2021 M02 23
Les mots inutiles - 1961
Avec le temps, cette chanson est devenue particulièrement courtisée par les fanas de Gainsbourg. Et pour cause : Les mots inutiles est un des premiers morceaux déposés à la SACEM par l’homme à la tête de chou, sous le pseudo Julien Grix. Autre particularité : Les mots inutiles a fini par être rebaptisée Vienne à Vienne. Pourquoi ? Pour les besoins d’une émission de télévision consacrée en 1961 à la capitale autrichienne, et sans doute parce que certaines paroles ont été changées pour l’occasion.
J’ai mal à la tête - 1962
Gainsbourg incarne tellement la figure de l'artiste, du génie capable de tout créer, que l’on en oublierait presque que le Français également a pioché dans le répertoire des autres, pris le temps de se nourrir d’autres mélodies, d’autres univers. C’est le cas de J’ai mal à la tête, un titre emprunté en 1962 à Maurice Falconnier et à Georges Ulmer : soit l’histoire d’un boxeur neurasthénique, revisitée ici dans un style très rive gauche.
L’escroc - 1964
Il y a de fortes chances pour que ce titre ait été enregistré avec les mêmes musiciens que ceux présents sur « Gainsbourg confidentiel », tant L’escroc possède ce même goût pour le minimalisme, les guitares yéyés et les jeux de mots que l’on prononce avec nonchalance. Pourtant, c’est bien sur la bande originale des Plus belles escroqueries du monde que l’on retrouve ce single dont les couplets étaient à l'origine hachés afin de coller au rythme des différents sketchs du long-métrage.
Chatterton - 1967
Issu des mêmes sessions qu’« Initials B.B. », mais non retenu sur la version finale, sortie en 1968, Chatterton possède toutefois la même aisance crâneuse que Ford Mustang, Torrey Canyon ou Hold Up, se baladant sur les crêtes de l'idéalisme pop (orchestrations clinquantes, american dream, etc.), sans jamais tomber dans la parodie, ni l’exercice de style. À écouter Chatterton, c’est plutôt le sens de la mise en scène de Gainsbourg qui frappe, son aisance à flirter entre le morbide et le caustique en quelques mots : « Chatterton, suicidé /Cléopâtre, suicidé/ Isocrate, suicidé/ Goya, Fou à lier/ Quant à moi... Ça ne va plus très bien ».
Bye Bye Mister Spy - 1967
Il y a quelque chose d'expérimental dans ce morceau, extrait de la BO de L'inconnu de Shandigor, une parodie de film d'espionnage au sein de laquelle Serge Gainsbourg joue le chef des Chauves. On est alors en 1967, le Français vient de composer des tubes qui regardent la scène londonienne droit dans les yeux (Comic Strip, Initials BB, Qui est in, qui est out, etc.), et rien ne laisse à penser qu’il ait finit d’explorer toutes les possibilités offertes par l'orgue. Même constat concernat l'écriture, portée ici par les doubles sens, les paronymes et les jeux de mots, qu'il prononce ici dans une atmosphère presque morbide.
Mr. William - 1968
Autre reprise : Mr. William, un titre sorti en 1953 et cosigné par Jean-Roger Caussimon (parolier de Julien Clerc, Arno, Bernard Lavilliers) et Léo Ferré. Pas rien. Mais cela ne fait pas peur à Gainsbourg qui, plutôt que de rester fidèle au morceau original, le revisite à sa façon, l’agrémentant de nouvelles sonorités, de chœurs féminins à l’accent anglais et d’un tempo ska presque précurseur en cette année 1968.
La fille qui fait tchic ti tchic - 1969
Si les musiques de films ont toujours été un moyen pour Gainsbourg d'expérimenter, les interprètes féminines lui ont quant à elles permis d’envisager des tubes pop aussi accrocheurs que sophistiqués. Alors, quand ces deux terrains de jeu se croisent, le résultat ne peut qu’être fantastique. On tient pour preuve La fille qui fait tchic ti tchic : une orfèvrerie de pop gainsbourgienne, interprétée par Michèle Mercier (également actrice principale d’Une veuve en or, film dont est extrait ce single), enrichie par divers arrangements classieux et pervertie par nombre de sous-entendus coquins.
Les papiers qui collent aux bonbons - 1973
Loin d’être un chef-d’œuvre, ce morceau, extrait des sessions de « Vu de l’extérieur » permet malgré tout de rappeler la collaboration entamée par Gainsbourg auprès des britanniques Alan Hawkshaw et Alan Parker. Elle rappelle aussi, avec son orchestration assez chargée, que le Français ne peut plus se permettre d'arriver dans les bacs par hasard (et pas rasé) : deux ans après « Melody Nelson », le public attend désormais de lui qu’il propose une autre forme de pop, sophistiquée, conceptuelle et poétique. Raté : à sa sortie, « Vu de l’extérieur » ne s’est écoulé qu’à 20 000 exemplaires.
Mister Iceberg - 1978
Adepte du contrepied, ce bon vieux Gainsbourg ne pouvait que prendre la tangente au moment de composer la face b de Sea, Sex and Sun. Aux mélodies ensoleillées, à la légèreté d’un refrain apte à être repris en chœur lors de vacances au Club Med (coucou les Bronzés !), il oppose ici Mister Iceberg, à l’ambiance cinématographique, presque nocturne. Au passage, notons qu'il existe une version anglaise de ce morceau (pas vraiment convaincante, ceci dit…) et que l’on ne peut pas s’empêcher de penser que la diction de Gainsbourg a probablement influencé celle d’artistes tels que Thomas Fersen par la suite.
Negusa Nasast - 1981
En plein trip jamaïcain, Gainsbourg aborde différemment son art. Il paraît plus spontané, parfois moins lettré, mais toujours aussi taquin dans les paroles : « croire, c'est aussi fumeux que la ganja, tire sur ton joint pauvre rasta, et inhale tes paraboles », chante-t-il lentement, comme si le flot de ses mots était ralenti par la consommation accrue de weed. En arrière-fond, il y a aussi cette rythmique dub que Gainsbourg continue d'explorer, pour mieux s'en écarter trois ans plus tard avec « Love On The Beat ».
RETROUVEZ "LA STORY DE SERGE GAINSBOURG - LE PUNCHLINER" LUNDI 1 MARS SUR CSTAR