Qui ne connaît pas Carol Kaye, la bassiste derrière 10 000 chansons du rock ?

Discrets mais partout, les musiciens de session ont marqué bien des mélomanes sans qu’on ne connaisse rien d’eux. Mais même les plus célèbres de ces anonymes restent loin de Carol Kaye. Portrait.
  • Les Beach Boys, Michel Legrand, Quincy Jones, Frank Black, Stevie Wonder, Zappa et même Batman : tous ont un point commun. Et celui-ci s’appelle Carol Kaye. Musicienne de studio légendaire, elle revendique pas moins de 10 000 enregistrements. Bon courage pour remplir sa page Discogs. Et chez elle, la quantité n’empêche pas la quantité. Adulée par Quincy Jones ou Brian Wilson, elle figure également en 2020 dans un classement du magazine Rolling Stone des meilleurs bassistes du monde. On la retrouve carrément en cinquième position, devant Jaco Pastorius, Flea ou Stanley Clarke. Beau palmarès pour une musicienne quasi inconnue du grand public.

    Née dans une famille de musiciens, elle s’intéresse d’abord à la guitare. Elle écume les clubs de jazz de Los Angeles, avant de privilégier le studio, plus lucratif. Dès le départ, on la retrouve auprès des grandes stars du moment : Sam Cooke, Ritchie Valens et sa Bamba, ou encore Phil Spector. Mais c’est en 1963 que sa vie prend un tournant, lorsqu’elle doit remplacer au pied levé un bassiste absent. Elle saisit vite la forte demande pour cet instrument, et s’y adonne à fond. Très vite, elle devient ainsi un rouage essentiel des studios de Los Angeles, en intégrant même le célèbre Wrecking Crew, ensemble informel de musiciens de studio.

    Cette période des années 60 est la plus intense de sa vie. Il devient même difficile de trouver des artistes avec qui elle n’a pas joué. Ray Charles, les Byrds, les Supremes, Stevie Wonder, Simon & Garfunkel, Barbara Streisand, Sonny & Cher, ou même Frank Zappa, la liste est sans fin. Elle intègre également l’univers des musiques de films, auprès de John Williams ou Lalo Schifrin. Mais sa collaboration la plus marquante est sans doute auprès des Beach Boys. Que ce soit Good Vibrations, “Pet Sounds” ou l’inachevé “The Smile”, elle y amène chaque fois son style unique de basse jouée au plectre, avec un sens unique de la mélodie et de l’improvisation. Et surtout un sens du groove d'une précision minutieuse, qui va notamment marquer Paul McCartney, puis de nombreux autres bassistes.

    Si son rythme est plus calme depuis les années 70 (notamment en raison d’une arthrite), elle s’adonne depuis à la pédagogie, avec de nombreuses méthodes de basse. Encore aujourd’hui, elle donne des cours via Skype. Une manière d’approcher la légende. Mais qu’on n’aille pas lui parler du fait d’être une femme dans un milieu d’hommes. Si elle a bien subi de nombreuses remarques sexistes, elle continue d’affirmer avec force : “Une note n’a pas de sexe. Ce qui compte, c’est qu'elle soit bien jouée.

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