2023 M09 12
« Choisir la bonne musique pour un film, c'est comme choisir le bon acteur. Elle doit transmettre les bonnes émotions et renforcer la narration ». La phrase pourrait être signée de Francis Ford Coppola et pourtant, elle est de sa fille, 32 ans à l’époque de la sortie en salles de Lost in Translation, ce film gazeux où un vieil acteur sur le déclin (Bill Murray) et une jeune Américaine insomniaque (Scarlett Johansson) trompent l’ennui dans un hôtel de Tokyo.
A bien des égards, Lost in Translation rappelle l’évanescence de Virgin Suicides, où déjà Coppola plaçait la musique au centre du jeu, jusqu’à permettre à Air de signer l’un de ses meilleurs albums, les plus intimes, poétiques et dramatiques. Et cette fois encore, la B.O.F. met les Français à l’honneur puisqu’on y retrouve Phoenix et Sébastien Tellier (l’indépassable Fantino). Sauf que là, la place d’honneur est accordée à Kevin Shields de My Bloody Valentine, qui signe 4 titres originaux (un exploit quand on connait la lenteur du garçon) dont le magique City Girl d’ouverture.
Pourquoi la bande-originale de Lost In Translation reste-t-elle aussi puissante, même 20 ans après sa sortie ? Peut-être parce que Coppola avouera à rebours avoir eu une vision claire sur la manière dont la musique devait jouer un rôle vital dans la transmission des émotions et des thèmes du film. Fan de shoegaze et de dream-pop, elle consentira que le choix des morceaux était pour elle le reflet de ce qu’elle aurait aimé entendre. Et la mission est aussi réussie que la séance karaoké avec Bill Murray. Rajoutez à cela le Just Like Honey de The Jesus and Mary Chain, et vous obtenez une compilation inattendue à mi-chemin entre l’ambient et le rock planant.
Trois ans plus tard, Coppola remettra le couvert (musical) avec son film sur Marie Antoinette, transportant cette fois les spectateurs dans l’univers très punk de Versailles, avec notamment Siouxsie and the Banshees, New Order ou encore les Strokes. C’était en 2006 et depuis, on attend que la réalisatrice parvienne à rééditer l’exploit d’une bande-originale tellement marquante qu’elle n’aurait pas besoin de traduction.