30 anecdotes complètement dingues sur "The Chronic" de Dr. Dre

Analyses, critiques, articles commémoratifs… Tout a-t-il déjà était dit au sujet du premier album de Dr. Dre qui fête ses 30 ans ce 15 décembre ? Sans doute. D'où l'intérêt de privilégier les faits, tous ces éléments a priori anodins qui, pourtant, contribuent à faire de « The Chronic » un monument de la pop culture.
  • 1. Avant même de se lancer en solo, Dr. Dre avait déjà tenté de réaliser un grand coup en produisant la majorité des morceaux du premier album éponyme de Michel'le, sa copine de l'époque. Au final, seul No More Lies, en 1989, atteindra le top 10 des charts.

    2. Contrairement à ce que l'on pense de la rivalité East Coast/West Coast, celle-ci n'était pas aussi véhémente qu'il n'y paraît. À entendre Q-Tip, membre d'A Tribe Called Quest, il faut en effet croire que l'influence était mutuelle :

    « C'est en écoutant “Straight Outta Compton” de N.W.A. que nous avons eu envie de faire “The Low End Theory”. Et des années plus tard, j'ai parlé à Dr. Dre et il m'a dit que le fait d'entendre “The Low End Theory” l'avait inspiré au moment de faire “The Chronic” ».

    3. Peu de gens le savent, mais l'un des ingénieurs du son engagé sur « The Chronic » n'est autre que Bernie Grundman, connu pour avoir bossé sur les albums d'Earth, Wind & Fire (« Head To The Sky »), Prince (« Dirty Mind », « Lovesexy ») ou Michael Jackson (« Thriller »)

    4. N.W.A. a beau avoir rencontré un énorme succès, les labels craignent la réputation sulfureuse du gangsta-rap. Conséquence : la majorité d'entre eux (y compris Sony !) botte en touche, laissant le champ libre à Interscope et Death Row de publier « The Chronic ».

    5. Quand on s'intéresse au mode de fonctionnement de Death Row, on se rend vite compte que le label a été largement financé par l'argent de la drogue. Notamment celui de Michael « Harry O Harris », considéré comme l'un des plus importants fournisseurs de crack dans la région de Los Angeles à la fin des années 1980. En injectant 1,5 million de dollars de fonds d'investissement dans une société (GF Entertainment), dont l'une des divisions n'était autre que Death Row, l'Américain a ainsi participé au financement de « The Chronic ». C'était même là sa principale condition : faire en sorte que Dre soit le producteur de toutes les sorties du label.

    6. Pas facile d'avancer avec sérénité en pleine euphorie gangsta-rap. Dr. Dre l'apprend à ses dépens et décide, suite à la controverse autour de Cop Killer de Body Count, de retirer de son premier album Mr. Officer, un single aux propos plutôt virulents : « Mr. Officer, I wanna see you layin' in a coffin, sir ». À croire qu'elle est déjà loin l'époque où le docteur préféré du hip-hop participait à la conception d'un titre nommé Fuck Tha Police...

    7. Aussi étonnant que cela puisse paraître, Eazy-E, l'ancien complice de Dre au sein de N.W.A., a continué de recevoir jusqu'à sa mort entre 25 et 50 cents par album vendu. Soit une somme estimée à 1,5 million de dollars. En cause ? Un deal de maison de disques malgré réglé et une phrase placée en ouverture de l'album, Dr. Dre insultant le rappeur californien de « fils de pute à l'allure de pingouin ».

    8. Pour être totalement honnête, Eazy-E n'est pas le seul à se faire clasher. Sur Fuck Wit Dre Day, un deuxième single écoulé à 500 000 exemplaires, son ancien complice, Ice Cube, ainsi que Tim Dog et le 2 Live Crew sont également malmenés.

    9. C’est grâce à son demi-frère, un certain Warren G, que Dre écoute pour la première fois Snoop Dogg. La suite, on la connaît.

    10. Au départ, Snoop Dogg pensait que c'était une blague. Pour lui, c'était sûr, Warren G n'était pas sérieux quand il disait que Dre avait entendu un de ses freestyles et voulait collaborer avec lui sur son album. En fin de compte, le jeune rappeur est présent sur onze des seize morceaux retenus au tracklisting de « The Chronic ».

    11. Outre Snoop Dogg, force est de constater que ce premier long-format a servi de rampe de lancement à un tas d'autres rappeurs iconiques du son G-Funk : Daz Dillinger, Kurupt, Nate Dogg ou encore Warren G.

