2020 M10 15
Depuis le succès de Fontaines D.C., les yeux sont rivés sur l’Irlande. Souvent relégué en deuxième division malgré quelques fulgurances (The Undertones et plus récemment Girl Band, Silverbacks ou encore Pillow Queens et The Murder Capital), le pays est en train de sortir des groupes qui osent enfin se montrer et prouver de quoi ils sont capables.
Pour les nouveaux venus de Sprints, un quatuor basé à Dublin, il n’aura pas fallu longtemps avant qu’on ne les remarque. Déjà parce qu’ils font du bruit (littéralement), et que ce bruit est d’une bonne qualité. Mais aussi parce que le groupe a les dents longues, et qu’il est prêt à tout ravager sur son passage. Pour l’aspect musical, il n’y a pas de recettes pré-écrites. Le groupe a tendance à se retrouver au pub (pour les concerts, pour les matches de foot, pour boire des coups) et puis ils se mettent à écrire. Une fois cette étape passée, ils se retrouvent dans leur espace de répétition et jouent, sans vraiment chercher à créer quelque chose de spécifique. Une musique qui vient « tout droit du cœur » (sic), brute et honnête.
Derrière les sonorités viscérales, on retrouve une écriture qui donne à la chanteuse Karla Chubb, bisexuelle, un espace pour libérer la parole. Sur le motorik The Cheek, elle chante : « He said baby are you straight? I said bi, bye, bye. » (« Il a demandé bébé tu es hétéro ? J’ai dit bi, bye bye » en VF). Sur le saccadé Drones, elle évoque le syndrome de l’imposteur qu’elle ressent en tant que femme dans un groupe de rock. « J’ai l’impression de devoir constamment prouver que je mérite d’être sur scène, ou de tenir une guitare et un micro dans mes mains. Cette pression peut être difficile à gérer », explique la jeune femme au Magazine DIY. Bref, le groupe n’est donc pas juste là pour casser les oreilles, mais aussi pour les caresser.
Sprints, un énième groupe à la mode qui copie les autres groupes à la mode ? Un raisonnement qui se tient, mais un peu trop simple. À propos du post-punk et de la hype autour de ce genre, Karla répond au NME : « Idles est une grande influence pour le groupe. Mais il s’agit de trouver un équilibre entre eux et LCD Soundsystem par exemple. » S'il est vrai que l'on observe une forme d'uniformisation du rock en ce moment (du moins d'un certain type de rock indé venu de Grande-Bretagne avec Idles, Shame, Hotel Lux ou encore Do Nothing), Sprints semble s'écarter de cette tendance pour côtoyer d'autres formes de musiques, plus expérimentales et noisy.
Le groupe a mis en boite un premier EP de quatre titres (dont Drones fait partie) qui devrait sortir d’ici peu. Un bon de juger si Sprints a trouvé son équilibre ou si le groupe court tout droit vers le mur. On mise plutôt sur l’option numéro 1.