A voir : un docu sur la santé mentale chez les musiciens, avec Portishead et Idles

Plusieurs artistes britanniques, comme Geoff Barrow (Portishead), Adam Devonshire (Idles) ou encore Rag'n'Bone Man se dévoilent dans un film intitulé "Man Down" et traitant des problèmes de santé mentale rencontrés par certains artistes masculins.
  • Il y a des sujets de promo, quand un artiste ou un groupe sort un album, plus faciles à aborder que d’autres. La santé mentale fait partie de ceux qui touchent de l’intime, et qu’on ose à peine effleurer de peur de heurter ou de s’intéresser à quelque chose qui « ne nous regarde pas ». Sauf quand le problème devient systémique et qu’il est en partie lié à l’industrie dans laquelle évolue les personnes touchées. Dès lors, ce sujet tabou ne l’est plus.

    Depuis quelques années, que ce soit en Grande-Bretagne, en France ou encore en Italie, des associations et des initiatives abordent les problèmes de santé, physique et mentale, au sein de la musique. Oui certains artistes souffrent — parfois plus que la moyenne — et ça peut devenir problématique pour bien faire son métier. D'après Help Musicians, 7 artistes sur 10 souffrent de déprime et d’anxiété. Selon le collectif CURA, 7 individus sur 10 travaillant dans la musique se disent être régulièrement ou souvent en incapacité de travailler. Près de 5 personnes sur 10 se sentent déprimées. Face à ces chiffres alarmants, un film documentaire a été tourné et se focalise sur les artistes masculins uniquement. 

    Le documentaire a été réalisé par Gemma Jennison — aussi une infirmière spécialisée dans la santé mentale — et le réalisateur londonien Jamie Yuan. Il s’intitule Man Down (Homme à Terre en VF) car il s’intéresse en particulier aux hommes. Pourquoi ? Selon Gemma, ils seraient plus enclins que les artistes féminines à souffrir de troubles mentaux (dépression, burn-out, anxiété, pensées suicidaires, etc.). Si une enquête réalisée par le Collectif CURA en 2019 indique que les hommes dans la musique sont plus nombreux à « se sentir déprimés », il est difficile d’affirmer que les hommes sont plus favorables à ces troubles psychiques que les femmes.

    Ces dernières font face à d’autres problèmes, comme le harcèlement sexiste et sexuel, qui peut également avoir de graves conséquences sur la santé — 39% des artistes féminines affirment avoir été victimes, au moins une fois, de harcèlement sexuel dans le cadre de leur travail, toujours selon CURA. Pour les hommes, on considère qu’ils doivent être forts et qu’ils ne doivent pas montrer leurs émotions. Ces clichés seraient, selon Gemma, l’un des problèmes, et ils ne les pousseraient à parler ou à se soigner. Mais ce n'est pas tout.

    Selon les propos de infirmière sur la BBC — confirmés par d’autres études sur le sujet —  la précarité est aussi un facteur clé. Selon les premiers chiffres d’une nouvelle étude de CURA a paraître en 2022, 38% des personnes travaillant dans la musique gagnent moins de 15 638 euros par an. « Il y a un effet cumulatif qui explique pourquoi les hommes sont dans la situation dans laquelle ils se trouvent actuellement », explique l’infirmière à la BBC.

    Les tournées, le manque de reconnaissance, la célébrité, l’éloignement avec sa famille ou encore le rythme de travail (le soir, les weekends, avec parfois pas mal d’alcool et de drogues) sont aussi des éléments à prendre en considération. Par exemple pour Rag'n'Bone Man, la célébrité soudaine et les grosses tournées ont été deux facteurs importants de stress et d'anxiété : « Beaucoup de choses ont changé très vite dans ma vie », raconte le chanteur anglais dans le film.

    Le documentaire de 30 minutes, qui n’a pas encore de date de sortie, comprend aussi des témoignages de Geoff Barrow (Portishead, Beak!), d’Adam Devonshire (bassiste d’Idles) ou encore d’Anthony Mackie, un rappeur basé à Bristol. Une manière, déjà, de briser un tabou, mais aussi de montrer une facette de cette industrie que l’on connaît moins — ce n’est pas très vendeur de dire aux fans que son artiste préféré est en réalité dans une situation de mal-être. Mais Man Down peut déjà permettre une prise de conscience et la fin d’un silence. La première étape vers une industrie plus saine et plus soucieuse de la santé de ses artistes et de toutes les personnes qui la font vivre.

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