    12. Les sessions d'enregistrement de « The Chronic » se sont déroulées lors des émeutes de 1992, à Los Angeles, suite à l 'affaire Rodney King. Et mieux vaut ne pas plaisanter : « Quand Dre arrivait, racontait Nate Dogg, c’est qu’il était l’heure de bosser. Que du boulot, pas de blague. »

    13. Dans The Day The Niggaz Took Over, le producteur-star affirme même avoir participé au pillage de la ville (« J'ai un magnétoscope à l'arrière de ma voiture »), avant de se rétracter quelques années plus tard dans le documentaire The Defiant Ones.

    14. The Day The Niggaz Took Over mis à part, « The Chronic » s’entend comme une célébration hédoniste des ghettos américains : on y parle de rouler en Chevrolet, de faire la fête autour d'un barbecue, de se taper des « bitches » et de fumer de bons gros blunts.

    15. Malgré son extinction de voix, The D.O.C., pour qui Dr. Dre a produit l'album « No One Can Do It Better » en 1989, est présent sur « The Chronic » : on peut notamment l'entendre sur The $20 Sack Pyramid, où il joue le rôle d'un candidat de jeu télévisé.

    16. Dans les faits, l'album s'inspire ouvertement du cinéma et de la télévision, notamment lors des interludes. En référence : Rudy Ray Moore, un des pontes de la blaxploitation et de l'humour graveleux.

    17. The D.O.C., on le retrouve également à l'écriture du refrain de Nuthin' But a 'G' Thang, ponctué par cette phrase, d’une simplicité terriblement efficace : « It's like this and like that and like this ».

    18. Ce n'est pas un secret : Dr. Dre doit une partie de ses influences (et de sa carrière !) à la scène P-Funk. Sur « The Chronic », onze morceaux de George Clinton ont ainsi été samplés, dont deux rien que sur Fuck Wit Dre Day.

    19. En plus d'avoir puisé abondamment dans les disques de Parliament, Funkadelic, The Ohio Players ou James Brown, le producteur californien a également samplé When The Levee Breaks de Led Zeppelin sur Lyrical Gangbang. Oui, le même sample que celui utilisé par Eminem sur Kim.

    20. Plutôt que de samples, il convient d’ailleurs de parler d’interpolation : cette technique consistant à composer un morceau en faisant rejouer une mélodie existante par des musiciens. Dre l’avait mis au point sur Cabbage Patch. Cela lui évitait de se ruiner en droits d’auteur. Cela lui permet aussi de poser les bases du G-Funk.

    21. Grâce à Nuthin' but a 'G' Thang et Let Me Ride, Dr. Dre a permis de rompre définitivement avec les origines new-yorkaises du hip-hop. À Los Angeles, une ville verticale, symbolisée par des autoroutes qui s’étendent à l’infini, le rap s’écoute désormais en voiture, selon un rythme ralenti, des basses puissantes et une mélodicité plus prononcée.

    22. Notons également que Let Met Ride, sorti en tant que single le 13 septembre 1993, a permis à Dre de remporter un Grammy Awards dans la catégorie « Best Rap Solo Performance ».

    23. La pochette de «The Chronic » est un hommage au logo de Zig-Zag Rolling Papers, une marque bien connue des fumeurs de weed.

    24. Précisons également qu'en argot local, la chronic est une variété de cannabis.

    25. Le jour de la sortie de « The Chronic », le 15 décembre 1992, une release party mémorable est organisée au Strip Club de Century City, avec des actrices pornos et un gâteau couvert de feuilles de marijuana.

    26. Dans la foulée de sa sortie, « The Chronic » squatte plus de huit mois le Top 10 du Billboard.

    27. Au total, « The Chronic » se serait écoulé à près de 6 millions d'exemplaires, rien qu'aux États-Unis. Un joli score, malheureusement ridiculisé par la sortie du deuxième album de Dre, « 2001 », vendu à plus de 10 millions de copies.

    28. Pour Kanye West, qui ne dit donc pas que de bonnes grosses conneries, « The Chronic » est l'équivalent hip-hop de « Songs In The Key Of Life » de Stevie Wonder. Rien que ça !

    29. Histoire de renforcer un peu plus le mythe autour de ce disque, précisons qu'il a intégré en 2020 les archives de la bibliothèque des Congrès, dont le but est de répertorier les œuvres ayant marqué le territoire américain.

    30. Aussi étrange que cela puisse paraître, Dre paye toujours des royalties pour « The Chronic ». La faute à une réédition non autorisée par Death Row en 2014. En attendant, l'album n'est plus disponible sur les plateformes de streaming...

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