2022 M11 27
Depuis que « And In The Darkness, Hearts Aglow » est disponible partout, les médias sont en boucle sur Weyes Blood. Français comme internationaux, tous sont dithyrambiques à son propos, et chacun, plus ou moins à sa façon, essaye de mettre en valeur les points forts des créations de la Californienne. Que ce soit ses paroles, sa voix ou sa musique, on a fait le tour de tous ces articles pour tenter de décrypter le phénomène.
Pour commencer notre revue de presse, on traverse directement l’Atlantique en direction des États-Unis : Pitchfork a accordé la note de 8,4/10 et donc la pastille « Best new music » au disque. Dans une longue chronique, le titre de Chicago met principalement en avant la technique sémantique qu’a développée la compositrice :
« La plupart des chansons durent environ six minutes et se déroulent au rythme tranquille des méditations guidées. Et, peut-être en raison du sentiment de communion-via-solitude épousé dans le premier morceau, les paroles parlent de “nous” presque aussi souvent que de “je”. […] Même lorsque Mering s’adresse à l’humanité dans son ensemble, ses particularités en tant qu’auteure et interprète rendent la musique personnelle et vivante. »
Dans la continuité de l’analyse de ses confrères, la plume du New York Times rentre dans le cœur de cet album. En plus de dévoiler les thèmes centraux de ce disque, la journaliste remonte le temps pour ancrer dans une scène musicale précise le son de la Californienne :
« Weyes Blood ne fait pas dans la simple nostalgie. Au lieu de cela, la chanteuse auteure et compositrice de 34 ans ressuscite, de manière étrange, le son du folk rock de la côte ouest de la fin des années 60 et du début des années 70 pour aborder des crises existentielles et des conflits plus contemporains, comme la solitude de l’ère numérique et le changement climatique. »
De son côté, le NME qui octroie ses 5 étoiles maximum à l’album, préfère isoler le caractère intemporel des lyrics, sans conteste, l’un des éléments les plus appréciés de cet essai. En reprenant l’observation de leurs collègues de Chicago, ils expliquent :
« Écrit alors que Mering était enfermée à Los Angeles avec son chien Luigi, “And In The Darkness, Hearts Aglow” évite habilement d’aborder directement la pandémie avec des références maladroites qui seraient rapidement dépassées. Au lieu de cela, un sentiment d’isolement plus vague et plus inquiétant jette une ombre sur la totalité du disque, bien que la douleur de la perte soit vite comblée par un désir urgent d’être ensemble. »
Retour en France, directement chez nos confrères de Numéro qui ont pu rencontrer l’Américaine. Sans rentrer dans les profondeurs de leur conversation avec Weyes Blood, concentrons-nous sur la façon dont ils décrivent son outil de travail :
« Sa voix, l’une des plus belles habitant actuellement un corps animé, apparaît comme un phare dans la nuit. La beauté de son organe aux vertus élégiaques, couplée à des mélodies orchestrales enlevées, prouve, à elle seule, qu’on a raison de continuer à se battre dans un environnement plus que tourmenté. »
Maintenant, un bref détour par Libération dans le but de comprendre le spectre sonore que brosse « And In The Darkness, Hearts Aglow ». Ici, pour saisir l’étendue des orientations de ce disque, le quotidien ouvre un éventail de référents aussi large que précis :
« Comment expliquer alors que les dix chansons très amples de cet album s’épanouissent dans une telle opulence de mélodies et de beauté ? […] Natalie Mering, anciennement pythie des musiques expérimentales, est devenue l’une des plus puissantes songwriters au travail en ce moment aux États-Unis. Mais elle passe encore un cap avec cette suite aux airs opératiques, immensément ambitieuse, dont l’amplitude musicale va des Carpenters à Gershwin […]. »
Au milieu de ce champ de roses, The Guardian fait office de semi-exception en trouvant tout de même une petite épine dans l’épiderme de ce disque. Malgré un argumentaire dans lequel ils congratulent sa « voix extraordinairement merveilleuse - une version du 21e siècle de l’idiome folk-pop de Laurel Canyon des années 1960 », les Anglais regrettent que « le son de ces chansons ne soit pas aussi écrasant que celui de “Titanic Rising”, le prédécesseur de cet album, dont l’écho est magnifique ».
Un brin moqueurs, les Montréalais du Devoir soulignent eux le timing parfait qui accompagne la sortie du nouveau disque de Natalie Mering : « Ce cinquième album de Weyes Blood paraît opportunément au moment où la presse musicale dresse ses palmarès des meilleurs projets de 2022. » Une façon habile d’introduire cette notion de consensus qui règne entre les acteurs du secteur au moment d’établir leur top de l’année. A vous de vous faire un avis désormais, avec l'album à écouter ci-dessous.
Crédit photo en une : Détail pochette « And In The Darkness, Hearts Aglow »