2020 M06 17
Comme n’importe quel courant musical, le rap connaît de multiples sous-genres. Ces dernières années, deux se distinguent : l’emo-rap et la drill, représentés par des artistes tour à tour torturés ou à l’instinct primitif. Dans les deux cas, ces genres sont purement américains. Ou du moins anglo-saxons, la drill ayant vu naître une scène singulière en Angleterre : soit des mecs masqués, prêts à en découdre et à cracher leur haine sur des instrus qui doivent autant à la 2-Step et au grime de Skepta qu’au hip-hop de Chief Keef.
Il semble en revanche plus délicat de définir l’emodrill comme une musique autrement que française. Retro X, à l’origine de cette compilation à paraître le 10 juillet, la définit ainsi : « Un mélange de plusieurs cultures musicales, entre le cloud rap, la variété française et la drill de Chicago. » 5ème Symphonie, le premier extrait de « Emodrill : Le nouveau western », en donne une idée assez précise : une production sombre, à la fois rêche et sophistiquée, un flow possiblement ralenti par la consommation de codéine et des paroles qui trahissent un instinct guerrier (« Je donnerais tout pour te tirer dans ta tête / Que ta put*** de mère te voie comme un squelette »).
La véritable force de cette compilation est aussi de présenter cette scène sous toutes ses formes. Un, en s’appuyant sur de jeunes artistes d’ores et déjà respectés pour leur volonté de se tenir à l’avant-garde du rap hexagonal (Jorrdee, Lala &ce, Captain Roshi, Le Juiice). Deux, en variant les styles et les approches. Ainsi, difficile à priori de tisser des liens entre 5ème Symphonie et la poésie langoureuse de Ciao Bye ou l’atmosphère enfumée de Dwayne Lest, si ce n’est cet univers que Retro X et ses amis semblent avoir voulu développer tout au long de ces 25 morceaux. Pour un résultat, certes très cinématographique, mais surtout très novateur. À l'image de cette bande-annonce, digne d'une production hollywoodienne.