Yellowjackets, la série qui nous replonge dans la musique des années 90

Disponible sur CANAL+, la série Yellowjackets place son intrigue en partie dans les nineties. Et pour mieux nous immerger dans son ambiance sombre, il était naturel d’aller piocher dans des classiques de l’époque. Avec de très bons choix.
  • Un croisement de Sa Majesté Des Mouches et Lost : on pourrait ainsi résumer rapidement la série Yellowjackets. Créée en 2021, et disponible sur CANAL + depuis le 3 mars, elle suit un groupe d’adolescentes perdues en forêt suite à un crash d’avion. On alterne ainsi entre leur survie difficile et violente et leur vie 25 ans plus tard, où le passé les rattrape. Mais le plus important dans cette histoire est que le crash se déroule en 1996. L’occasion parfaite de jouer sur une veine nostalgique, pour mieux nous y plonger. Et si cela passe par une attention aux détails, la musique est évidemment essentielle pour nous plonger dans cette période.

    Or, dans les années 90, le rock régnait encore en maître. Le simple choix du duo de compositeurs en est révélateur. Après un pilote composé par Theodore Shapiro, ce sont Craig Wedren et Anna Waronker qui se sont occupés de la musique originale. Le premier a officié comme leader du groupe Shudder To Think, à la croisée entre glam et post hardcore, dans les années 80 et 90. La seconde est encore la voix de That Dog, formation punk quelque part entre Hole et Beck. Si les deux musiciens sont depuis déjà longtemps reconvertis en compositeur de films et séries, qui de mieux pour imiter le rock des 90’s que ceux qui l’ont produit ? C’est d’ailleurs à Wedren qu’on doit la présence de sa comparse, comme il l’explique à Pitchfork : « je sentais que non seulement ce serait parfait pour Anna et moi, mais aussi qu’il y avait besoin d’une voix féminine, étant donnée la nature de la série ».

    La filiation se fait clairement sur le titre du générique, No Return, créé à quatre mains. Le simple fait de composer un morceau pour le générique d’une série est d’emblée rétro. Mais le son grunge, porté par une boucle d’orgue obsédante, enfonce le clou. On aurait presque envie de trouer nos jeans. Le duo avoue avoir « cherché à canaliser nos racines 90’s dans quelque chose qui sonnerait à la fois comme d’époque, mais qui ne pourrait être fait que maintenant. Comme la série ». Ils évoquent ainsi Sonic Youth, David Lynch, They Might Be Giants ou les plus obscurs Jesus Lizard comme influence. Mais surtout ce sentiment de l’époque, comme l’évoque Wedren : « cette attitude blasée, spécifique à la génération X. […] J’imagine qu’elle est en vogue parce que les années 90 sont… de retour ? »

    Mais bien sûr, rien ne plonge mieux dans une époque que les morceaux qui l’ont marquée. Pour cela, la série a bénéficié de l’expertise de Jen Malone et Whitney Pilzer, déjà derrière les trouvailles d’Atlanta ou encore Euphoria. À plusieurs reprises, durant les dix épisodes de la saison, des classiques viennent s’installer, comme le Kiss From A Rose de Seal, Glory Box de Portishead, Down By The Water de PJ Harvey ou Fade Into You de Mazzy Star, ou même Firestarter de The Prodigy. Les choix se portent tout autant sur des incontournables de l’époque (Hole, Smashing Pumpkins, Liz Phair, Dinosaur Jr., Cranberries) que des plus obscurs (Dore Soul, Throwing Muses). Rassemblée dans une playlist, cette sélection nous offre une plongée totale dans la tête d’un mélomane de l’époque, entre punk, R'n'B et hip-hop.

    L’explication est très simple : Malone a grandi au même endroit et à la même période que les personnages. « C’est tout ce qu’il y avait sur ma playlist personnelle » confie-t-elle. Elle avoue même ne pas avoir eu l’autorisation pour certains artistes, notamment Tori Amos, qu’elle espère pouvoir placer dans la deuxième saison, en cours de production. Nine Inch Nails, Björk ou Garbage sont également dans ses vœux, qui s'apparentent presque à bingo de l'époque. À travers ces choix, ainsi que la personnalité des personnages (comme la très punk Natalie), on fait face à bien plus qu’une reconstitution : une réhabilitation de cette période. Le public cible est ainsi tout à la fois ceux qui ont vécu cette période, mais surtout les jeunes générations, nostalgiques d’une période qui leur est inconnue. C’est le constat que fait Malone : « quand tu es jeune, tu sais que c’est arrivé, et que c’était cool, mais tu n’en as pas fait l’expérience. Et c’est, je pense, ce qui rend ça cool à tes yeux ». Et ce rôle de passeur lui convient à merveille : « amener des jeunes filles et gars à découvrir PJ Harvey ou Portishead, comment est-ce que ça ne pourrait pas être génial ? ».

    Pour celles et ceux qui auraient envie d'un flashback, Yellowjackets est disponible exclusivement sur CANAL +.

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