2021 M03 8
Une carrière dans la musique en demi-teinte. Des petits boulots pour survivre. Une dépression. Puis une révélation, sur scène : Jason Williamson, probablement le meilleur frontman anglais piouffff longtemps. Après un concert de Sleaford Mods à Southampton au début 2019, Tor Maries envoie tout chier, et lance un projet musical qui sera plus direct, plus vrai, plus viscéral. Billy Nomates (que l’on peut traduire par « Billy sans potes ») vient de naître. Et tout va aller très, très vite.
Avant de s’atteler un son premier album, la native de Leicester balance sur le net, en mars 2020, un disque de 9 reprises où elle reprend par exemple Once In A Lifetime de Talking Heads ou encore Love Will Tear Us Apart de Joy Division. Les fondations sont posées, et les premiers coups de marteau-piqueur peuvent alors débuter. Dans l’urgence, elle écrit et enregistre aussi le titre No avec un ordinateur, un pote qui joue vite fait une ligne de basse à l’arrache et un micro bon marché. Le morceau en question, ce sont deux lettres qui ont le pouvoir de changer une vie. « Dès que j’ai commencé à dire « non » à des trucs, les portes ont commencé à s’ouvrir. On pourrait croire que c’est un état d’esprit négatif, mais pour moi, ça été positif », raconte Billy au NME. « Non est la plus grande résistance » lance l’oiseau solitaire dès la première phrase du morceau.
Si Billy Nomates est une punk dans l’attitude, son style musical oscille entre plusieurs influences, allant du vieux R’n’B à la Northern Soul au rock 90’s de Sonic Youth jusqu’au rap, qui, passées au mixeur, donnent un résultat hybride et une prononciation saccadée entre le spoken word et le chant. Avec sa dégaine de teuffeuse australienne (pour la coupe mulet) et ses premiers concerts remarqués, elle attire l’oreille de Geoff Barrow (membre de Portishead et les géniaux Beak!) et de son label Invada Records sur lequel elle sort en août 2020 son premier album « Billy Nomates ». Tout l’album est imprégné de la vie plutôt merdique de Billy. « Pourquoi j’écrirai sur l’amour en mode ‘‘je t’aime moi aussi’’ alors que ma vie est nulle, que je n’ai pas de thune et aucune perspective ? » lance-t-elle dans une discussion avec le journaliste John Robb.
C'est la raison pour laquelle elle peut chanter des trucs du style « j'ai dormi par terre, dans une chambre que je ne peux pas permettre d'avoir, pour un travail dont je n'ai pas envie » sur FNP, qu'elle explique pourquoi elle n'a pas le temps de changer le monde comme le font les bobos (Hippy Elite) ou qu'elle détaille son plan pour appeler le boulot et dire qu'elle est malade alors qu'elle a passé la nuit à faire des dingueries (Call In Sick).
Une autre personne, qu’elle admire puisqu’il est la raison d’être de Billy, fait l’éloge de l’artiste : Jason Williamson. Le chanteur de Sleaford Mods fait la rencontre de la trentenaire et sans surprise, ça matche : Jason accepte d’être sur le premier album de Billy (sur le titre Supermarket Sweep) et Billy accepte de venir poser sa voix sur un morceau du duo de Nottingham (Mork n Mindy sorti sur l’album « Spare Ribs » en 2021).
L’Anglaise, qui été programmé à l’affiche des TransMusicales de Rennes pour son édition 2020, ronge son frein avant une reprise des concerts. Elle a enregistré, lors du confinement chez son père sur l’île de Wight, un nouvel EP qui sort tout juste du four : « Emergency Telephone ». Un disque qui expose aussi une vision artistique (encore) plus sombre, plus synthétique et robotique ( notamment le titre Heels). Si le monde va mal, alors la suite s’annonce bien pour Billy Nomates.