Il y a 25 ans naissait Winamp, le plus cool des lecteurs MP3 de l'internet

Le 21 avril 1997, un jeune Américain de 18 ans créait Winamp. Le peer to peer et l’échange de fichiers mp3 sont alors en pleine explosion, et c’est bien ce lecteur qui sera les favoris des internautes en herbe. Mais après une série de mauvaises décisions, ce succès semble désormais bien loin.
  • On parle là d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Télécharger, patiemment, un fichier mp3 à 192kb/s, pour ensuite le lire sur son ordinateur. Et, bien sûr, le lire avec Winamp. Si possible avec une apparence personnalisée. C’était le tout début des années 2000, alors que la révolution numérique débutait à peine.

    On doit ce lecteur audio, apparu en 1997, au développeur Justin Frankel, alors âgé d’à peine 18 ans. Son but est simple : avoir enfin un lecteur qui lui convienne pour lire sa musique. En bon geek, il s’en charge donc lui-même. Le format mp3 lui-même n’existe que depuis 1994, et le grand chamboulement apporté par Napster n’arrive qu’en 1999. Durant une poignée d’années, Winamp résume à lui seul toute cette époque.

    Croyez-le ou pas mais aujourd’hui, le logiciel est toujours vivant. En quelque sorte. Alors que sa fermeture a été annoncée fin 2013, il a finalement été racheté in extremis par Radionomy, agrégateur de webradios belge. Une nouvelle version a été promise, que l’on attend encore malgré une beta initiée en 2021. Ne restent que les anciennes versions, à l’esthétique d’un autre âge. Si certains acharnés s’y accrochent, il est aujourd’hui difficile de trouver des utilisateurs du logiciel. Un triste déclin, pourtant facile à expliquer.

    Lorsque Frankel et son équipe de quatre personnes publient Winamp, le succès est immédiat. En quelques mois, on compte les utilisateurs en millions. C’est que s’il n’est pas le premier, le lecteur est le plus abouti du genre. Il permet de gérer facilement ses listes de lecture, ses playlists, possède même un égaliseur de fréquences, ou même un visualiseur, gadget autrefois essentiel, désormais totalement ringard. Plus encore : n’importe qui peut se l’approprier en modifiant l’apparence du lecteur à l’aide de skins. Qui, malheureusement, étaient pour la plupart affreux, à en juger par ce site qui les recense. Qu’importe, Winamp devient ainsi un maillon essentiel de la mutation numérique de la musique : si le mp3 a pu se démocratiser, c’est grâce à lui.

    Mais sa chute a vite démarré. Dès 1999, en réalité, suite à son rachat par AOL. Ce fournisseur d’accès était lui-même le nouveau roi du nouveau territoire d’Internet, grâce à sa stratégie commerciale agressive. Mais au lieu d’amener Winamp au sommet, il l’a emporté dans sa chute. Dès le départ, Frankel et son équipe sont mis sous la tutelle d’une entreprise similaire, pourtant bien moins populaire. Frustré, le développeur va régulièrement entrer en conflit avec l’entreprise. En pure provocation, il crée dès 2000 Gnutella, un logiciel de peer to peer en accès totalement libre. Si AOL y met immédiatement fin, ses clones vont pulluler sur le web, de LimeWire à MLDonkey. Et favoriser ainsi le piratage.

    Dès 2003, Frankel claque la porte, pour ensuite créer le logiciel audio Reaper. Il vient alors de finir la version 5 de Winamp - et il n’y en aura jamais de sixième. Cette même année, Apple lance iTunes, avec son interface bien plus ergonomique, et la possibilité d’acheter sa musique à l’unité. La suite est évidente. À trop stagner, Winamp loupe le train de la mobilité (sa version mobile ne sort qu’en 2011) et du streaming. Dès la fin des années 2000, son agonie est actée. Au-delà de la nostalgie, son triste parcours est aussi très éclairant sur l’évolution du web 2.0. Né d’un libertaire au fort esprit d’indépendance, il s’est retrouvé au mains de grandes entreprises agrégeant tous les logiciels populaires. Winamp, restera donc comme un maillon essentiel dans l’histoire de la musique numérique... mais surtout un exemple à ne pas suivre pour ceux qui aimeraient éviter la touche pause.

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