé prendre position et qui ont fait avancer les mœurs. La musique était, peut-être plus que le cinéma ou la littérature, en avance sur son temps.

    Ces personnalités ont ouvert des portes. Et aujourd’hui, grâce aux changements au sein de nos sociétés, et à une meilleure acceptation des orientations sexuelles des individus, les jeunes artistes osent défoncer ces portes à deux pieds. La fierté a remplacé la honte, et les sujets liés à la communauté LGBT+ sont abordés sans aucun tabou, aussi bien publiquement qu’en chansons.

    En 2022, Oliver Sim, membre de The XX, a sorti un premier album solo afin de raconter son histoire. « Je n'ai pas écrit ce disque pour m'appesantir, mais plutôt pour me libérer d'une partie de la honte et de la peur que j'ai ressenties pendant longtemps ». Les thématiques de son album, baptisé « Hideous Bastard », tournent autour de ses émotions, de ce qu’il a vécu et de son parcours. De nombreux autres artistes — on pourrait citer Sam Smith, Lil Nas X, Angèle, Mika, Olly Alexander, Pomme, Bilal Hassani, Eddy de Pretto — continuent de mettre leurs récits en avant. Des récits de plus en plus nombreux qui banalisent les histoires d’amour entre personnes du même sexe et qui permettent aussi de lutter contre l’homophobie, hélas encore trop présente dans toutes les couches de la société, qu'on soit artiste ou pas.