Lewis OfMan sort un "tringle", on a été l'interviewer chez ses parents

  • Il a fait la première partie de Yelle, sorti quelques EP et même composé pour plusieurs défilés de mode; bref Lewis commence à sérieusement faire parler de lui. Une occasion en or pour s’inviter chez ses vieux et lui poser quelques questions à propos de son nouveau "tringle", soit 3 singles d'un coup.

    Commençons par la plus grosse question : c’est quoi un tringle ?

    Ni un album, ni un EP, c’est un terme que j’ai inventé. Je ne voulais pas me lancer dans la construction d’un projet trop long et en même temps j’étais content des morceaux que j’avais à proposer. Du coup, je trouvais ça sympa de les sortir un peu à ma façon : trois singles ça fait un « tringle » !

    Ton prochain tringle tu comptes aussi le composer chez tes parents ?

    Non, je pense que je vais bouger. Le plus important c’est de sentir l'énergie de l'endroit, la vibe qui va m’inspirer. À présent, ça fait presque vingt ans que je vis entre ces murs et c'est un peu comme si j’en avais épuisé toute l’essence. Donc je fais mes derniers projets et après je pars, peut-être à New York ou sinon dans un petit village du sud, en tout cas deux opposés. Miró faisait ça aussi, il retournait souvent dans son village d'enfance. C'est important de mélanger les atmosphères qui n'ont rien à voir.

    Comment tu en es venu à la musique?

    C'est arrivé sans que je ne m'en rende compte. À vrai dire, quand j'étais petit, je voulais être chirurgien. Puis j'ai commencé à additionner des boucles sur GarageBand et à chanter des-sus en yaourt avec mes potes. Au lycée j'ai commencé à faire des compositions de mon côté et j'ai même sorti un EP en 2014, sans en parler mais en espérant que des filles tombent dessus. Quand c’est arrivé, j’ai commencé à promouvoir un peu ma musique et à m'équiper.

    Qu'est-ce qui t'inspire quand tu fais de la musique?

    Mon truc, ce sont les atmosphères. En ce moment j'ai découvert Pinterest et c'est génial pour s'inspirer. Ça m'aide à me projeter dans des visions et à me demander à quoi la musique peut me faire penser. C'est une sorte de relais : je fais l'accord, il m'inspire une vision et je la retranscris à ma façon. Quand les gens dépeignent ma musique et l'assimilent aux mêmes références que les miennes je suis hyper content.

    Tu as un trio qui revient tout le temps : Gainsbourg, John Lennon et Frank Ocean.

    Avec John Lennon j’ai cette vision de lui à New York en train de composer derrière son grand piano blanc. C’est cette période new-yorkaise, sa façon d'être unique et tout ce qu'il représente qui m’inspire. Gainsbourg joue aussi ce rôle de modèle. J’adore la façon qu’il avait d’écrire et de s’assumer entièrement. Il y a beaucoup de sensibilité dans ces personnalités. Frank Ocean, pour moi, c'est l'artiste musical le plus important du XXIe siècle. Ce qu'il a fait avec "Blonde" ce n'est pas quelque chose de normal, qu'on a l'habitude de voir aujourd'hui. C'est à la fois beau et touchant, un mélange de charme et de romantisme.

    Ce sont des sentiments que tu cherches à faire passer toi aussi ?

    Quand je crée, j'essaie d'être le plus personnel et le plus honnête possible. Dans mon répertoire j'ai des chansons vides que je ne sortirai jamais. Elles groovent et elles font danser les gens mais elles manquent d'authenticité et de spontanéité. Aujourd’hui, il y a tellement de morceaux différents qu’ils ont fini par devenir des produits, des hits. D’où la nécessité de faire des choses qui sont vraiment originales, pour se donner la possibilité de partager des choses. C'est aussi pour ça que j'ai du mal avec le mot producteur, il y a ce langage de production qui n'a rien à voir avec l’artistique ou le musical. Pourquoi on a commencé à appeler les gens qui font de la musique des producteurs alors que c'est un art ?

    Pourtant ça ne t'a pas empêché de travailler en tant que producteur avec des artistes comme Fakear ou The Pirouettes.

    Oui, d'ailleurs il y a un point que j'aimerais éclaircir : je n'ai jamais travaillé avec Lana Del Rey ! Je ne sais pas d'où ça sort, j'ai simplement fait un remix à mes débuts et depuis tout le monde pense que j'ai bossé avec elle. Voilà... Sinon avec des artistes comme Rejjie Snow ce ne sont pas des prod' de rap que j'ai faites, ce sont des chansons qui correspondent à ma façon de travailler.

    Avant tu qualifiais ta musique d’électro bleue. Pour coller à l’esprit de la mode, si ça devait être une matière ça serait laquelle?

    Je dirais de l'eau. La musique c'est quelque chose qui est tout le temps avec nous sans qu'on ne s'en rende compte. On ne fait plus attention au goût de l'eau pourtant on en boit tout le temps. La musique c'est pareil, ça a pris tellement de grosses proportions qu'on n'y accorde plus d'importance.

    Tu préfères faire des sons ou des clips?

    Les clips j'en ai marre, c'est insupportable ! À la limite pour Plein De Bisous on a réfléchi ensemble avec Écoute Chérie et je trouve ça plus logique. Mais je ne comprends pas pourquoi aujourd'hui on se sent obligés de faire un clip. D'ailleurs le tringle ne viendra pas avec des clips mais avec quelque chose de spécial sur lequel on est en train de bosser. C'est tellement bête de tomber dans la rengaine : "Je sors un morceau donc je fais un clip." Parfois la musique n’est tout simplement pas faite pour être mise en vidéo et on n'est pas obligés de la prêter à quelqu'un pour qu'il donne sa propre vision des choses. Pour rester dans l’optique du vrai partage de soi-même, ça voudrait dire qu'il faudrait que je réalise moi-même tous mes clips et c'est super fatigant. Je ne fais pas de la musique pour faire des vidéos, je dois déjà m'occuper de faire de la bonne musique.

    Lewis Ofman sera au festival We Love Green le 2 juin.

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