À 60 ans, elle crée un club où n'importe quelle femme peut jouer du punk

En 2022, à l’âge de 60 ans, Ruth Miller a lancé à Leicester en Angleterre le collectif « Unglamorous Music Project » qui permet à n’importe quelle femme, peu importe son âge ou ses capacités à jouer d’un instrument, de venir jouer de la musique punk afin de créer une nouvelle scène. Mais surtout pour briser les clichés.
  • C’est Ruth Miller qui le dit, au journal The Guardian, sans sourciller : « Il y a une gamme très limitée de passe-temps qui sont acceptables en tant que femme âgée. Si vous aimez la musique par exemple, on s’attend à ce que vous rejoigniez une chorale. » Mais cette Anglaise de 61 ans n’a pas envie de faire comme tout le monde.

    En 2021, après avoir monté son propre groupe de punk — The Verinos — elle a créé le collectif Unglamorous Music Project avec une idée très simple : donner aux femmes l’opportunité de jouer ensemble de la musique punk. Mais aussi d’écrire leurs propres chansons sur des sujets en lien avec leur vécu, leur colère et leurs revendications.

    « Le génie du punk, c’est qu’il n’est pas nécessaire de savoir jouer d’un instrument pour commencer. Ce qui compte, c’est ce que vous avez à dire. La plupart des groupes sont de jeunes hommes blancs âgés de 19 à 23 ans et leurs paroles parlent de leurs expériences. Mais si vous réunissez des femmes âgées entre 20 et 70 ans et qu’elles parlent de leurs expériences, avec humour et colère, alors ces chansons seront absolument géniales. »

    En l’espace d’un an, le collectif a réussi à mettre sur pied une douzaine de groupes. Ces formations s’appellent The Wonky Portraits, Virginia’s Wolves, Venus Attax ou encore Boliers, elles sont exclusivement féminines et respectent la même règle : se foutre du regard des autres et faire entendre leurs voix. Fish, l’une des membres du collectif, explique au Guardian que le punk, « c’est bruyant, sale et simple. Cela me libère du fait que les femmes âgées disparaissent dans notre culture, que nous sommes considérés comme de vieilles peaux qui n’ont rien d’intéressant ou d’important à dire. Le punk me permet de crier mon refus à tout ça. »

    Les autres membres s’accordent sur plusieurs points : jouer du punk est libérateur, que ce soit par rapport aux codes de la société britannique, par rapport aux regards des autres aussi. Pour les femmes plus âgées, faire partie d’un groupe, et jouer sur scène est aussi un gros doigt d’honneur à l’invisibilité, et aux clichés souvent associés aux mamies et aux femmes de leur âge. Steph Smith, 71 ans, et guitariste dans le groupe Velvet Crisis, raconte : « Toute ma vie, j’ai tout gardé en moi. J’ai dû être respectable, puis me regarder vieillir et devenir invisible pour la société. Mais nous ne sommes pas invisibles sur scène. Nous ne sommes pas des petites mamies. Nos chansons sont pleines de colère et de frustration. »

    Pour Ruth Miller, ce projet va donc plus loin que d’offrir aux femmes un espace pour jouer du punk. Il s’agit avant tout de changer les regards et de briser les clichés autour des femmes et surtout autour des femmes qui prennent de l’âge. Et la meilleure manière de le faire, c’est avec le punk, en le criant le plus fort possible. Lors des festivals, les artistes femmes sont minoritaires, avec 14% de femmes programmées dans les festivals de musiques actuelles. Qui sait, des projets comme celui-ci permettront peut-être un jour d'arriver à une saine parité.

    Crédit photo : @Unglamorous Music Project 

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