On a causé avec Pedro Winter du reboot de sa radio Ed Wreck

Après une première version de la « ED Wreck Radio » en 2017, Pedro Winter relance la machine : lors d’émissions exclusives diffusées sur Apple Music, le patron de Ed Banger racontera son parcours à travers les disques et les personnes de sa vie. Avec un premier épisode dédié à DJ Mehdi, il remet sur le devant de la scène l’œuvre géniale de son ami disparu, et partage aussi ses coups de cœur. Interview.
  • C’est un événement et aussi une fierté. En s’associant à Apple Music, Pedro Winter devient le deuxième artiste français à posséder une émission de radio diffusée sur la plateforme, après Madeon et sa Good Faith Radio. Un œil dans le rétro et l’autre braqué sur le futur, sans oublier le présent, le DJ et producteur va prendre les commandes du studio et jouer ce rôle de passeur qu’il affectionne tant.

    Le concept est simple : accompagné d’invités ou parfois en solo, pendant plus d’une heure, le boss de « Ed Rec’ » diffusera des disques et évoquera des thèmes qui lui sont chers. Au programme des prochaines semaines, il parlera de l’héritage et du renouveau de la French Touch ou encore de la scène club parisienne. Un voyage dans le temps qui débute naturellement avec un artiste qui s’en est affranchi, DJ Mehdi. Un choix évident pour cette première diffusée le 19 janvier.

    Salut Pedro, vous aviez déjà lancé une édition de la « ED WRECK RADIO » en 2017. Ca vient d'où ?

    Oui, à l’origine, ED WRECK – de l’Anglais « wrecking », qui veut dire « briser » (les codes) – est un média que l'on a créé dans la cave du bureau de Ed Banger. Il y a quelques années quand je voyais l’arrivée de toutes ces radios sur Internet, j’ai eu envie d’émettre à mon tour et on a monté ça de façon très artisanale. Il n’y avait pas de rythme ni de programme fixe, mais j’adorais cette spontanéité. Puis c’est un projet qui a toujours été en moi, alors quand Apple Music a fait passer le mot… Ils m’ont laissé une liberté artistique totale.

    Qu’est-ce que vous prévoyez de faire avec cette « ED WRECK RADIO 2.0 » ?

    La première version partait un peu dans tous les sens. On a donc décidé pour celle-ci de prendre une direction concrète. C’est très personnifié, puisque c’est vraiment mon parcours, ma sensibilité et mes rencontres qui donnent le rythme à toutes ces émissions. Pour celles qui arrivent, on va aborder des thèmes comme les nouvelles têtes de 2022, c’est-à-dire les jeunes artistes qui ont attiré mes oreilles — ce n’est pas forcément un pari ! Je ne suis pas dans la spéculation et je leur souhaite le meilleur du monde. On va aussi parler des crossovers entre musique et mode, notamment à travers des artistes qui créent des bandes-son pour les défilés, comme SebastiAn qui sera mon invité.

    Le premier épisode a été consacré à DJ Mehdi. C’était une évidence pour vous ?

    Déjà, en plus d’être une évidence musicale, c’était une évidence symbolique. À un moment, ED WRECK a été un projet commun avec Mehdi. Il aimait cette idée de faire une radio, d’émettre quelque chose. Puis, il y a un côté plus personnel… Il est parti il y a 10 ans, et maintenant, je me sens plus capable de remettre les mains dans son catalogue, dans sa musique, et de faire en sorte qu’on braque à nouveau la lumière sur son talent et son génie. Le temps passe si vite que, quand tu regardes aujourd’hui le profil de DJ Mehdi sur Apple Music ou les autres plateformes, effectivement, il n’est pas assez mis en avant. J’espère que cette émission va inciter les gens à aller fouiller, écouter son premier album « (The Story Of) Espion » (2002), son deuxième disque, « Lucky Boy » (2006) paru sur Ed Banger… Le but de cette démarche est très clair : on veut vraiment que ses morceaux brillent encore.

    Vous avez aussi sorti le single MPC 2021 pour cet épisode. C'est quoi l’histoire de ce morceau ?

    On a commencé ce titre avec Mehdi en 2001, à New York, où il s’était installé un petit home studio. On avait enregistré sur cassette un jam avec nos deux MPC, sans jamais aller au bout. Pendant toutes ces années, j’ai chéri et gardé cette disquette sans oser la toucher. Puis il y a eu ce déclic avec le temps, comme je disais. J’ai fait appel à Myd et on a commencé à créer l’architecture de ce morceau basé sur les éléments qu’on avait imaginé avec Mehdi. Pour aller plus loin, j’ai contacté deux personnages qui pouvaient correspondre à son univers et au mien, car c’est quelque chose qu’on cosigne. Santigold, une artiste américaine qu’on adore, qu’on vénère et qu’on connaît depuis longtemps. Elle m’a dit oui tout de suite — ce qui n’est pas toujours le cas avec tout le monde, crois-moi. Elle a donc posé ce couplet qui est inestimable, et nous a même fait ce cadeau de chanter le refrain en français.

    Il y a aussi Benjamin Epps qui représente bien cette vibe new-yorkaise des années 90/2000. Une autre influence.

    Voilà, tu as tout résumé. Encore une fois, il faut faire gaffe avec Benjamin Epps. Comme je l’ai rencontré et vu en studio, il ne faut pas non plus l’enfermer dans un rap nostalgique. Ce que je trouve intéressant, c’est de voir comment ce kid de 26 ans se réapproprie ces codes, à la fois dans le dialogue ou le flow. Il m’a tapé dans l’œil dès ses premières apparitions. Puis il connaît le travail de DJ Mehdi, je l’ai tout de suite senti. C’était donc une évidence de l’inviter. L’idée, ce n’était pas de faire un morceau triste, au contraire. C’est une chanson fédératrice avec une attention particulière. Il y a de l’émotion, mais c’est quand même un titre de rap.

    Crédits photos : ©Kevin Millet ; ©Apple

    ED WRECK radio, uniquement sur Apple Music, un mercredi sur deux à 18h00. Les épisodes resteront disponibles à la demande.