David Crosby, légende du folk-rock, est mort à 81 ans

Le guitariste américain moustachu, qui a fondé les Byrds puis Crosby, Stills, Nash & Young, aura tout vécu, les énormes succès musicaux comme la toxicomanie, la prison et les périodes de vide. Ces dernières années, il avait regagné en popularité grâce à un documentaire sur sa vie, de nouveaux albums et une activité remarqué sur Twitter où il donnait son avis et jugeait la qualité des joints des autres internautes. Il est mort à l’âge de 81 ans des suites d'une longue maladie.
  • Dans les années 60 à À Laurel Canyon, ce quartier de Los Angeles hippie où l’on pouvait croiser les Doors, Joni Mitchell, Love ou encore The Mama’s and the Papa’s, un bonhomme avec une sacré moustache de morse est là : c’est David Crosby.

    Il a 25 ans, il prend beaucoup de drogues — comme tous les autres, couche à droite à gauche — comme tous les autres — et mène une vie insouciante dans une époque bénie pour ces musiciens utopiques. Au même moment, dans ce bouillonnement créatif et récréatif, il fonde les Byrds, l’un des premiers groupes de rock psychédélique. Si au début, tout se passe bien, David devient vite un élément problématique. Souvent défoncé — il était connu pour mélanger l’héroïne et la cocaïne —, habillé avec des chapeaux de cosaques ou des capes, il prend la parole sur scène pour entamer des discours militants sur des sujets politiques, pro-LSD voire complotistes. Sans surprise, ça agace les autres membres qui finissent par lui dire d’aller se faire cuire un œuf.

    Mais « le Croz » s’en tape. Il fricote avec un tas d’autres musiciens. Il produit des albums pour le jeune Jackson Browne ou Joni Mitchell, qui fut aussi sa copine. Quand il se rend à Londres, il passe la plupart de son temps avec Graham Nash des Hollies. Grâce à George Harrison, il assiste aussi aux sessions de « Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band » à Abbey Road. Aux États-Unis, il traîne avec Stephen Stills et Neil Young, membres du groupe Buffalo Springfield, ou encore avec les Jefferson Airplane. En gros, il s’éloigne des Byrds mais forme dans la foulée Crosby, Stills & Nash, puis Crosby, Stills, Nash & Young quand Neil décide de rejoindre le groupe avant de se consacrer à sa carrière solo. Mais avec ou sans le Canadien fan de bagnole, ce groupe assure. Les albums sont majestueux, les compositions magistrales et les stades sont remplis.

    On parle alors de David Crosby comme d’un génie avec une sensibilité harmonique de haut vol. C’est lui qui s’occupe des harmonies, des arrangements et de l'orchestration des chansons. Dans son autobiographie, Neil Young écrit qu’il était le « catalyseur, complètement absorbé par ce que nous faisons, nous entraînant toujours plus loin ». Mais il garde un léger goût amer. Dans le documentaire Remember My Name sur sa carrière sortie en 2019, il dit « je suis le seul mec de Crosby, Stills, Nash & Young qui n’a pas pondu un seul tube ». Même si la fin du rêve hippie est actée, le groupe parvient à fédérer autour de sa musique — ils ont quand même joué à Woodstock en 69. Les deux albums « Crosby, Stills & Nash » et « Déjà Vu » n’ont pas pris une ride et les tournées à travers le monde permettent au groupe de mesurer sa popularité. Et son influence.

    En 1971, David Crosby joue sur le «  Surf's Up » des Beach Boys et sort un premier disque solo « If I Could Only Remember My Name » — la légende raconte qu’il l’a nommé ainsi car il lui arrivait, à cause des drogues, d’oublier son propre prénom. Un album sombre, mélancolique et sublime qui regroupe un paquet de musiciens talentueux de la scène de San Francisco et Los Angeles (Bill Kreutzmann, Jerry Garcia, Michael Shrieve, Neil Young, David Frieberg, Joni Mitchell, etc.). Fun fact : le Vatican le placera deuxième dans sa liste des meilleurs albums de pop. La suite plaira moins au pape. 

    Les années 70 seront comme une lente descente aux enfers : beaucoup de concerts, un peu moins de succès, moins d’entrain, moins de tout et toujours plus de drogues, etc. En 1982 à Dallas, le bonhomme est fauché. Il dépense toute sa thune pour se défoncer. Il est arrêté par la police pour possession illégale d’un flingue et de cocaïne — un pistolet qu’il garde avec lui depuis la mort de John Lennon en 1980 et une paranoïa qui avait débutée au moment du meurtre de Sharon Tate en 1969. Il tient deux jours en centre de désintoxication puis finit par être jugé coupable. Le verdict : il est condamné à cinq ans de prison. En taule, David Crosby se tient à carreau. Il arrête les bêtises, la coke et écrit même des nouvelles chansons. Finalement, il ne restera que neuf mois en prison. En 1989 sort « Oh Yes I Can », son deuxième album, 18 ans après le premier. Une renaissance pour David. Il renoue avec sa passion, la musique, puis enchaîne les albums — cinq nouveaux disques depuis 2014. En 2021 au Guardian, l’Américain avait dit : « Les trucs importants dans ma vie, ce ne sont pas les problèmes que j’ai eus, c’est cette magie qui m’est arrivée, qui m’a permis de créer toute cette musique ». 

    Ces dernières années, en plus d’avoir participé au documentaire Remember My Name (2019), il était très actif sur Twitter. David répondait aux nombreuses questions des fans (souvent très drôle ou alors très honnêtement) et donnait son avis sur la manière dont étaient roulés les joints des internautes.

    Le 18 janvier, quelques heures avant sa mort, il avait répondu à un fan qui lui demandait si l'on pouvait aller au paradis avec des tatouages. Crosby : « j’ai entendu dire que cet endroit était surcoté… et nuageux. » L’Américain est désormais au paradis des rockstars où il a retrouvé une bonne partie de ces vieux copains de l’époque.

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