Mais au fait, d’où vient le mot “funk” ?

Surprise : la funk est française. Du moins étymologiquement.
  • Aujourd’hui, quand l’on entend funk, il est évident que ce mot renvoie à un genre musical connu de tous. Mais il fut un temps où il était synonyme de “mauvaise odeur”. Il faut remonter au Moyen Âge pour comprendre la véritable origine de funk, à une époque où les Français élaborent les fromages les plus odorants du monde.

    En vieux français, funkière signifie “fumer”, lui-même issu du latin fumigare. Lorsque des frenchies se mettent à produire du fromage fumé, le terme de funkière revient régulièrement dans l’Hexagone. Mais une fois que ces frometons traversent la Manche et se retrouvent entre les mains des Anglais, leur odeur ne plaît pas du tout. Tout d’un coup, le terme utilisé pour parler de fromages fumés se retrouve être le synonyme de “puer”, ni plus ni moins. Sa première apparition comme tel remonte à 1620 et funk disparaîtra de la langue anglaise au début des années 1800, bien que l'adjectif funky restera dans les bouches britanniques puis américaines. Il faut faire un bon dans le temps pour arriver au XXème siècle et voir ce mot se métamorphoser de nouveau.

    Dans son livre Flash of the Spirit: African and Afro-American Art and Philosophy, l’historien américain Robert Farris Thompson évoque une possible origine pour funky. Selon lui, ce terme vient de lu-fuki, mot tiré d’un dialecte congolais, qui signifie également “forte odeur corporelle” (on y revient), mais pas que. Thompson explique son raisonnement à travers son recueil : “le mot congolais est plus proche du mot jazz funky dans sa forme et sa signification, car les jazzmen et les Bakongo [un peuple d'Afrique centrale, Ndlr] utilisent lu-fuki afin de vanter certaines personnes pour l'intégrité de leur art.” Pour l’auteur, c’est grâce au Ki-Kongo, un sombre dialecte africain, que funk fut intégré dans le langage courant américain.  

    La première apparition du mot funk (ou funky) dans la musique n’a rien à voir avec une quelconque chanson de George Clinton. Ce sont les musiciens de jazz du début du siècle dernier qui employaient ce terme dans le même sens que « se lâcher ». On peut facilement supposer qu’en se lâchant, les artistes se mettaient à transpirer pendant leurs répétitions et donc à puer, d’où le lien avec l’origine du mot. A noter qu’à l’époque, funk était encore considéré comme un mot grossier. Le trompettiste Buddy Bolden, premier chef d’orchestre jazz au monde, employait souvent funky pour inciter ses musiciens à lâcher prise pendant qu’ils jouaient. 

    Le batteur Earl Palmer, originaire de La Nouvelle-Orléans, tout comme Bolden, serait le tout premier à avoir utilisé le mot funk pour parler du style musical tel qu’on le connaît aujourd’hui. Alors que nous sommes en plein dans les années 1950, le musicien s’inspire du jazz et du R’n’B pour les rendre plus lents et sexys. Il aurait demandé à ses comparses jazzmen de jouer de la musique “plus cadencée et plus dansante”. Et la funk était née.