Portrait d'Anna Karina, sous la musique exactement

L'égérie de la Nouvelle Vague est décédée ce week-end des suites d'un cancer. En plus d'une filmographie iconique, elle laisse derrière elle des chansons qui ont marqué l’imaginaire populaire.

Anna fait son cinéma. Lorsqu'elle s'installe à Paris en 1957, Hanne Karin Bayer n'a que 17 ans. Elle vient de quitter son Danemark natal et rien ne la prédestine à devenir l'icône de la Nouvelle Vague, le visage, la voix et la grâce du cinéma de Jean-Luc Godard. Pourtant, les années 1960, ce sont un peu les siennes, et celles d'une certaine idée du cinéma. Agnès Varda, Chris Marker, Jacques Rivette, Éric Rohmer, Luchino Visconti : Anna Karina enchaine les tournages avec les plus grands réalisateurs. Mieux, elle participe également à certaines de leurs bandes-originales.

Des films en chansons. La première fois, c'était en 1962, dans Une femme est une femme de Godard, sur une mélodie de Michel Legrand (La chanson d'Angela). Puis vient ce duo entamé avec Claude Brasseur sur Dragées au Poivre, le fabuleux Ma ligne de chance entonné aux côtés de Belmondo sur le sable fin d'une plage dans Pierrot Le Fou et, bien sûr, Sous le soleil exactement, écrit et composé par Serge Gainsbourg en 1967 pour sa comédie musicale, Anna. « Elle a sa personnalité. Elle a des moyens vocaux, ce qui est très rare. Elle a le sens de l'humour, c'est très rare. Elle a la sensualité, une gamme très étendue de moyens », disait le grand Serge à son sujet.

Double K. Sur la B.O. d'Anna, il y a également Ne dis rien. Un conseil qu'Anna Karina n'a visiblement jamais cherché à appliquer. Chez elle, chanter est un besoin. Alors, en 2000, elle s'associe à Katerine le temps d'un album, « Une histoire d'amour ». La voix se fait plus grave, mais la démarche est la même : à la composition, aux arrangements et à l'écriture, Katerine est en quelque sorte le metteur en scène d'Anna Karina, le réalisateur d'un album placé sous le signe de la romance.

Celle qui a permis à Anna Karina de traverser les décennies en collaborant avec les plus grands. Celle qui lui permet également en 2013 de convier Jeanne Cherhal, Katerine (forcément) et Barbara Carlotti à sa relecture du conte La Petite Sirène. Celle, enfin, qui semble avoir guidé sa carrière artistique. Et ce même si elle ne nous a jamais dit qu'elle nous aimerait toujours.