La bande originale de Barbie est-elle bien bien ou barbante ?

Qu'on le veuille ou non, l'industrie cinématographique repose sur des lois marketing intelligemment ficelées. La bande-son de Barbie, le film, ne fait pas exception. Teasé depuis plusieurs mois à coups d'images et de teasers, le long-métrage de Greta Gerwig vise autant à déringardiser l'image trop plastique de cette poupée pas très féministe qu'à encaisser un maximum de dollars avant l'été. 

Et pour cela, la bande-son de Minions: The Rise of Gru, autre blockbuster sorti l'an dernier, fait figure d'exemple. Sur le disque qui accompagnait alors le deuxième volet des petits montres jaunes, on retrouvait alors la crème du top Spotify indie de l'époque, à savoir Caroline Polachek, Kali Uchis, St. Vincent, Thundercat, Tame Impala et même Diana Ross. Un casting poids lourd dont semble s'être largement inspiré Mark Ronson, producteur de la BO de Barbie.

Le choix de Mark Ronson, qu'on ne présente plus (mais à qui l'on doit une part des plus gros succès d'Amy Winehouse, Adele, Bruno Mars ou encore Dua Lipa), semblait finalement tout indiqué. Dans la lignée de la BO des Minions 2, l'Anglais a rameuté tout ce que la planète pop semble compter d'étoiles, au point que le tracklisting de Barbie ressemble à une gigantesque constellation : Billie Eilish, Lizzo, Nicki Minaj, Dua Lipa, Charlie XCX ou encore Fifty Fifty, le girls band de K-pop. Difficile d'imaginer mieux comme casting, d'autant plus qu'on retrouve également Kevin Parker (déjà présent sur la BO des Minions, tiens tiens), HAIM ou encore Sam Smith. Une folie pure, en somme, et plusieurs singles publiés en amont de la sortie du film, histoire de donner beaucoup d'eau à la bouche. A ce stade, ce n'est plus du marketing commercial, mais un art diablement bien rodé.

Mais une fois dépassé l'effet d'annonce, que retenir de cet album au tracklisting démentiel (17 titres !). Plusieurs très bonnes surprises, en fait. D'abord, la bonne forme de la pop anglo-saxonne après plusieurs années de robinet radiophonique : la présence de Dua Lipa comme celle de Lizzo ou Charlie XCX témoigne d'une diversité indispensable à la réussite de cette BO pensée pour casser les codes. D'autant plus que le Speed Drive de Charlie XCX et le Dance The Night de Dua Lipa se sont déjà imposés comme deux des plus gros hits de l'été 2023.

Et on notera au passage que les patrons de Mattel, derrière le succès historique de Barbie, ne manquent pas d'humour : en 1997 ils attaquaient le groupe Aqua en justice pour son tube Barbie Girl qui transformait la poupée en objet sexuel et moquait son côté plante verte. Vingt-cinq ans plus tard, on retrouve le même groupe en featuring avec la très rose Nicki Minaj sur le même titre renommé Barbie World. Preuve que les temps ont changé, dans le bon sens.

Et puis il y a quelques surprises par définition inattendues : comme ce I'm just Ken chanté par Ryan Gosling, peut-être l'un des meilleurs titres de la BO, et où l'acteur se lance dans un titre à tiroirs, dans la grande tradition des shows de Broadway. Absolument imparable. Et idem pour le Choose your fighter d'Ava Max, à ranger assez haut dans les bangers Eurodance qui devraient faire transpirer les dancefloors des clubs tout l'été.

Au final, la BO de Barbie est un quasi sans-faute, et rien que le fait d'écrire cette phrase a de quoi surprendre. Comme Edith Piaf, tous les artistes réunis ici voient la vie en rose, et elle semble nettement plus inclusive que celle des débuts de la plus célèbre des poupées américaines. Loin des clichés, et pour citer France Gall, celle de 2023 semble plus attirée par le son que par la cire.