Seth Everman, le chauve qui fait les meilleures reprises de l'Internet

Peut-être le connaissez-vous pour son fameux commentaire sous le clip de "Bad Guy" de Billie Eilish, le premier à dépasser le million de likes sur YouTube. Ou peut-être avez-vous déjà vu passer son faciès inexpressif à l’occasion d’une de ses hilarantes reprises. Dans tous les cas, le Suédois Seth Everman démontre à chaque apparition qu’il maîtrise à la perfection les codes pour devenir viral. Au point d'être devenu un mème Internet.
  • La Suède est décidément un grand exportateur de youtubeurs. Alors que le gamer PewDiePie a longtemps été le créateur possédant le plus d’abonnés au monde, Seth Everman s’est également très vite imposé dans la partie musicale de la plateforme. Avec 4,5 millions d’abonnés, il multiplie les succès d’audience, dépassant régulièrement les 10 millions de vues.

    Mais avant de comprendre la recette de son succès, il faut bien comprendre que Seth est loin d’être un débutant. Si sa chaîne actuelle date de 2015, il publie en réalité depuis 2006, alors qu’il n’avait que 13 ans. Ces premiers essais, où il n’apparaissait pas, sont aujourd’hui bien cachés. À l’exception d’une vidéo de 2011, republiée sur sa chaîne, dans laquelle il regarde pendant dix heures d’affilée la boucle du Nyan Cat, meme horripilant de l’époque. Toutes les clés de son succès futur sont déjà là : un mélange de parodie (à savoir une parodie des vidéos de réaction, déjà très à la mode), un amour des mèmes et des codes d’Internet, et la présence de musique. En parallèle, il apprend le piano et les percussions dans sa ville de Stockholm.

    Le déclic créatif se passe sur Tumblr. Il y publie une courte vidéo dans laquelle il superpose un morceau de Drake et différentes musiques de jeux vidéos. La pastille est largement repostée sur le site, et, dans la foulée, Seth crée sa chaîne YouTube. Dès 2016, sa troisième vidéo devient virale. D’une durée de 40 secondes, elle consiste tout simplement en deux mashups : démarrant sur un morceau classique, il glisse vers des morceaux de rap. Le deuxième, passant naturellement de la Sonate au clair de Lune de Beethoven vers Still D.R.E. de Dr. Dre, deviendra même sa signature. Mais surtout, tout est déjà là : un format taillé pour les réseaux sociaux, un concept clair et propice à devenir un meme, et surtout la mise en scène.

    Le cadrage est simple, mais revient dans toutes ses vidéos, ce qui le rend directement identifiable, tout en lui permettant de modifier le reste du décor. Et puis son physique même devient un élément central de ses vidéos. Seth mesure en effet plus de deux mètres, et a le crâne rasé. On ne peut pas le louper. La dernière touche étant évidemment son expression faciale, toujours blasée, sans dissimuler son amusement pour autant. Bref, rien qu’avec ces éléments, le musicien sait comment se transformer en meme vivant.

    Tout ceci posé, le vidéaste n’a ainsi plus qu’à enchaîner les covers, systématiquement débiles et pourtant terriblement cool. Et surtout, toujours surprenantes, que ce soit dans le choix des musiques ou le montage, chaque fois précis et direct, mais également bourré de détails idiots. Sa plus grande réussite reste sûrement la cover du Bad Guy de Billie Eilish, qui multiplie les trouvailles hilarantes (en particulier la surprise finale). Ce n’est pas un hasard si cette vidéo est son plus grand succès à ce jour, avec 83 millions de vues. C’est d’ailleurs à cette occasion qu’il publie son fameux « I’m the bald guy » sous le clip original, avec le succès que l’on connaît. Bref, pas besoin de beaucoup publier (sa chaîne compte 43 vidéos en 6 ans, dont 27 reprises) : il suffit d’avoir les bonnes idées.

    Si Seth Everman semble avoir tout compris, c’est tout simplement parce qu’il est représentatif du public qui a grandi avec la plateforme. Né en 1993, il est de cette génération qui a vu Internet se démocratiser, et il en maîtrise tous les codes les plus pointus. Plus largement, il est un parfait exemple d’un geek de cet âge : fan de X-Files (on peut voir une découpe carton de Mulder et Scully dans son décor) et du Seigneur des Anneaux, il est surtout un grand passionné des jeux Nintendo. Il collectionne notamment les 11 différentes versions de la Nintendo 64, console sortie en 1997, ainsi que de nombreux jeux et accessoires Pokemon, Zelda ou Mario. Autant d’objets qu’il met en avant dans ses vidéos, en tant que percussions ou simples décorations.

    Seth Everman atteint ainsi un équilibre plus fin qu’il n’y paraît entre nostalgie et modernité. Il hérite à la fois de la culture des années 90 et des méthodes artisanales des premières vidéos YouTube, tout en s’inscrivant dans les nouveaux formats propres aux réseaux sociaux, et notamment TikTok. Bref, en gagnant sur tous les tableaux, on peut peut dire que c'est un peu jeu, Seth et match.

    Pour mater toutes ses vidéos, c'est par là