Danielle Ponder, l'ancienne avocate qui veut devenir queen de la soul américaine

Après une décennie à travailler en tant que commis d'office dans l'État de New York, l'Américaine a reçu une mise en demeure : sa voix est trop belle, trop puissante, pour n'avoir que les plaidoiries comme terrain d'expression. Verdict : son dernier album "Some Of Us Are Brave" lui promet de beaux lendemains chantants.
  • Sur le site des Transmusicales, où elle est programmée cette année, il est dit que Danielle Ponder possède « une voix qui porte ». Il est vrai que l'Américaine a l'habitude de se faire entendre. Petite, cela se passait dans les églises, où cette fille de pasteur, biberonnée au gospel, se nourrit de la ferveur des messes dominicales. Jusqu'à il y a peu, cela se passait encore dans les tribunaux, au sein de ces lieux clos et tendus où elle a été avocate commis d'office pendant une décennie à Rochester, dans l'État de New York. Danielle Ponder y trouvait là un équilibre, entre ses convictions sociales et sa passion pour le chant.

    « Je dis souvent aux gens qu'il n’aurait pas été possible d’être commis d’office si je n’avais pas aussi la musique dans la vie ». Le paradoxe, c'est qu'elle n'a jamais vraiment aimé sa voix. Celle d’une « vieille chanteuse de gospel », paraît-il. Plus étrange encore : à 40 ans, l'Américaine ne s'attendait certainement plus à pouvoir vivre un jour de sa musique.

    En 2022, force est de constater que Danielle Ponder s'est trompée sur toute la ligne. Premièrement, sa voix séduit désormais bien au-delà de son cercle d'initiés. Deuxièmement, elle a fini par lâcher le barreau, s'est associée à l'agent de Billie Eilish et a depuis mis en place une tournée à travers les États-Unis. Mieux encore, son dernier album (« Some Of Us Are Brave ») a été salué par les radios américaines, probablement moins attirées par le classicisme du projet (un timbre soul, des cuivres, des refrains puissants, chantés gorge déployée) que par la puissance de cette voix, toujours aussi soucieuse de narrer le destin des délaissés, des exclus, des sans-voix.

    À l'écoute de Working, extrait d'un disque précédent, on l'entend ainsi chanter le fardeau de la dette étudiante dans le quotidien des salariés américains, tandis que le titre de « Some Of Us Are Brave » est emprunté à une anthologie féministe traitant du manque de représentation des femmes noires dans les études féministes, ainsi que du racisme et des réformes en prison.

    Via le médium soul, Danielle Ponder raconte à sa façon la même chose qu’Aretha Franklin ou Curtis Mayfield il y a cinquante ans : la vie vue d’en bas, vue de biais. En tenue d’avocate ou lors d’une conférence TedX, c’est ce qu’elle a toujours fait. Contrairement à ses disques précédents, elle opère simplement avec plus d’émotions, d’introspection et d'expérience sur « Some Of Us Are Brave » : un album qui ne révolutionne pas le genre, mais se révèle être d’une élégance remarquable.

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